Chapitre 3 - Idriss

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Je me leva un peu plus tôt aujourd'hui, pour admirer le lever du jour. C'était si beau, un monde qui s'éveillait, tel un enfant, à la vie afin de quitter les ténèbres. La neige et la glace s'étaient installés, et malgré le temps, je n'avait pas froid.
Je n'ai jamais eu froid, jamais réellement. C'est comme s'il ne m'atteignait pas, comme s'il n'existait pas, que plus rien n'existait : Il y avait seulement lui et moi.

C'est sans doute pour cela que tout le monde me trouvai étrange, la première chose que l'on ressent lorsque l'hiver est là c'est l'insécurité, la peur, l'inconfort et la mort. Pas pour moi, il est différent, ce n'est plus une contrainte c'est ma liberté, tout semble partir, s'envoler en même temps que les feuilles quand le vent se lève.
Pour moi, cela ne changerai jamais, toute ma vie j'ai aimé la glace et je l'aimerai toujours.
Cela me rappelle mon innocence, mon enfance : pourquoi devient-on adulte, pourquoi ne pas rester un enfant toute sa vie.

En un sens tout serait plus facile, si on était tous enfant pour le restant de nos vie, le monde serai facile, pas de mort, on ne comprendrais plus rien, on ne connaîtrait plus rien, on oublierais les problèmes et quelques flocons nous redonneraient le sourire. Je sortis de mes pensées, à quoi bon se plaindre, de toute manière il était trop tard : j'étais déjà adulte.

J'attrapai au passage ma cape bleu, afin de ne pas mourir sous les coups violents que pouvaient infliger le froid. Je ne les sentais pas mais cela ne voulait pas dire qu'ils n'existaient pas.
Je courrus jusqu'à la rivière.

Le magnifique lit bleu était devenu pur, ainsi que tout ce qui est touchée par l'hiver, le reflet du soleil scintillait sur le corps de le cours d'eau devenu fantastique, tel un rêve, sublimé par la nature endormis.

Encore quelque chose qui ne changerai pas, la nature sommeillant durant le long hiver, tout était tel une scène en pause, plus rien ne frémissait, plus rien ne bougeait, plus rien n'osait respirer. Je croyais que la vie s'arrêtait aussi, attendant le printemps pour revivre avec les infortunes de chacun.

"- Idriss !"
Je fus sortis de ma contemplation de ce tableau par une voix que je connaissais bien, celle d'une connaissance. Je détourna le regard, voyant une silhouette courir en ma direction, ralentissant petit a petit pour éviter de tomber.
Une maigre fille apparu, vêtu de haillons :
"- Idriss ! Hognor s'est réveillé, il faut que...tu... viennes, avait elle dit essoufflée par la fatigante course qu'elle avait entreprit depuis le village.
- Respire Mina, il ne cessera pas de la faire si tu reprend ton souffle, lui disais-je
- Oui..
Elle respira un bon coup et repris :
- Hognor s'est remit de ses blessures, il faut néanmoins changer ses bandages.
- Je te suis."
Le coeur lourd je revins à une autre réalité, celle de ma vie que je n'avais pas choisit mais que j'aimais.
Ma cabane se trouvant à quelques kilomètres, nous décidâmes de prendre les sentiers qui longeaient la forêt.

Nous parcourions le chemin dans le silence pour qui le regardait de l'extérieur mais pour ceux qui y participait le bruit inodible de nos réflexions prenaient toute la place.

Une fois arrivée, je vis le corps d'un blessé, Hogor, en train de saigner abondamment. J'entendis Mina crier, mais moi, je ne m'affolais nullement malgré la gravité de la situation, pas parce que je suis sans coeur, comme tout le monde se plait à le croire, mais parce que j'ai déjà vécue cela.
"- Il allait bien tout a l'heure, cria Mina
- Qu'a tu fait quand il s'est réveillé ?
- Rien, je suis venu te chercher directement
- Tu n'a pas vérifié si les points tenaient toujours ?
- J'ai oublié, me dit-elle honteuse.
- Eh bien tu ne risque pas d'oublier la prochaine fois."

Je voyais la peur de Mina grandir dans ses yeux. Mais je préférais la terroriser maintenant plutôt qu'elle ne refasse de bêtises qui pourraient être irrévocables la prochaine fois.

Heureusement pour elle, Hognor allait s'en sortir, il était fort et ce n'était pas cette blessure qui le tuerai. Mina n'était qu'une apprentie, elle était trop jeune pour causer la mort de quelqu'un et surtout pour l'accepter. Elle ne savait rien, pas encore, mais je lui avait promis de lui apprendre.

Je pris les bandelettes qui étaient dans une des nombreuses étagères de la pièce, je saisis également du rhum et une pincette.
La plaie s'était rouverte, il fallait de nouveau la recoudre :
"- Va me chercher une aiguille, du fil de soie, du coton et un des pansements, ordonnais-je à Mina."
Elle s'exécuta et me ramena tout ce dont j'avais besoin. Je nettoyais la blessure et recousue celle ci avant d'y placer un pansement.

Mes mains était toute tachées de sang mais cela n'était pas si grave, je les nettoierais quand j'en aurais la force. De toute manière a peine l'opération fut fini que j'entendis un frappement venant de la porte d'entrer.

Une voix criait, mais cette fois ci ce n'était pas celle de Mina, non, elle aurai pu, si elle avait été moins grave. J'ouvris la porte et aperçus une femme, utilisant toute sa force pour soulever un homme, ou plutôt un cadavre ambulant si j'avais correctement identifié ses blessures.

Elle parlait a une vitesse vertigineuse. Plus je regardais le pauvre garçon, plus je me demandais ce qui avait put causer ses blessures. Je voulais les faire entrer mais soudain je vis l'énorme bête qui les accompagnait je ne pus me résoudre à les faire pénétrer dans la chaumière :
"- Désolé je ne peux rien pour toi.
- Pourtant vous êtes la guérisseuse de ce village, et il nous faut un médecin.
- Comment sais-tu que je suis guérisseuse ?
- Peu importe, cet homme risque de mourir !
- En admettant qu'il n'ai pas déjà perdu la vie. Ses blessures ont l'air grave...Mais je ne suis pas dupe, dis-je en reculant. Seul un félin peut créer ce genre de plaies, et si je me fit aux plaies, c'est surement ton tigre qui l'a attaqué.
- C'était un accident ! protesta-t-elle
- S'il vous plait, et puis peut importe les causes, ce qui importante ce sont les conséquences, et celles-ci risquent de lui être fatal.
- Très bien, entrez, mais le tigre reste dehors, je ne voudrais pas qu'il prenne mes patients pour de la chaire à pâté.
- Il n'est pas comme ça !
- L'homme que tu tentes de sauver ne serait certainement pas d'accord avec toi", dis-je en jetant un oeil accusateur sur la bête puis en tournant mon regard vers le malheureux sanguinolent.

Je les laissai pénétrer dans le chalet et installa le malheureux sur une table, Mina avait allongé Hognor dans la pièce d'à côté, et était revenue.

Quand elle vit le pauvre garçon, elle se précipita pour nous aider a s'occuper de lui.
En hotant ses vêtements, je restais quelques secondes sans voix.

Partout sur son torse couraient de multiples cicatrices, certaines très mal cicatrisées, d'autre datant de plusieurs années en arrière.
La taille et la profondeur de ces marques laissaient supposer de nombreuses luttes acharnées. Mes mains frémirent.
Qui que soit cet homme, il devait mener une existence bien difficile.

Après avoir pensé ses blessures, je revins vers la jeune fille, qui s'était éclipsée peu de temps auparavant. Je la retrouva près du feu :
- Il va bien, lui dis-je
- Merci...
- Idriss.
- Merci Idriss. Je sais que cela paraissait étrange mais je n'ai jamais voulus de mal a cet homme, et mon tigre non plus, je le jure.
- Où est-il maintenant ?
- Je crois qu'il est a la lisière de la forêt, il doit m'attendre.

Son regard exprimait une tristesse et une lassitude sans borne. Je devinai qu'elle se sentait coupable des blessures de l'inconnu.
- Ce n'est pas ta faute tu sais.
- Peut-être bien, mais si je n'avais pas été là il serait en bonne santé.
- Ne t'en fait pas pour cela, il va bien... enfin mieux. Quel est son nom d'ailleurs ?
- Je n'en ai aucune idée, je n'ai pas vraiment eu l'occasion de lui demander, dit-elle en esquissant un sourire.
- D'où t'es-tu enfuie?
Elle me regarda avec surprise.
- Ta robe, elle est en soie mais elle est couverte de boue et elle commence a être trop étroite.
Ce qui veut dire que tu l'a eue jeune, lui expliquai-je. Aucune personne de basse extraction n'achète de vêtements en soie et encore moins à des enfants.
Tu doit donc être riche, noble probablement. Et une jeune fille noble ne se promène pas dans les bois seule à moins de s'être échappée de quelque part.
- C'est une longue histoire murmura-t-elle.
- Et bien, vu les blessures qu'il a, tu va devoir attendre longtemps avant de repartir.
J'ai toujours adoré les longues histoires, conclus-je.
Le regard perdu dans les flammes, elle débuta son histoire avec ces mots : "Il y a longtemps, très longtemps, dans un vaste royaume, débuta une légende, ma légende. La légende d'Eden...".

La Légende d'EdenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant