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les hôpitaux, c'est un mélange de blanc, d'attente, et de malades.
et d'appréhension aussi, alors qu'une ipomée rouge endormie sur le sol ne veut pas quitter mon esprit.

elle s'est fait embarquée par un brancard. son père s'est fait embarqué par les flics. nous, on se fait embarqué par la peur.

on est avachis sur les sièges de la salle d'attente. j'ai tellement besoin de réconfort que j'sers la main d'ken. pour être honnête, j'crois que lui, il sert celle d'idriss.

on n'parle pas. c'est pas nécessaire. notre angoisse nous lie et c'est suffisant pour se comprendre.

j'resserre la prise de ma main sur celle de ken quand j'reconnais les deux infirmières qui s'occupent d'ipomée marcher vers nous. à leur mine peu sûres d'elles, j'comprends que c'est l'heure du verdict. le moment où elles vont nous annoncer que c'est bon, ma petite amie s'est réveillée et pourra bientôt sortir d'ici.

- vous êtes les seuls proches d'ipomée diez ?

on acquiesce et hakim explique :

- on est sa famille.

elles nous détaillent tour à tour sans aucune discrétion, s'demandant sûrement "quelle est cette famille composée d'un babtou, un renoi et trois reubeus ?". j'relève même pas, j'attends juste qu'elle m'annonce qu'ipomée s'est remise sur pieds.

- oh, et bien... je- nous sommes vraiment désolées. nous n'avons rien pu faire. votre... amie a succombé à ses coups. toutes nos condoléances.

j'pense que le premier à réaliser, c'est alphonse. p't'être parce qu'il redoute ce genre d'annonces, avec sa mère qu'est malade. il glapit un "non" avant de tomber à genoux sur le sol.

puis y a ken, qui lâche nos mains pour plonger sa tête dedans avant d'chialer comme un môme.

et les deux infirmières qui continuent de déblatérer, mais mes oreilles sifflent et j'comprends rien de leur blabla à base de "les premiers coups l'ont affaiblie, alors quand sa tête a cogné le meuble, ç'a lui a été fatal".

y a idriss ensuite, qui s'rend compte qu'il vient encore de perdre quelqu'un. y a juste des larmes qui coulent en silence sur son visage. rien d'autre. et hakim, lui, il pète un câble et il balance une chaise contre le mur d'en face.

et enfin moi. moi, j'bouge pas, j'parle pas, j'pleure pas. j'reste immobile, et j'me dis qu'c'est pas possible qu'ipomée ne continue pas d'fleurir.

fleur bleueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant