SUBSTANCE

SUBSTANCE - quatrième partie

16. Vit dangereusement

Tom sentit l'herbe qui avait attiré ses sens. Elle sentait fort. Il l'arracha. Un miellat vert suintait à la surface de ses racines. Il prit une goutte qu'il malaxa entre son index et son pouce. Il posa son doigt sur la langue. Il ressentait une indéfinissable sensation. Plutôt agréable. Soudain un bruit l'attira derrière lui. Les fourrés bougeaient encore, un petit animal avait dû s'enfuir. Il porta à nouveau le doigt à ses lèvres.

- Que goûtes-tu ?

Il sursauta. Latika se tenait quelques pas derrière lui.

- Tu m'as fait peur. J'ai cru que c'était un animal.

- Tu me confonds avec un animal maintenant, c'est charmant ! feignant d'être vexée. Mais si ça peut te rassurer j'ai bien croisé une boule de plumes et d'écailles qui m'est passée entre les jambes.

- Oui, tout est surprenant ici.

- Comme ce que tu as sur le doigt ?

- Oh ça, je ne sais pas ce que c'est. Ça ressemble un peu à ce que les outambas m'ont donné. Une espèce de médicament naturel je suppose. Mais c'est d'un autre goût.

- Si c'est un médicament, nous ne savons rien sur son principe actif, ni la dose efficace, ni les effets secondaires.

- Bah, tu vois le mal partout.

- Non, je vois tes analyses et elles me surprennent toujours. Tu sembles développer une réaction que personne de l'équipe ne montre. Les symptômes sont contradictoires. D'un côté tu parais retrouver autant de bourgeons gustatifs qu'un nourrisson, ta vue qui devrait baisser comme tout le monde dès l'âge de quinze ans semble s'améliorer, ton cerveau consomme autant de nutriments qu'un enfant, tes sens et ta perception s'accroissent. Et d'un autre côté ton cœur connait des ratés, tes articulations sont douloureuses et pour cause tu développes déjà de l'arthrose, vraiment inhabituel à ton âge.

- Tu vois bien que je suis en pleine forme. Tiens, goûte !

- Ça va pas !

- Ce n'est pas une petite goutte qui va te tuer. De toute façon la nature est bien faite. Loé me raconte que les substances nocives ont souvent un mauvais goût dissuasif.

- Oui, dans notre environnement naturel. Mais ici nous sommes des inconnus. Ce biotope nous est complètement étranger. Notre espèce n'a pas grandi ici, elle n'a donc pas pu développer d'interactions avec ce milieu.

- Oh, j'y comprends rien à ton charabia et puis de toute façon c'est bon, tiens j'en mange à nouveau. Vas-y, goûte !

Latika hésite, puis en prend un peu. Une grimace déforme immédiatement son beau visage.

- Et tu appelles ça bon !

- Ben oui ...

- Ça m'a brûlé la langue !

- Ah ? ... pas moi.

L'implant de Latika s'active.

- Ah oui, j'étais venu te chercher. Le commandant nous appelle. Tu dois écourter ta promenade matinale Monsieur le botaniste qui vit dangereusement.

17. Elle est notre priorité

Dans la cité hydramnisienne, deux individus discutent. Ils sont face à une paroi et parlent doucement. Comme si les deux hydramnisiens cherchaient à rester discret.