Chapitre 35 Ancienne Version

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Nous avons pris beaucoup de temps pour guérir. Après un mois et quelques, nous étions sur pieds. Lentement, nous avons repris un rythme normal. Travail, maison. Le père d'Émilien est parti un peu après notre rétablissement. Il avait des occupations qu'il ne pouvait pas se permettre de louper. Il est retourné en Amérique. Souvent, au moins trois fois par mois, il vient nous rendre une petite visite.

Il y a un mois, j'ai officiellement emménagé chez Émilien. J'ai rendu l'appartement sans aucun regret. J'avais juste peur du changement. Je dois avouer que maintenant, je suis parfaitement à l'aise chez lui. Ce n'était pas forcément le cas au début. Je cherchais encore un peu ma place et me sentais plus comme une invitée. Maintenant, je l'aide en cuisine, je passe aussi la tondeuse dans le jardin. J'aime bien, car ça me décontracte.

Aujourd'hui est le jour de sa rencontre avec Anaëlle. Il n'a jamais osé aller sur sa tombe. D'ailleurs, je n'ai pas encore eu le courage d'aller sur celle de mon – connard – de frère. Ce n'est probablement pas une bonne idée. Je risque de vouloir me venger. Cela est inutile. Il est mort. Abîmer sa tombe ne servirait à rien à part me faire du bien quelques heures. Après je risque de le regretter. Surtout que le vandalisme est punissable par la loi. Il est hors de question que j'aille en prison à cause de cet enfoiré, surtout qu'Émilien est libre.

Ce dernier a été rejugé. Il doit porter un traceur à la cheville à la place d'être en prison. Il a un périmètre à respecter. Il est arrivé une fois qu'il prévient un jour avant qu'il dépasse le périmètre. C'était pour aller un week-end tous les deux à la mer. Nous étions allés à Montpellier pour profiter du temps.

Nous nous préparons à sortir. Madeleine va rester ici. Nous ne devrions pas en avoir pour longtemps. Sans un mot, nous quittons la maison et gagnons sa voiture qu'il a pu récupérer.

Depuis que nous remarchons, je n'ai jamais été autant debout. Je bouge, marche, cours, sautille. Et ça fait du bien. Je me sens revivre. Le cauchemar est enfin terminé. Je n'arrive pas encore à y croire. C'est comme si tout au fond, je me dis qu'on n'a pas fini avec cette histoire. Pourtant, Louis est mort. Léxandre a bénéficié de l'avocat d'Émilien pour ne pas qu'il aille en prison pour le dernier vol que lui et la bande ont fait. Il a rendu l'argent à la banque et depuis, il a repris sa petite vie tranquille. Je ne vois pas du tout ce qui pourrait arriver.

Émilien s'arrête chez un fleuriste. Il prend un beau bouquet. Il redémarre le véhicule pour nous conduire au cimetière. Je vais probablement passer devant la tombe de Louis, mais hors de question de lui mettre ne serait ce qu'une seule fleure.

Sa main se pose sur ma cuisse nue. Je porte un short et un tee-shirt rouge qui met mon bronzage en valeur. Nous sommes à la fin du mois de juillet. J'ose montrer mes cuisses et mes bras, maintenant qu'il n'y a plus de marques. J'avais bien essayé de rester emmitouflée dans des hauts à manche longue. Émilien a fini par me dire que j'étais folle de me cacher. Bon, en plus il faisait très chaud.

Il reste droit et observe attentivement la route. Je ne le lâche pas des yeux et le détaille entièrement. Il est magnifique. Il a un sourire au coin des lèvres.

— J'ai très hâte de rentrer à la maison, susurre-t-il. Pas toi ?

Alors que je vais pour répondre, sa main remonte lentement. Je ferme les cuisses par réflexe avant de me décontracter et les rouvrir. Cela me fait plus des chatouilles qu'autre chose.

— Moi aussi, lui réponds-je. Mais concentre-toi sur la route. Tu vas nous faire avoir un accident.

Ses lèvres se pincent. Il retire sa main pour changer de vitesse.

— Tu ne veux pas qu'on rentre ? me demande-t-il.

Je secoue la tête en refusant. Je sais que ça peut être pénible, mais j'ai l'impression qu'il a besoin d'aller sur sa tombe pour passer à autre chose... pour se consacrer pleinement à moi jusqu'à la fin. Peut-être est-ce même pour ça qu'il n'ose plus reparler de sa demande ?

Émilien Weits - Tome 1 EmpriseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant