Chapitre quatre

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Chapitre quatre : « Oh, oui, bien sûr. J'aurais dû laisser le venin de drakaina faire son effet, histoire que tu te retrouves au milieu des champs d'asphodèle, ce qui, bien entendu, est ton plus grand rêve. N'hésite pas à me le rappeler, la prochaine fois. »

Date précise inconnue,

Année 1981,

Etat du Texas,

Aux environs de onze heures du matin.

« Et moi je vous répète que vous n'irez pas ! »

Accompagné d'un bruit sourd, le poing de Cole Jones s'abattit violemment sur la table, faisant sursauter les deux adolescents. Ce matin-là, comme tous les matins depuis une dizaine de jours déjà, Ambre et Matthew n'avaient cessé de harceler leur père à propos d'une éventuelle sortie prévue pendant le week-end et comme tous les matins, celui-ci continuait de refuser.

« Mais tous nos amis seront là-bas, papa !, protesta Matthew alors qu'Ambre acquiesçait d'un signe de tête. C'est la dernière soirée de l'année ! C'est très important pour nous ! »

« Et il est très important pour moi, jeune homme, que ta sœur et toi m'aidiez aux champs. Une canicule est annoncée pour dans trois jours. Les céréales doivent donc être récoltés d'ici-là. Il en va de nos finances. »

« Mais c'est une soirée, papa !, s'exclama Ambre. Et on ne récolte jamais les blés après dix-huit heures ! »

Cole Jones, qui s'était retourné pour se servir du café, s'immobilisa quelques secondes à l'entente de ces protestations. Puis, se tournant de nouveau vers ses interlocuteurs, il toisa Ambre d'un regard noir et murmura, les dents serrées :

« Eh bien, figurez-vous que je refuse simplement que ma fille aille se fourrer entre les bras de jeunes imbéciles qui ne pensent qu'à utiliser leur outil. Je refuse que tu ailles jouer les traînées, Ambre. »

« Mais ... »

Le reste de la sentence resta coincée dans la gorge de la jeune fille. Est-ce réellement ainsi que son père la percevait ? Comme une jeune fille qui ne se respectait pas et allait flirter avec les premiers venus ? Cette révélation lui fit l'effet d'une énorme gifle et le cœur meurtri, la jeune fille baissa la tête, les larmes aux yeux.

Il s'agissait simplement d'une soirée entre amis, avec un groupe essentiellement composé de filles. Ambre avait prévu de s'y amuser, d'y rire jusqu'à en avoir mal au ventre et non pas d'y perdre sa virginité, comme son père semblait le penser.

Matthew s'apprêtait d'ailleurs à en faire la remarque lorsque son père le devança, plus sombre que jamais :

« Votre mère m'a fait le même coup. »

D'un geste qui trahissait sa rage, Cole jeta un sucre dans son café, si brusquement que des gouttes noires tombèrent sur le sol.

« Elle m'avait dit qu'elle sortait avec ses amis., reprit l'homme d'une quarantaine d'années tandis qu'Ambre et Matthew se rapprochaient imperceptiblement l'un de l'autre, de plus en plus inquiets. Elle m'avait dit que ce n'étaient que des amis. Résultat, elle a eu un gosse avec l'un d'eux. Et elle m'a laissé avec vous deux sur les bras. Comme-ci je n'avais que ça à faire, que de m'occuper de deux morveux fainéants ! »

Cole avait hurlé la dernière phrase. Sa tasse de café, qu'il tenait alors dans l'une de ses mains, se brisa sur le sol avec un bruit qui fit se crisper Ambre et Matthew. Cela n'était pas la première fois que leur père leur contait cette histoire. Les jumeaux l'avaient déjà entendu un bon nombre de fois, et à chaque fois qu'il la racontait, Cole finissait toujours dans le même état : une colère immense le submergeait, colère qu'il ne pouvait évacuer qu'en cognant, encore et encore.

Par Zeus !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant