Chapitre 43

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Quand chacun repart de son côté réviser une chorée, relire des paroles en chantonnant tout bas ou simplement se reposer, je sens que toute mon anxiété revient en moi. Quatre heures. Bon, respire Charlie, tout va bien. Tu vas gérer, tu t'es tellement entraînée que tu pourrais faire cette chorée même sans musique et les yeux fermés, alors tu vas réussir.

Et puis au bout de vingt secondes tu commenceras à te poser des questions, à réfléchir et à te demander si tu es assez douée. À la vingt-deuxième seconde, tu sentiras un boule prendre forme dans ton estomac, la peur, et elle te fera croire que tu ne vaux rien, alors trois secondes plus tard, tu rejoueras ton passage sur scène dans ta tête pour essayer de voir si tu as fait une faute, et c'est exactement à ce moment là, à la vingt-cinquième seconde, quand tu seras déconcentrée, que tu vas lamentablement te ridiculiser, attirant sur toi les regard, les rires et la honte.

Sans blague faudrait que ma conscience pense à fermer sa gueule parfois...

Pense à autre chose, Charlie, pense à autre chose, arrête de regarder cette foutue horloge. Pourquoi est-ce que j'ai l'impression qu'une minute passe horriblement lentement et qu'en même temps, on arrive beaucoup trop vite au moment fatidique du concert ? Pourquoi est-ce que cette boule qui grossit en moi me donne envie d'aller vomir ?

Merde, pourquoi est-ce que je ne peux pas avoir un peu plus confiance en moi ! Je tremble comme une vulgaire feuille morte maltraitée par le vent, c'est absolument ridicule !

Je sais ! Il faut que je répète pour me convaincre que je vais y arriver ! Aussitôt pensé, aussitôt fait : dans un coin de la pièce je fais ma chorée, encore et encore, pendant plus d'une demi-heure, soufflant entre mes lèvres mes paroles. Oui, voilà, pas une faute, pas un oubli, comme si c'était un réflexe ! Parfait !

Le manager me coupe dans mon élan quand il arrive avec plusieurs membres du staff et nous demande de venir nous habiller. Nous nous rendons dans une salle équipée de plusieurs paravents et d'un large choix de tenue. Ce soir en revanche, aucune chance qu'on accepte que je change les plans à la dernière minute : tout a été prévu et il n'y a aucun vêtement supplémentaire. Par chance, quand je découvre les tenues que nous porterons pour ma chanson, je suis soulagée : des vêtements sobres et tous accordés. Nous porterons tous la même tenue ou presque : un t-shirt très léger bleu pâle avec quelques motifs noirs assez discrets, par-dessus lequel les garçons auront une veste bleue foncée qui les mettra en valeur tandis que moi je n'en porterai pas, pour me distinguer du groupe. Nous serons aussi vêtus d'un slim noir fait d'une matière que le fait de danser n'abimera pas et pour finir, nous aurons tous des baskets de ville en cuir bleu foncé et noir. Pour ce qui est des accessoires, on me donne une lentille noire ainsi que la chaînette avec un cœur que Taehyung m'avait trouvée pour tourner le clip. Les garçons, eux, ont différents accessoires que je ne m'embêterai pas à lister : bagues, bracelets, colliers, boucles d'oreille et piercing, il y a un peu de tout.

Pour lors, il n'y a que moi qui suis habillée de cette façon : puisque ma chanson est la dernière, le groupe s'habille différemment pour l'instant. Ils sont beaucoup plus classes, c'est impressionnant.

Je me change rapidement et félicite l'équipe car ces vêtements me vont vraiment bien (je suspecte le manager d'avoir demandé de nous faire porter des t-shirt relativement longs pour cacher mes formes...). Je leur suis reconnaissante de ne pas avoir essayé de me transformer en ce que je ne suis pas, je ne sais pas si je l'aurais bien pris, d'autant plus que depuis quelques heures, je suis un peu sur les nerfs, et je pense que voir une tenue aussi ridicule que l'autre fois m'aurait fait craquer de nouveau.

En revenant dans notre salle commune, je me dirige vers un miroir pour mettre me lentille. C'est drôle de me voir avec des yeux vairon, ça donne un côté... je ne sais pas, mais j'aime bien. Je me regarde pendant quelques secondes : entre le maquillage, la coiffure, les lentilles et les habits, je me reconnais à peine. Charlie, où es-tu ? Cachée sous cette apparence d'idole, tout simplement. C'est dingue, je ne pensais pas qu'on pouvait artificiellement changer à ce point l'apparence d'une personne. Sans rire, si un garçon tombait amoureux de moi en me voyant comme ça, il faudrait que je le prévienne qu'il y a pub mensongère, je suis largement moins jolie au naturel.

SongwriterOù les histoires vivent. Découvrez maintenant