CHAPITRE 10
Un nuage voila le soleil d'automne. La luminosité s'obscurcit momentanément avant de reprendre son éclat quelques instants plus tard. Une bourrasque fit flotter la robe de Viviane qui marchait dans le parc. Les arbres perdaient petit à petit leur feuillage cramoisi qui venait périr sur le sol gelé. La jeune fille suivait des yeux la danse mortelle des feuilles ballotées par le vent, l'humeur mélancolique et songeuse.
Cela faisait une semaine qui l'agression avait eu lieu, et la vie avait repris son cours au domaine Dampierre, ponctuée par quelques visites de courtoisies, dont celle d'Olympe qui était venue s'enquérir de la santé de son amie. Cette dernière se remettait doucement. Le Comte de Dampierre se tenait au courant de l'avancée des recherches, mais malheureusement les fugitifs étaient toujours en cavale et semblaient vouloir rejoindre le port de La Rochelle. Leur but était sans doute d'embarquer pour rejoindre le Nouveau Monde et commencer une nouvelle vie dans les colonies françaises.
« Viviane ! »
La jeune fille se retourna. Sophie se dirigeait vers elle, ses jupons au vent et un grand sourire aux lèvres.
« Qu'il y a-t-il ?
-Nous recevons une visite aujourd'hui, pour le thé !
-Une visite ? »
Sa sœur s'arrêta à sa hauteur et prit une grande inspiration. Ses yeux bleus pétillaient.
« Tu ne devines pas ?
-Je devrais ? demanda Viviane, étonnée. »
Elle ne voyait pas qui pourrait venir les voir. Olympe était passée hier, et les amis de Madame la Comtesse n'arrivaient que plus tard, la semaine prochaine pour séjourner quelques jours au domaine, ce qui au passage n'enchantait guère la jeune fille.
Sophie leva les yeux au ciel et attrapa vivement les mains de la jeune fille.
« Tu es incorrigible. Une certaine personne a appris ta mésaventure et tient, avec empressement, à venir prendre de tes nouvelles. Père a reçu une lettre tout à l'heure, j'étais avec lui dans la bibliothèque et il m'a fait part de son arrivée. »
Elle faisait durer le suspense avec une certaine malice, voyant Viviane s'impatienter.
« Vas-tu me dire de qui il s'agit ou faut-il que j'aille quérir cette information auprès de Père ?
-Henri de Valiers tient personnellement à s'assurer de ta bonne santé ! lâcha finalement Sophie. »
La surprise peigna sur le visage de la rouquine un masque d'incompréhension.
« Mais pourquoi ?
-Il remonte de Bordeaux en ce moment même. Il arrivera pour l'heure du thé.
-C'est bien gentil de sa part mais pourquoi vient-il ?
-Es-tu sérieuse ? Tu me dis aveugle mais tu souffres également de cécité darling ! »
Viviane ne sut que répondre et fronça les sourcils. La dernière visite du jeune homme avait été brève. Ils avaient fait une sorte de trêve. Mais ils ne s'étaient parlés que deux fois, le voir agir de la sorte rendait la jeune fille perplexe. Sophie entraina Viviane dans sa suite et les deux sœurs dirigèrent leurs pas vers le domaine.
« Cette lettre nous donne une avance de deux heures environ. Il faut que tu te changes, je vais faire sonner Agnès. »
Viviane se laissa faire, les pensées ailleurs. Elle venait d'apercevoir Thibault sortir des écuries et le jeune homme avançait vers elles. Ses cheveux de jais étaient toujours retenus en arrière, dévoilant une mâchoire carrée. Quelques mèches venaient se perdre devant son regard azur, aussi limpide qu'une source d'eau un jour d'été.
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Dampierre
Historical FictionViviane vit une existence ordinaire dans la propriété de son père, le Comte de Dampierre. Écrasée par les réprimandes de sa mère qui ne tolère pas son manque de raffinement et qui ne cesse de la comparer à sa sœur, la belle Sophie, la jeune fille re...