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Je me réveille difficilement après la nuit chaotique que j'ai passée. J'inspire longuement et me passe une main sur le visage. Je me frotte légèrement les yeux qui sont à moitié collés à cause des nombreux joints que je me suis enfilés hier.

Au bout de quelques minutes j'arrive à m'extirper de mon lit, non sans grogner de devoir laisser ma couette bien chaude. Les tremblements de ma main que je ne connais que trop bien recommencent. Je me poste au balcon dans ma chambre et pose un plaid sur mes épaules. Plus les secondes passent plus les tremblements s'accentuent et c'est avec une grande difficulté que j'arrive à sortir une cigarette de mon paquet et à l'allumer. J'inspire une longue taffe et les tremblements cessent presque aussitôt.

Quand la porte claque a cause du vent me donnant l'impression d'être enfermée sur le balcon, les voix de mes parents commencent à résonner dans ma tête en me hurlant que je vais y retourner, que ça me calmera. Je sens ma respiration s'accélérer. J'essaye de me calmer mais ça et le manque de nicotine et je dérape. Je m'assieds en tailleur sur le béton froid et ma respiration se fait de plus en plus saccadée. J'arrive à ouvrir la porte avec le plat de ma main mais rien n'y fais. Les voix résonnent de plus en plus fort. Je suis terrifiée, je ne veux pas retourner là-bas. Pas encore. Bientôt les larmes dues au manque d'oxygène me montent aux yeux et je dois taper sur le sol de rage pour me forcer à respirer.

Je vais mourir, je le sens, ma gorge me brûle, je n'arrive plus à rien. Ma vision se floute. Mon sang tape dans mes tempes et les voix sont si fortes on dirait qu'elles hurlent tout près de mon oreille. Ma respiration est sifflante et j'essaye d'hurler, en vain. Je rentre dans ma chambre en rampant et trouve mes écouteurs par terre, pas loin du balcon, je sais que je les ai posés là hier. Machinalement je lance ma musique, le son à fond et je me force à réciter les paroles que je connais par coeur maintenant. Petit à petit, les voix se taisent. Ma cage thoracique se décontracte et je peux inspirer normalement. Il me faut quelques minutes avec la musique à fond pour réussir à me calmer, mais j'arrive à finir ma clope et à souffler un bon coup.

Je sais ce qu'ont dit les psys et les médecins. Que je ne devais pas vivre seule parce que mes crises d'angoisses sont trop violentes. Je sais qu'à chacune d'entre elle je peux mourir asphyxiée parce que ma volonté de vivre est moins forte que ma volonté de cesser d'être terrifiée. J'ai déjà fait le test, je suis déjà morte. 87 secondes exactement. Il suffirait que je me recroqueville sur moi même pour que ma respiration devienne de plus en plus rare et que je tombe comme une mouche. C'est étrange de savoir que l'on peut mourir à chaque instant, de peur. Si je venais à mourir, je mourrais tétanisée, complètement terrifiée et je ne souhaite cela à personne.

J'essuie mes larmes rageusement, je m'en veux de paraître si faible. Je me lève et part immédiatement prendre une douche glaciale. Une fois chose faite je fouille dans mes cartons toujours pas déballés de la veille et j'enfile un jean et un tee shirt trop grand pour moi que j'ai volé à mon frère. Je ne sèche pas mes cheveux et les laisse retomber en cascade sur mes épaules. Ma chambre est bien terne. Aucune couleur, aucun poster, aucune photo, juste un matelas par terre parce que j'ai eu la flemme de monter mon lit et des murs blancs. Je souffle en voyant la masse de choses énormes auxquelles je dois m'attaquer.

Je soupire et m'attache les cheveux. Je sens que je vais avoir besoin d'aide mais je ne peux pas demander à Adèle, elle n'est pas assez musclée puis avec le bébé et son travail. Je ne veux pas la fatiguer encore plus. Je m'assois sur un carton et souffle. J'attends qu'une solution s'offre à moi quand soudain j'entends des bruits de dingue dans l'appart en dessous. Des bruits de claquements de partout, des gros boums, et de la musique, à m'en faire exploser la cervelle. Le bruit me tapais déjà sur le système mais quand je vis que le grabuge durait déjà depuis 20 minutes je me décidais enfin à descendre.

Je sors de mon appart sans refermer derrière moi et descends à l'appart du dessous. La musique est tellement forte qu'ils ne doivent pas m'entendre toquer à m'écorcher les phalanges. Ils passent du rap bobo riche qui me fait sourire. J'essaye d'ouvrir la porte qui est finalement déverrouillée. J'entre sans ménagement et je me retrouve face à un barbu brun, basané. Les cheveux rasés. Quelques secondes après la musique se coupe et je me retrouve face à 4 mecs qui me dévisagent. Un autre mec que celui face à moi prend la parole.

- Ouais ? m'agresse-t-il

Il est grand brun avec des reflets poivrés, mais il ne parait pas vieux. Il est un peu barbu. Il a un air dur et froid. Ses yeux bruns me dévisagent. Il parait vraiment désagréable.

- Hem désolé. C'était ouvert et vous entendiez pas que je frappais. dis-je. J'ai juste entendu beaucoup de bruit et de musique et je demandais si vous pouviez baisser juste un peu, j'habite juste au dessus et ça résonne vraiment beaucoup dans mon appart.

Leurs mines semblent se détendre et il y en a même un qui me sourit. Mais le mec aux cheveux un peu longs et grisonnants de tout à l'heure me répond sur le même ton.

- On est à une heure où on peut faire du bruit. Maintenant la porte c'est derrière. aboie-t-il

- Eh gars c'est ni le moment ni l'heure, je viens de me taper un réveil de merde, je viens d'emménager et j'dois me taper des meubles d'une tonne toute seule alors j'suis venue vous dire gentiment de baisser votre musique de merde, pas de l'éteindre donc commence pas à casser les couilles. répondis-je

Il sembla étonné du ton excédé que j'ai employé et une lueur amusée brilla dans ses yeux. Il se moquait de moi. Je commençais à me retourner pour sortir avant de sentir une main m'attraper le coude. C'est le basané du début.

- Je m'appelle Hakim. T'as besoin d'aide ? me demanda-t-il. Je veux dire pour le déménagement.

Je réfléchissais avant d'acquiescer. Un coup de main me serait bien utile. Les mecs nous suivirent bien que je pensais que Hakim serait le seul. Une fois montés à mon appart, j'entrais la dernière en laissant la porte ouverte, comme toujours. Les gars se présentèrent comme étant : Hakim donc, le barbu du début, Idriss, le frère d'Hakim, Théo, brun aux cheveux un peu longs et le dernier fut présenté par Idriss, Deen. Le pitbull froid. Et relou.

En a peine 3 heures et 7 pauses clopes, les meubles étaient montés et je proposais de payer un coup aux mecs pour les remercier. Ils acceptèrent tous mais malheureusement je n'avais absolument rien à boire à cause du déménagement, mon frigo était vide. Je sortais alors ma boîte à joints avec le nécessaire pour rouler et leur montrais et ils semblèrent absolument tous enchantés. Deen grogna qu'il descendait acheter quelque chose à boire.

Il sortit de l'appartement et claqua la porte derrière lui, assez fort. Je réagis instinctivement. Ma respiration s'accéléra, j'entendais dans ma tête le bruit des 3 verrous de mon enfance. J'attendais qu'il arrive, mais rien n'y fit. Ma respiration se bloqua tout de même et l'air commença à me manquer. Encore une de ces putains de crises d'angoisse. Quand Théo me demanda si ça allait j'arrivais à murmurer :

- Ouvre la porte.

OUVRE LA PORTEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant