Mutante - Tome 1

Chapitre 32-3 : Agir

OK. Là, je m'attendais à tout sauf à cette excuse. Mais elle était tout de même bien trouvée, je l'avouais. Je m'étais visiblement calmée depuis tout-à-l'heure. Et c'était grâce à l'intervention d'Ella, qui avait interrompue mes pensées les plus noires. 

J'ouvris doucement la porte, et Lucy se retourna. Je saluai Ella d'un hochement de tête, et invitai ma meilleure amie à rentrer. Lucy jeta un coup d'œil à Ella, d'un air « tu vois ! » et entra. Ella ne pipa mot, alors je refermai la porte et m'y adossai, les mains toujours sur la poignée. Lucy avança de quelques pas, s'immobilisa sans se retourner.

Aucune de nous deux ne parla pendant un long moment. J'imaginais que chacune attendait de savoir ce que l'autre voulait dire. Où alors, nous ne savions pas quoi dire toutes les deux. Néanmoins, c'était mon cas. Mais après mes quelques réflexions désastreuses, Lucy finit par se retourner pour me regarder. 

Elle ne devait lire sur mon visage qu'un désespoir immense, mélangé à de la peur. Alors son visage s'adoucit, et elle avança pour m'enlacer fortement, comme-ci elle avait peur que je disparaisse. Je ne bougeais pas. J'avais trop peur de laisser mes émotions s'emballer, et d'activer le fluide. J'en avais beaucoup trop peur. Lucy se mit à pleurer sur mon épaule. Je ne disais rien, toujours bloquée, figée.

– Je... je suis désolée, hésita-t-elle.

Un mot sortit de ma bouche, j'avais une voix désespérée et apeurée, mais surtout ironique.

– Pourquoi ?

– Pour ce qui t'arrive, ça ne devrait pas, enfin... je ne sais pas.

Elle soupira longuement.

– Tu comptes lâcher cette poignée où tu te maries avec elle ? tenta-t-elle avec humour, tout en reculant.

J'eus un petit sourire, et lâchai effectivement la poignée métallique. Je ne m'en étais pas rendue compte, mais je  m'y accrochais comme à une bouée de sauvetage.

– Lucy, je mutes.

Dire ces mots me fit réaliser encore plus ce qu'il se passait. Rien ne servait de le nier. J'en avais marre de tenter de le réfuter. Je mutais. Maintenant, il me fallait prendre des mesures. Quelles qu'elles soient.

– J'en ai bien l'impression, déclara Lucy qui ne me contredit pas, à ma grande surprise.

– Alors je dois mourir, dis-je fatalement.

J'étais fatiguée, je me sentais lourde, accablée par tout ce qu'il se passait.

– Tu ne dois pas mourir. Mais tu mourras. Tout le monde meurt un jour où l'autre.

– Lucy, contredis-je, tu sais bien que je ne parle pas de...

– Laisse-moi finir ! me coupa-t-elle en criant presque. Amy, tous les Mutants... ne sont pas méchants.

Je voyais qu'elle avait du mal à admettre cela, mais elle le fit quand même. Elle était en train de contredire ce qu'elle avait toujours cru, et ça l'ébranlait au plus haut point. Moi... je ne savais pas en quoi j'étais sensée croire.

– Certains ne chassent pas pour le plaisir, sont inoffensifs, continua-t-elle. Et tout le monde tue pour survivre, que ce soit en mangeant un steak ou quand tu marches en écrasant des fourmis.

– Lucy, s'il te plaît...

– Laisse-moi finir ! répéta-t-elle. C'est ce qu'on appelle la chaîne alimentaire. La loi de la nature. Et tu n'y fais pas exception. Sauf que tu n'es pas obligée de tuer tes semblables, ceux que tu aimes. Tu peux choisir. Et si ton instinct bestial prends le dessus, je t'assure... non, je te promets que je te tuerai moi-même !