Chapitre 3 (partie 1)

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        Les rayons du soleil traversent les stores, tandis qu'une romance défile sur mon écran d'ordinateur. Ne connaissant absolument pas les classiques de la romance française, je décide de les faire découvrir à Mira. Plus précisément : 20 ans d'écart. Bon, ce n'est pas le plus ancien film que j'aurai pu trouver, mais je le trouve plutôt drôle. Avant de le lancer, j'active les sous-titres pour qu'elle suive plus facilement le déroulement de l'histoire. Après plus d'une heure, le générique de fin apparaît :



_ Quel est le titre de ce film déjà ?

_ 20 ans d'écart ! 

_ Bin ce n'est pas si mal, pour voir que c'est français ! me taquine-t-elle.

_ Ah tu vois, je te l'avais dit.

_ Par contre, le garçon c'est pas du tout mon genre !

_ Mais il est gentil et bienveillant !

_ Oui... enfin, ça ne fait pas tout !

_ C'est vrai.


Par la suite, les histoires de cœur ont pris le dessus :


_ Tu en es où toi, niveau amour ? Tu as un petit ami ? demandais-je timidement.

_ Heu ... oui, mais le fait qu'il fasse des études dans un autre pays, n'arrange pas notre relation. La distance et moi ça fait deux !

_ Ah mince, ça ne doit pas être facile tous les jours.

_ Non... enfin, on verra bien comment cela évolue.

_ Oui !


Pour éviter qu'une mauvaise ambiance s'installe, j'ai préféré changer de sujet. Mira à l'air pensive. Je ne voudrais surtout pas la mettre mal à l'aise :


_ Enfin bref... et toi ? reprend-elle.

_ Quoi moi ?

_ Tu as flashé sur un garçon ? Ou tu as déjà un copain en France ?

_ Non ! Enfin, j'ai eu des relations en France, mais c'est fini et tant mieux. 

_ Ah ! Alors il va falloir que je te trouve un beau garçon !

_ Ahah ! Je te préviens, je suis très difficile. Ce n'est pas comme si j'en voulais un en ce moment, pensais-je.

_ T'inquiète j'ai eu le temps de voir quel était ton type de mec, me dit-elle un sourire en coin.


Je lui rends son sourire. Assez chaleureux pour qu'elle ne le prenne pas mal, mais pas assez pour qu'on continu d'en discuter. Certes... ce garçon était très séduisant. Mis à part son orgueil et sa nonchalance, il avait tout pour lui. Cependant, je compte bien ne plus jamais le revoir, ne voulant surtout pas m'attirer les foudres de ces innombrables conquêtes. Le reste de la journée fut assez banal.


         Après une bonne nuit de sommeil, le levé du jour fait son apparition. Les cours commencent dans deux heures. Je dois m'activer au plus vite.


         Durant la première heure de cours, Monsieur Davis a les yeux rivés sur son bouquin, les lunettes sur le bout du nez comme à son habitude. Au moment où je m'apprête à entrer dans la classe, il se tourne vers moi et me dévisage, avant de jeter un regard pesant sur sa montre. Je baisse la tête, honteuse. En regagnant ma place, mes yeux ne quittent pas le sol. Ma réaction est similaire à un enfant qu'on aurait puni. Plus sérieusement, ce n'est vraiment pas mon genre d'avoir peur des réprimandes de mes professeurs. Même si la matière qu'il enseigne m'intéresse beaucoup, son interprétation de certains livres ou auteurs me donne envie de faire basculer mon bureau et de sortir en criant de cette classe. 


Franchement, le jour où je voudrais entendre qu'un écrivain a fait "exprès" d'oublier des verbes dans une phrase ou a intentionnellement voulu faire passer un message à travers le prénom d'un personnage, je retournerai voir les enseignants de mon ancien lycée. J'ai beau être fan de littérature, je ne cherche pas à montrer que je suis supérieur aux autres en cherchant une explication à tout. Cela leur arriveraient-ils d'écrire telles ou telles choses juste parce qu'ils en avaient envie ? Non, bien sûr que non ! Ce serait complètement absurde de penser cela d'un aussi grand auteur ! Des fois je me dis que le monde ne tourne vraiment pas rond. Toute action n'a pas forcément une explication.


        Ces trois heures de littératures étrangères, ont fait bouillir mon cerveau. L'heure du déjeuner approche et je remercie l'horloge de sonner la fin du cours. Mira n'est pas venue aujourd'hui, je crois qu'elle a attrapé une angine. C'est la première fois que je déjeune seule et ça ne me fait absolument rien. Ici, je ne me sens pas du tout stressée, les autres ne m'intéressent pas.


Je m'assois sur un banc au soleil. Les filles me regardent comme si j'étais folle de vouloir prendre un peu de couleur, au risque d'avoir des rougeurs. Personnellement, je ne comprends pas les gens qui se mettent à l'ombre. Cette chaleur est tellement agréable, que je préfère plisser des yeux pour manger et être au chaud, que de me mettre sous un parasol et avoir la peau laiteuse. Ayant les cheveux châtains aux reflets roux et une peau pâle, surplombée de grains de beauté, on pourrait croire qu'elle craint le soleil. Mais pas du tout ! Si je la protège, rien ne peut m'arriver à part mettre très... très longtemps à bronzer ! Mais dans cette ville où la clarté est présente 70 % du temps, je ne devrais pas avoir tant de mal à prendre des couleurs.


Les plats de la cafétéria ne sont pas très fameux. Je ne suis pas difficile, mais il y a des limites. Chaque jour, la friture est omniprésente. Comment font les gens pour garder la ligne dans ce pays ? Je ne suis pas une adepte du sport, mais je crois qu'il va falloir que je commence ou alors que j'emporte des plats plus sains à manger.
Pendant que je débat avec moi-même sur la nourriture, un garçon vient se placer devant moi. Cependant, j'essaie de l'ignorer. Je ne veux pas être dérangée pendant cette courte pause. Mais il n'a pas l'air d'être de mon avis :


– Salut !

_ Hey.

_ Tu déjeunes seule ? 

_ J'aime la solitude. 

_ C'est assez déprimant. 

_ Je ne te force pas à rester.

_ Hmmm... et pourtant, tu m'intrigues. 

_ Je peux savoir pourquoi ? 

_ Les filles comme toi restent rarement seule.

_ Les filles comme moi ? 

_ Oui, tu es plutôt mignonne. Tu ne remarques pas les regards qui se posent sur toi depuis tout à l'heure ? 

_ Heu.. Je ne suis pas intéressée, voilà tout.

_ T'aimes les filles ? 

_ Non ! Mais je ne vois pas en quoi cela te regarde. On ne se connaît même pas !

_ Oh excuse moi, je m'appelle Jo !

_ Alice.

_ Je te laisse finir ton repas toute seule, mais t'inquiète on se reverra Alice !


Sur ces mots, il se lève pour rejoindre ses amis assis plus loin. À voir leurs sourires et leurs sifflements, je me doute qu'ils ont assisté à notre brève discussion. Ce Jo est plutôt bizarre. Aborder les gens pendant leur déjeuner... il n'a aucune gène. En France, les gens sont loin d'être aussi avenants.

La vie d'AliceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant