Chapitre 9. Quand le chat n'est pas là.

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" Le cinéma c'est l'écriture moderne dont l'encre est la lumière. " - Jean Cocteau.


Point de vue de Daria.

L'automne dépose son duvet de feuilles d'arbre sur les trottoirs et Camila ne perd pas une seconde pour les piétiner de ses talons aiguilles. Ses cheveux dorés virevoltent au gré du vent dans une chorégraphie langoureuse, pendant que ses cils papillonnent sensuellement. Le soleil espagnol éclaire son visage d'un éclat radieux, mettant en évidence son maquillage de poupée de cire.

— Non, non ! Il faut que tu agisses à la manière d'une femme fatale, ça ne va pas, annoncé-je en éteignant la caméra.

— Tu serais parfaite dans ce rôle-là ! Pourquoi tu ne le fais pas ?

— Parce que c'est ton personnage qui ouvre le court-métrage, pas le mien. Allez, recommence.

— Tu sais que tu serais une réalisatrice hors pair toi ? Exigeante et casse-pied, plaisante-t-elle en m'envoyant un clin d'œil.

J'émets un léger rire. Mon éternelle quête de la perfection m'handicape bien plus qu'elle ne me sert.

— Bon, il faut vite qu'on termine cette prise, s'agite Camila en frappant dans ses mains.

— Minute papillon, je veux que ce soit bien fait, quitte à y passer la matinée.

— Ce n'est qu'un devoir, pourquoi tu prends ça autant à cœur ?

— Je n'en sais rien, c'est bien l'unique projet qui me motive en ce moment.

De mes doigts, je lui fais signe de retourner dans sa position initiale. Malgré ses railleries et son impatience, la jolie blonde s'exécute en évitant les Sévillans visiblement pressés et agacés par notre présence au beau milieu du passage.

— Prête ? crié-je.

Ma voix résonne entre les immeubles, tandis que la jolie blonde me répond en levant le pouce dans ma direction.

— Action !

*

L'interminable cours d'interprétation théâtrale s'achève enfin, pour le plus grand bonheur de la totalité des étudiants. Sans me faire prier, je fuis de la salle de classe. Le manque de caféine fait d'interminables appels de phare dans mon cerveau. Engloutie dans la fourmilière d'élèves, j'avance d'un pas pressé vers la machine à boissons chaudes, plantée au beau milieu du hall de l'école.

— Ce prof est barge, soupire Rafael en déposant son bras contre la paroi du distributeur.

— Qui ça ? Monsieur Sanchez ? Pas plus que les autres, je trouve. Ils ont tous un grain.

— Tu sais ce qu'on dit. Pour être acteur, il faut forcément être un peu fou.

Nous rions en chœur, pendant que je pianote le code adéquat pour obtenir un café noisette. Depuis quelques jours, j'ai le sentiment que nous retrouvons notre complicité. Moi qui pensais qu'elle était portée disparue à jamais, la voilà qui resurgit dans mon quotidien. Ce n'est pas désagréable, ni même déplaisant, mais je ne me ferais pas avoir deux fois. Je n'attends plus rien de Rafael et c'est sûrement mieux ainsi.

— Hey, regarde, murmure-t-il en me pinçant la hanche.

Mes mains fraîches enlacent le gobelet de mon nectar fumant, alors que je pivote pour apercevoir la scène que me désigne le beau blond. Camila est assise sur une marche, Manuel est blotti dans son dos et lui administre tout un tas de caresses dans les cheveux. Je repose rapidement mon regard sur Rafael.

Action ! (SOUS CONTRAT D'ÉDITION)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant