Dans la nuit du Samedi 7 au Dimanche 8 juillet 2018

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Je rebouche mon stylo, et contemple mes œuvres, fière de moi. Ces lettres sont parfaites !

À mes grands-parents, j'explique la raison de mon départ : les mêmes que les leurs, il y a vingt ans. Je veux découvrir le monde en toute liberté et profiter de ma jeunesse avec une de personnes que j'aime le plus au monde : ma meilleure amie Angèle. Je sais qu'ils vont me comprendre. Ils vont aussi être surpris, c'est certain ! Ce comportement, ce n'est tellement pas moi...
Je leur ai aussi demandé de mentir à Maman dimanche et de lui dire qu'on est parti faire les soldes au centre commercial avec Angèle et de garder mon secret pendant au moins deux jours.

A ma mère, je commence par m'excuser de la mettre devant le fait accompli - car j'ai prévu de poster la lettre demain, elle ne la recevra donc que mardi ou mercredi et je serai, j'espère, déjà loin...
J'essaie de la rassurer tant que je peux sur l'utilité et surtout le besoin que je ressent de faire ce voyage : profiter de ma liberté pour me lancer en Médecine dans les meilleures conditions possibles et vivre mon rêve d'un été parfait avec Angèle avant que nos chemins se séparent dans des études et des carrières bien différentes.
Je ne cherche pas à la convaincre, parce que je sais que je n'y arriverai pas ! Elle va être très en colère quoi que je dise... Mais au moins, je suis heureuse de lui avoir dit ce que j'avais sur le coeur.

Je glisse chacune des lettres dans leurs enveloppes respectives et dépose la première en évidence sur mon lit tandis que je range la deuxième dans mon sac à dos. J'envoie un sms à Angèle pour lui donner le top départ : rendez-vous dans 5 minutes devant le van. En me dirigeant vers la porte sur la pointe des pieds, je jette un dernier coup d'œil autour de moi : s'il me manque quelque chose, c'est maintenant ou jamais.
Arrivée sur le seuil de ma chambre, je souffle un bon coup, m'empare de mes valises puis éteint les lumières.


Dès que je vois sa silhouette approcher, je trépigne sur place les bras écartés : j'ai tellement hâte de serrer Angèle dans mes bras ! Bien qu'on habite toutes les deux à Paris, maintenant, on ne s'est pas vu depuis des mois !
- Qu'est-ce que je suis heureuse de te voir, ma poulette ! elle me chuchote dans l'oreille en rigolant.

On ouvre un des battants arrière du van - qui nous semblait plus silencieux que la porte coulissante - et on dépose nos affaires sous le lit. On grimpe en voiture et on ferme nos portières le plus silencieusement possible. Je met le contact, allume le moteur et regarde Angèle :
- C'est parti, plus de retour en arrière possible, ma cocotte !

Je passe la première et me dirige vers le portail. Juste avant de m'engager dans la rue, je jette un coup d'œil machinal dans le rétroviseur central et... Je bloque.
- Quoi qu'est-ce qu'il y a ? me demande ma meilleure amie. Eva... Tu as changé d'avis, c'est ça ?
- Oh euh... Non non, je répond en secouant la tête. C'est juste que ...
Elle suit mon regard vers le rétroviseur et se retourne pour voir ce que j'aperçois : mes grand-parents, bras dessus bras dessous, en ombre chinoise à la fenêtre de leur chambre et qui nous font des grands signes d'au revoir.
Angèle éclate de rire et me sourit. On passe chacune notre bras par la fenêtre et on les saluent à notre tour.

Rassurée d'avoir le plein soutien de mes deux petits vieux préférés, je redémarre. Après quelques minutes de route, on s'engage sur l'autoroute.

- Alors, s'exclame Angèle en sortant une énorme pile de cartes routière de plein de pays différents de son sac, on va où ?
- Aucune idée... Tu choisis !
- On va tirer au sort.
Elle dépose toutes les cartes sur ses genoux et ferme les yeux. Elle passe plusieurs fois sa main au dessus du tas...
- Celle là ! elle rouvre le yeux et me sourit. Direction : le soleil d'Espagne !

MarcelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant