Chapitre 7: Le diplôme

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Je me sens secouée de gauche à droite comme si j'étais sur un bateau qui se battait contre les fortes vagues, tentant de le faire céder. Je grogne légèrement en voyant que ça ne s'arrête pas.

J'ouvre les yeux doucement et vois mon meilleur ami sur le côté du lit, ses mains sont posées sur mon épaule gauche et il exerce des pressions pour créer des secousses et me réveiller de mon profond sommeil. C'est réussi à vrai dire, et cela semble l'amuser puisqu'il continue même devant mes yeux grands ouverts.

Je me redresse en fronçant les sourcils, étant encore dans le flou du sommeil.

-Qu'est ce qui te prend?

- Tu as oublié ce qui se passe aujourd'hui, tu n'es pas sérieuse?

Il hausse un sourcil, surpris de ma question.

-Dis-moi au lieu de jouer aux devinettes dès l'aube!

Je râle en prenant mon oreiller et lui aplatis pleinement sur le visage sans y mettre de la force, n'ayant pas la foi de la mettre.

Je n'ai vraiment pas la forme, je déteste qu'on me réveille alors que je dors paisiblement. Notre corps devrait envoyer une décharge aux personnes qui tentent de nous extirper de nos rêves.

-Ton diplôme, espèce de débile!

Il récupère mon oreiller et la garde dans ses bras en me regardant.

J'esquisse un faible sourire en me laissant retomber dans mon lit sans grâce et le regarde.

-Je n'ai pas envie de bouger, je suis trop bien ici!

Je fais une mine triste et m'emmitoufle dans la couverture.

- Tu ne me laisses pas le choix!

Je sens que mon lit cesse de pencher d'un côté, mais je ne lève pas la tête pour autant. Sans que je m'y attende, la couette m'ait retiré d'un coup, me donnant l'impression d'être nue, je me recroqueville sur moi-même pour me réchauffer.

Timothé revient vers moi en souriant d'un air sadique. Il me tire vers lui, me faisant redresser, je me laisse faire sans conviction et il m'entraîne sur son épaule. Je me retrouve la tête en bas dans son dos et mes jambes se baladent dans le vide tapant dans son torse quand il marche. Je lève la tête et remarque que je suis devant mon armoire de vêtement. Mes pieds touchent doucement le sol et je le regarde avant de frapper son torse. Je voulais dormir non me lever pour aller à une cérémonie qui m'importe peu. Oui, j'ai un papier important au final mais cette cérémonie est longue, très longue.

-Je te laisse t'habiller, et si dans dix minutes tu n'es pas en bas, tu marcheras jusqu'au lieu.

Il ne me laisse pas le temps de répondre et s'en va, le temps est compté dès à présent.

J'attrape des vêtements au hasard, mais assez corrects, ils seront cachés par cette tunique de diplômé de toute manière.

° ° °

Je descends en vitesse devant ma minute de retard, mon meilleure ami attend devant sa petite voiture rouge, il rigole quand il voit mon air affolé et je lui lance un regard des plus noirs avant de monter à ses côtés. Nos parents viendront après leur travail, c'est à dire dans à peu près une heure, ils ont réussi à prendre leur après-midi et c'est vraiment un miracle car leur patron sont assez carrés sur le devoir et la présence de leurs employés.

° ° °

La cérémonie débute et tout le monde s'assoit sur les chaises placées devant l'estrade.

Je peine à trouver une place avec la foule qui se précipite de tous les côtés, je finis par tenir la main de Timothé, hors de questions que je le perde dans cette masse. Nous avons enfin trouvé une place, le soleil commence à taper de plus en plus, et je remercie ces chapeaux de diplomés de nous protéger un minimum mais avec l'uniforme qui va avec, je fonds littéralement, j'aurais dû m'habiller plus légèrement.

Le proviseur demande le calme poliment et commence un discours, bien pensé. Il parle de cet établissement, il retrace notre année en quelques mots et laisse la place après une dizaine de minutes à chaque professeurs, ils relatent les bons et les mauvais moment qu'ils ont pu passer avec nous.

J'écoute leurs paroles attentivement, j'ai jamais entendu des paroles aussi franches, aussi poétiques.

J'ai toujours vécu dans un climat assez froid, assez tendu. Mon meilleur ami a aussi des problèmes familiales mais plus complexes. Nous avons essayé de nous en sortir comme nous pouvions. Nous passions plus de temps ensembles que chez nous, et maintenant nous sommes inséparables. Je ne conçois pas ma vie sans lui, sans son humour enfantin, sa présence, ses surprises.

Je sens des mains se poser sur mes épaules, je tourne la tête directement et vois ma mère me sourire.

Elle n'a pas pris la peine de se changer.

Sûrement pour ne pas louper ma remise de diplôme, son tailleur gris lui va parfaitement bien, il épouse chaque forme de son corps comme s'il avait été crée sur mesure. Son chignon parfaitement tiré vers le haut est à présent un peu détendu lui donnant un air un peu décontracté. Je lui souris en retour et replonge dans les flots de paroles de mes anciens professeurs.

° ° °

C'est à mon tour de récupérer mon diplôme je franchis les quelques marches qui me séparent de mon proviseur, le stress est au plus haut, je respire un bon coup et avance déterminée, sous les applaudissements de mes camarades et leur parents.

Le proviseur me gratifie d'un sourire et me tend une papier enroulé d'un ruban rouge. Il me chuchote un félicitation avant que je marche jusqu'à l'autre extrémité de l'estrade.

Je rejoins mon meilleur ami, ses parents et ma mère en sautillant partout comme une sauterelle, avant de prendre mon meilleur ami dans mes bras. Notre étreinte ne dure que quelques instant.

Je cherche désespérément du regard ma soeur et mon père. Je leur avais envoyé un message pour leur dire que j'aimerais qu'ils soient là, qu'ils soient présent avant que je les quitte pour partir en Espagne avec Timothé,mais à mon plus grand regret. Ils ne font pas partie de cette foule.

Je regarde mon meilleur ami et baisse les yeux, il comprend de suite et prend ma main avant de le tirer vers lui pour me faire un autre câlin.

- Je suis désolée Dot'... Me chuchote-t-il au creux de l'oreille puis m'embrasse la joue.

J'enfouis mon visage dans son cou,me laissant border par sa douce étreinte et ses phrases encourageantes qu'il prononce.

Je relève la tête et surprends ma mère me fixant, quand elle capte enfin mon regard, elle me fait un petit sourire désolé. Elle voulait dire quelque chose mais elle s'y résigne.

Elle repart dans ses petites histoires quotidiennes avec les parents de Timothé, comme si de rien n'était.

Comme si l'obtention de mon diplôme suffirait à baumer mes douleurs, à apaiser ces absences qui me fragilisent un peu plus chaque jour.


Le Tunnel Des ÉmotionsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant