Chapitre 37-1 : Regrets

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Je courais. Ma salle d'examen était tout au bout du couloir, il fallait que je me dépêche ! A mon plus grand bonheur, j'avais passé une nuit reposante, et m'étais réveillée en pleine forme ce matin. Mais non, je déconnais ! Ma nuit avait été plus que fatigante, je n'arrêtai pas de bouger. J'étais tombée de mon lit deux fois, vieille habitude. 

Et pour ne rien laisser de côté, je m'étais réveillée avec encore un foutu mal de crâne. J'étais à cran ? Non, ce n'était pas vrai. Tout le monde était stressé, on le sentait à des kilomètres. La joie des examens.

Je me frayais un chemin parmi les élèves qui, comme moi, cherchait désespérément leur salle. La mienne était la 34. Enfin, au bout d'un long calvaire, je trouvai mon Saint Graal. J'entrai dans la petite pièce, et m'installai sur l'un des trois sièges disposés devant le bureau. J'étais arrivée première ! Vu la catastrophe qu'avait été mon réveil, j'en fus soulagée. 

Les deux autres élèves qui passaient l'examen avec moi se trouvaient être Macha et Driss, de ma classe. Leurs noms étaient inscrits sur un écran derrière. Ce serait le test d'histoire, avec un professeur m'étant inconnu. Le premier examen, mon appréhension était à son paroxysme. Monsieur... Choi, je crois. Il m'inspectait de haut en bas avec un regard d'aigle, à travers ses lunettes. Le physique typique du professeur aigri.

Je m'impatientai, gigotant sur ma chaise. Au bout d'un temps interminable, les deux autres élèves de ma classe entrèrent, essoufflés. Choi ne fit aucun commentaire. Puis il nous expliqua une dernière fois les règles de l'examen.

– Je vous pose des questions, le premier à appuyer sur le bouton de votre accoudoir répond. Si cette personne répond correctement, c'est un point. Si l'un de vous arrive à rajouter, le point varie en fonction de la pertinence de la réponse. Pas de tricherie, évidemment. Si vous appuyez sur le bouton et que vous ne savez pas répondre, c'est trois points en moins.

Trois points ? C'était énorme. Sûrement pour que nous ne nous acharnions pas sur le bouton. Pour être sûr de sa réponse. Mais c'était aussi prendre des risques. Je soufflai un bon coup, tentant en vain de me calmer et de me concentrer.

– Commençons, annonça le professeur. Qui était le principal acteur dans la Révolte des Lumières en 1200 ?

Je bondis sur le bouton, mais Driss avait répondu avant moi.

– Gildas de Valvert, répondit le jeune homme en triturant ses dreads.

Choi hocha la tête, et j'appuyais sur le bouton à mon tour.

– Quelque chose à rajouter, mademoiselle Weyl ?

– Il était marié à Blanche de Montmirail, et a eu sept enfants : Eudes, Gildas, Astride, Viviane, Ursule, Anselme et...

J'eus un trou de mémoire, et ne me souvint plus du nom. Vite, retrouve-le ! m'intimais-je. Allez !

– Nerdanel, compléta Macha.

Choi inscrivit nos points, que nous ne connaissions pas. J'espérais quand même en avoir obtenu avec tous les noms que j'avais cité.

– L'événement qui s'est déroulé en 1548 ?

– Prise d'Aden, répondis-je la première.

Les questions continuèrent comme cela, et j'avais la main qui tremblait. Je jouais ma vie, enfin une partie du diplôme qui allait jouer sur ma vie. Nous étions à peu près à égalité au niveau des premières réponses avec mes deux compagnons. Mais nous ignorions les points attribués aux compléments, donc nous ne pouvions pas vraiment nous situer. 

L'examen dura environ une heure, pendant laquelle nous gigotions sans cesse. C'était limite si nous n'étions pas prêts à sauter sur Choi pour répondre.

Enfin, quand la sonnerie retentit, l'examen se termina. Les questions dépendaient aussi de la vitesse à laquelle nous répondions. Et donc, plus nous répondions vite, plus nous avions de questions et de points. Je me levai du siège, et sortis de la pièce. Bon, prochain examen, sur les Mutants. Là encore je dus me dépêcher sur le chemin pour trouver ma salle. Ce fut Sawada qui nous passa l'examen. Je connaissais mieux sa façon de faire, et me sentit plus à l'aise. L'examen dura cette fois-ci deux heures.

Enfin, après ces moments de torture, nous avions une pause de deux heures. Je me dirigeais vers la Cantine, pour donner ce que réclamait mon estomac. Je cherchai mes amis des yeux, et je trouvai Ella et Lucy en pleine conversation. Jay et Hekiah n'étaient pas loin, Zéphyr s'appuyait contre un mur, complètement à l'écart. Ce fut vers lui que je me dirigeais.

– Que se passe-t-il ? demandai-je au rouquin.

Il regardait Ella avec une méfiance ostentatoire.

– Ella et Lucy s'expliquent sur quelque chose. Ella a dit que tu avais dit quelque chose aux garçons ?

Je pu lire dans son regard qu'il voulait savoir ce que j'avais dit sur lui. Il avait l'air en colère contre moi. Je me souvins des mots, et lui réexpliquai ce que j'avais dit.

– J'ai dit que tu cherchais des réponses à propos de quelque chose de semblable qu'il m'ait arrivé. Je n'ai rien dit sur ce qu'il m'est arrivé.

Je vis les traits du visage de mon ami se détendre, il parut rassuré. Je lui avais promis de ne rien révéler sur lui, et ce doute me prouvait qu'il n'avait pas totalement confiance en mes propos. J'avais beau en être légèrement vexée, cela se comprenait parfaitement.

– Plus vague tu meurs ! s'esclaffa ouvertement mon ami, quelque chose de plutôt rare chez lui.

Sûrement dû au stress.

– Du coup, tu m'expliques ? Pourquoi avoir tenté de leur décrire la situation ?

– En fait...

Je lui expliquais rapidement que j'avais eu besoin de Hekiah, mais sans dire comment, pour que j'accède aux Livre D en Scriatés. Zéphyr arqua un sourcil, surpris et perplexe.

– Tu ne leur aurais pas dit sans cette raison, non ? fit-il avec un certain sarcasme.

Je ne répondis pas. Mon visage exprimait bien ce que je ressentais. Oui, j'avais sûrement utilisé mes amis. Enfin... s'ils l'étaient toujours. Je savais que ce n'était pas bien, mais avais-je d'autres choix ? Pour atteindre mon but, je devrais sûrement sacrifier quelques choses, passer par des méthodes pas vraiment honorables. 

La fin justifie les moyens. Cette expression, je l'avais toujours trouvée idiote. Rien ne peut justifier certains actes. 

J'eus un pincement au cœur, je ne me reconnaissais pas. Étais-je vraiment manipulatrice comme ça ? Le genre prête à tout pour parvenir à ses fins ? Là encore ce n'était pas trop grave, mais si cela devenait plus grand, dans des circonstances plus aggravantes... Je me mordis la lèvre. Je n'étais pas attachée à ces valeurs, comment aurais-je du faire alors ?

Mutante - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant