Scyllia tome 3: Eliar

Chapitre 12

L'établissement étant presque totalement vide, Scyllia eut un mal fou à trouver le bureau du directeur. Au moins, cette errance dans les couloirs lui avait permise de comprendre un peu mieux comment était agencée l'académie. Pendant ce laps de temps, Shed tenta, contre toute attente, de convaincre son hôte que cette situation n'était pas plus mal. Son argument principal était que, de toute façon, elle ne pouvait pas utiliser de sort rouge et que ne pas avoir à en faire leur permettrait sans doute de garder leur couverture intacte.

Malgré tout, l'adolescente était remontée et ne comptait pas se laisser faire. Ça n'était pas que pour elle, mais aussi pour les autres filles de sa classe. Depuis qu'elle avait absorbé la source des dragons, Scyllia était capable de ressentir l'âme des personnes qui l'entouraient si elle se concentrait assez. Dans sa classe, plus d'un tiers des élèves avaient une âme rouge. Leur faire suivre un tel cursus était tout simplement du gâchis.

À force de ruminer ainsi et de débattre avec Shed, la prétendante était encore plus énervée en arrivant devant la porte du directeur. Avec conviction, elle toqua dans le bois massif et attendit une réponse de l'intérieur.

— Entrez ! entendit-elle.

Sans attendre, Scyllia pénétra dans le bureau du grand inquisiteur et se plaça juste devant lui avec un regard dur.

— Je dois une bière à ton oncle.

— Pardon ? demanda-t-elle déstabilisée.

— Il m'avait prévenu que les matières enseignées ne te plairaient pas et que tu viendrais t'en plaindre tôt ou tard. Je dois cependant avouer que je ne m'attendais pas à ce que cela arrive dès la première heure.

— Pardonnez-moi, je me suis perdue dans les couloirs. Autrement, je serais venu dès les premières minutes. Et ça n'est pas toutes les matières que je critique, mais celles enseignées aux filles. Pour moi, des cours de ménage et de cuisine n'ont rien à faire dans une école de magie. En refusant de leur enseigner convenablement la magie bleue et rouge, comment voulez-vous qu'elles deviennent des mages accomplies ?

— Mais elles ne deviennent pas mage. Il a été prouvé que les femmes n'avaient pas les capacités pour faire avancer les recherches et qu'elles distrayaient leurs collègues masculins. C'est donc une perte de temps de leur enseigner.

— Plan numéro deux. On le tue, on récupère le cristal et on rentre à la maison.

— Si vous ne leur donnez pas les clés pour réussir, il est normal qu'elles échouent.

— Ha oui ? Dans ce cas, cite-moi une seule grande mage reconnue.

— Mauvaise pioche.

— Ho, je ne sais pas. Disons la duchesse Elisabeth Emvar, archimage et conseillère du roi Sarkin. Mais puisque vous êtes inquisiteur, peut-être que le nom de Siguir vous dira quelque chose. Si je ne m'abuse, avant de devenir déesse de la magie, c'était une grande magicienne. D'ailleurs, seriez-vous prêt à répéter ce que vous dites avec la même conviction devant sa statue dans le hall ?

— Ne blasphème pas le nom d'un dieu ainsi !

— Je vous retourne la remarque.

— Fais bien attention à toi jeune fille. Je suis conciliant pour l'instant car ton oncle m'a prévenu, mais ma patience a des limites. Il va falloir que tu apprennes à rester à ta place.

— Justement, en parlant de ça, il devrait un peu mieux se comporter devant une prétendante. Je suis sûr que ça lui ferait fermer sa gueule une fois pour toute si tu lui disais la vérité.