11.

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JE N'AVAIS jamais parlé de ça. A part à ma meilleure amie de l'époque, qui se disait "super ouverte". Résultat : elle m'avait planté deux jours après, convaincue que je voulais sortir avec elle.

Mais Mathilda avait une espèce de sixième sens, comme si les lesbiennes et bisexuelles lui apparaissaient en clignotant. Elle ne se trompait presque jamais.

Je m'étais étranglée dans ma compote et avait quitté la table sur le champ, confirmant ainsi à Mathilda qu'elle avait raison.

Joséphine m'avait couru après, sûrement soulagée de quitter la table de la blonde.

« C'est vrai, ça, Anne ?

— Non. Elle dit n'importe quoi.

— Comme si c'était une honte, répondit-elle, un peu sévère. »

Les petites boucles de Joséphine s'enroulaient autour de ses yeux verts, et ces arabesques maladroites me rappelaient Constance.

Il y avait des filles au loin qui marchaient. Une avait les mêmes chaussures que Constance, un peu abîmées au gros orteil. Et plus loin, il y avait ce garçon de ma classe qui allait faire du piano. Comme Constance.

Tout ce lycée criait Constance. Et je voulais crier aussi.

« Moi aussi j'aime les filles. Et les garçons aussi. Je croyais que tu le savais. Tu peux m'en parler, Anne, tu sais, t'es pas seule. »

J'écoutais à peine. Je voulais juste partir d'ici. 

Anne t'aimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant