Chapitre 12 : Révélations

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Je me réveille avec un mal de crâne atroce. J'ai passé la soirée enfermé dans ma chambre à me demander ce que j'ai pu faire de mal. L'ai-je trop brusquée? Je ne sais pas... Lyla me rendait mes baisers avec autant de passion et je peux encore sentir ses mains s'agripper dans mon dos. J'ai retourné le problème dans tous les sens, mais je n'ai pas trouvé de réponses à mes questions. Pourquoi a-t-elle fui? Qu'est ce qui l'a mise dans un tel état? Pourquoi est-elle perdue? J'ai un désagréable pressentiment... Et si son cœur battait pour un autre?... Je soupire et me lève difficilement. J'attrape mon téléphone et constate que je n'ai aucun message d'elle... Je ne pouvais pas espérer mieux de toutes façons. J'hésite un instant à lui écrire, mais je me ravise et préfère lui laisser un peu de temps.

Je descend lourdement les escaliers et me dirige vers la cuisine.
- Woh... C'est quoi cette tête? Me demande mon père, l'air inquiet.
- J'ai mal au crâne. Je marmonne en me servant un verre d'eau.
- Ça va aller pour les répèt' aujourd'hui?
- Merde, j'y pensais plus...
Il me regarde un instant, comme pour m'analyser.
- Il n'y a rien d'autre?
- Non.
Je n'aime pas lui mentir mais je n'ai pas envie d'en parler pour le moment.
- Oh... Tu lui as dit !
- Non. J'ai pas eu le temps. Bon je monte me préparer.
Papa a compris que je souhaitais mettre fin à cette conversation et il n'insiste pas. Mais je sais qu'il m'en reparlera plus tard.

Après m'être rapidement douché et habillé, je prépare les vêtements de Jay que je fourre dans un sac en réfléchissant à la musique que je pourrais interpréter ce soir durant le direct à la radio. N'ayant pas trop d'idées, je lance ma playlist en mode aléatoire en espérant qu'une des musiques trouve grâce à mes oreilles malgré mon humeur maussade.
Finalement, deux morceaux me restent en tête : Lonely Day de System Of A Down et When You're Gone d'Avril Lavigne. Deux morceaux parfaitement en adéquation avec ce que je ressens aujourd'hui. J'en fais part à papa durant le trajet en voiture jusqu'au studio où nous avons l'habitude de répéter.
- Tu ne veux pas chanter l'une de tes musiques?
- Ça changerait un peu, je ne fais pas beaucoup de reprises.
- Comme tu veux. Musicalement, je partirais sur System Of A Down, mais Avril Lavigne parlera peut-être plus à tes fans. Tu les as sur toi?
Sans répondre, je branche mon téléphone à la voiture et les premières notes de Lonely Day envahissent l'habitacle.

- Les textes sont un peu moroses. Remarque mon père.
-Je n'ai pas trop envie de chanter autre chose aujourd'hui. Et puis, les auditeurs y verront une chanson d'amour, c'est ce qui leur plait.
- Les auditrices surtout.
- Oui.
Un silence assez pesant s'installe. Je remarque que mon père veut dire quelque chose, c'est pourquoi je lance à nouveau la musique que j'interprèterai ce soir, en faisant mine de l'écouter attentivement. Je n'ai pas envie de parler pour le moment.

L'interview a débuté depuis une dizaine de minutes. Je suis installé face à l'équipe de quatre animateurs de la radio qui me posent des questions sur mon « ascension fulgurante ». Je reste vigilant pour répondre à leurs questions parfois un peu trop personnelles. J'avoue que je suis un peu moins tourmenté en jouant le rôle de Jay. En effet, je dois me concentrer pour modifier le timbre de ma voix, adopter une posture faussement nonchalante et un regard séducteur.
- Ce soir Jay, vous avez décidé d'interpréter en direct dans notre studio une reprise de When You're Gone d'Avril Lavigne. C'est très étonnant de votre part, vous qui avez l'habitude de chanter vos textes. Pourquoi ce brusque changement?
- J'ai eu envie de bouleverser un peu mes habitudes, sortir de ma zone de confort. Et puis, je voulais faire surprendre mes fans.
- C'est une très belle musique, elle est destinée à quelqu'un en particulier?
- C'est possible.
- Une petite amie?
- C'est trop personnel pour que je puisse vous répondre.
- Allez Jay, nous sommes entre nous !
Le petit public présent dans le studio se met à crier pour me pousser à me dévoiler.
- Nous avons tous nos secrets.
- Que serait notre Jay sans autant de mystères ? Nous vous avons assez fait attendre cher public, il est l'heure maintenant de profiter de ce moment. Jay vous êtes prêt?
- Toujours !
- Alors c'est parti ! Mesdames, messieurs, ce soir en exclusivité sur Firgin Radio, il est là pour vous et rien que pour vous... Jay!
Les cris et les applaudissements s'élèvent tandis que je prends place derrière le micro près de mes musiciens. Nous entamons le morceau et tout autour de moi disparaît. Il n'y a plus que moi, la musique qui caresse mes oreilles et Lyla qui habite mon esprit. Certaines paroles résonnent au plus profond de moi, y trouvant une signification toute particulière.
I always needed time on my own
I never thought I'd need you there...

When you walk away
I count the steps that you take
Do you see how much I need you right now?...

When you're gone
The pieces of my heart are missing you...

I haven't felt this way before
Everything that I do
Reminds me of you...

Nous sommes rentrés très tard du studio et je n'ai pas eu de mal à trouver le sommeil cette fois tant j'étais épuisé. Ce matin, je me réveille résigné. Je n'ai pas eu de nouvelle de Lyla depuis son départ précipité dimanche et, en plus de m'inquiéter pour ce qu'il allait advenir de nous, je commence sérieusement à m'inquiéter pour elle. Nous avions l'habitude d'échanger très régulièrement depuis des semaines et son silence n'a rien d'habituel. Je saisis mon téléphone et commence à pianoter sur l'écran.
- Salut Lyla... J'espère que tu vas bien. Excuse-moi si j'ai pu te blesser dimanche. Ce n'était pas du tout mon intention... J'espère que tu ne m'en veux pas trop.
Ce message est bidon mais je ne sais pas trop quoi lui dire pour débuter la conversation. La réponse, à mon plus grand soulagement est quasi immédiate.
- J'aimerais qu'on parle.
Aïe... Ça veut dire quoi ça en langage de filles? Juste qu'elle aimerait qu'on parle? Ou ça sous-entend que je vais passer un sale quart d'heure?
- D'accord. Tu veux que je passe te chercher cet après-midi?
- Je viendrai en bus.
Ça s'annonce mal.
- Ok, vers 14h?
- Ok. A tout à l'heure Henri.
Je reste perplexe. Je sens dans ses messages que ça ne va pas. Pour éviter de trop ruminer, je range soigneusement les affaires de Jay dans le bureau de mon père et sors faire un footing.

Lyla arrive un peu avant 14:00 en s'excusant d'être arrivée plus tôt que prévu.
- C'est pas grave, ne t'en fais pas. Tu veux boire quelque chose ?
J'essaye tant bien que mal d'effacer la gêne qui grandit entre nous.
- Non merci. Nous sommes seuls?
Sa question me déstabilise.
- Mon père travaille dans son bureau, il ne devrait pas le quitter avant la fin de la journée. Tu préfère monter dans ma chambre? Ou nous pouvons sortir un peu, il n'y a personne dans les environs.
- Je préférerais aller dans ta chambre... Il commence à faire froid dehors.
J'ai envie de sourire face à son air embarrassé. Nous montons en silence. J'ouvre la porte et l'invite à entrer dans ma chambre. Elle se dirige vers la chaise de mon bureau et s'assoit, tandis que je prends place sur le bord de mon lit. Je suis étonné voire inquiet, car habituellement, Lyla s'assoit près de moi. Ça ne me dit rien qui vaille. Je commence à paniquer.
Lyla se racle la gorge et se lance.
- Je ne t'en veux pas pour ce qu'il s'est passé dimanche.
Elle s'arrête et regarde par la fenêtre, comme si elle y cherchait ses mots.
- Mais il faut qu'on parle.
- Je t'écoute.
Elle tourne la tête vers moi et se lève pour venir s'asseoir à mes côtés. Elle prend une grande inspiration et se lance.
- J'ai peur Henri.
Je fronce les sourcils, cherchant où elle veut en venir. Je remarque que ses yeux commencent à se remplir de larmes et que son menton tremble. Sans réfléchir, je prend sa main dans la mienne et l'encourage à continuer.
- De quoi as-tu peur?
- Comme tu le sais, je t'apprécie beaucoup et... Tu ne me laisses pas indifférente. Tu me plais vraiment Henri. Mais j'ai peur de tomber amoureuse de quelqu'un qui n'existe pas. J'essaye d'être prudente tant que je ne sais pas qui tu es vraiment, mais c'est trop tard je crois... Si ça se trouve, la personne que j'ai devant moi...
Sa voix déraille et elle n'arrive pas à terminer sa phrase. De grosses larmes roulent dans discontinuer de ses joues et des sanglots secouent ses épaules. Je la serre contre moi, totalement désarmé face à sa détresse. Détresse dont je suis responsable. Je suis furieux contre moi-même. Il est temps que je lui dise toute la vérité. Le cœur battant, je la serre plus fort contre moi et me lance d'une voix étonnamment calme comparé a la tempête d'émotions qui se déchaîne en moi.
- Tu dois déjà savoir une chose Lyla... C'est que je suis tombé amoureux de toi à l'instant où je t'ai vue, le soir de Noël pendant la tempête.
Elle se redresse brutalement lorsque je prononce ces mots.
- Quoi???

Le Secret d'Henri - L'inconnue du Café ObscurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant