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Le garçon s'était tu pendant un bout de temps... mais le voilà de retour.
Contexte, toujours le même : une vie extérieure de rêve. Il vient de commencer l'université américaine. Il adore vraiment ça ; ça lui change du lycée, ses cours l'intéressent, il prend du plaisir à faire ses devoirs même s'il en a beaucoup. Prendre du plaisir à faire ses devoirs, oui ! Il a aussi beaucoup d'amis, plus qu'il n'en a jamais eus dans sa vie ; il sort parfois le soir avec eux, mange au restaurant entre les cours, et est même allé à Disneyland un dimanche avec L. et R. ! Il ne déjeune jamais seul, et a toujours quelqu'un avec qui passer du temps. C'est incroyable, c'est ce dont il a rêvé toute sa vie. Ce qu'il avait presque il y a deux ans et a dû quitter, d'ailleurs.
Le garçon est vraiment, honnêtement, finalement, heureux. Il s'est même remis à la peinture et à la poésie, c'est dire.

Seulement, voilà. Il y a toujours un "seulement, voilà".
Sans aucune raison qu'il ne saurait nommer, voilà l'insomnie qui s'empare de lui. Bon, 10 heures de sommeil en 3 jours, il a déjà fait, cela fait peur mais ce n'est pas très grave. Et cette insomnie, pour une fois, ne le garde pas éveillé par la torture ; il pense plutôt à toutes les choses qu'il est excité de faire dans les semaines à venir. Et puis, les nuits sans sommeil, cela va sans dire, le délivrent des cauchemars qui le hantent depuis la rentrée. Deux ans d'un sommeil sans imagination, puis d'un coup, comme ça, pouf, toutes les nuits viols, pédophilie, scatophilie, torture physique, mentale, sexuelle, violence gratuite, massacres d'innocents, un sadique mélange de toutes les choses qui répugnent même les plus solides. Et cela chaque nuit, sans exception, dès qu'il a plus de 5 heures de sommeil. Mais il ne veut vraiment, vraiment pas y penser ni en parler, de ces cauchemars. Revenons donc aux moments où il ne dort pas.
Après trois nuits sans sommeil, il parvient enfin à dormir. 12 heures d'affilée. Il pensait alors que son sommeil était réparé. L'insomnie n'était qu'un SPM. Sauf que, son esprit, comme pour se venger de tant de joie, le lendemain soir lui fait saisir la lame, et couper, couper, couper... pareil le lendemain, et le jour suivant, toujours plus grand, toujours plus profond, toujours plus nombreux... il n'y peut rien. Ce n'est pas lui qui a le contrôle. Lui, il a juste le droit de pleurer dans la douche en grattant le sang séché, et de souffrir la journée des pantalons qui le brûlent. Comme si tout cela ne suffisait pas, qui est de retour ? Les terribles crises d'angoisse. Multifactorielles (c'est un joli mot), provoquant multiple symptômes parmi les plus sympathiques hyperventilation, vomissements et anorexie, oui, les voilà. L. et A. qui, en cours de design, lui demandent toutes les 5 minutes si tout va bien, tellement sa forte respiration prend tout l'espace sonore de la pièce. Sa mère qui le bourre de granules aux plantes, et le force à reprendre les rendez-vous avec sa connasse de psy (pas pire que celle d'avant, mais putain, elles se partagent la palme).
Et toujours, ce qui le consume le plus dans tout cela, ce n'est même pas la douleur à l'instanté, mais l'absence de réponses. Pourquoi ? Pourquoi moi ? Que puis-je faire pour que cela s'arrête ? Il veut les raisons. Plus de sports ? Plus de sommeil ? Plus de fruits ? Moins de films tristes ? Il essaye tout ça, il essaye. Enfin, comme toujours, il a quelques amorces de réponses... une mauvaise note... une chose qu'il n'ose pas dire ici... Mais c'est bien peu pour provoquer de telles horreurs !
Le garçon est étrangement, mais terriblement, seul. A qui parler ? Sa confidente sur Internet, C. Mais elle doit sûrement en avoir marre de lui. La pauvre essaye d'améliorer sa santé mentale avant la fin de son lycée, et lui se ramène avec toutes ses merdes qu'il n'arrive même pas à nommer. Il aimerait en parler avec quelqu'un en particulier, même si cette personne s'avère être, il le croit, une des causes de son malheur.

Le garçon est terrifié, confus, et voudrait en finir avec tout ça.

Le GarçonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant