Au bout du rouleau

10.3K 1.7K 110
                                    

Le soleil dardait ses lumières sur les vitres du bus que j'avais pris. Cela me tira de mon fatidique sommeil,  sûrement étais-je en train de rattraper ma tumultueuse soirée  d'hier.  Avais-je répondu au baiser de Nathan?  Je faisais rapidement le bilan des scènes d'hier. Tout parut clair,  je ne pouvais plus nier l'évidence,  cette évidence qui me qualifiait. J'étais un homosexuel,  un homme qui ne ressentait rien pour les jolies femmes aux formes plantureuses,  aux lèvres fines et sensuelles. Loin d'être excité par ces femmes aux seins artistiquement taillés comme des melons ronds et savoureux flattant facilement l'angin mâle,  toute mon attention se portait sur l'homme aux mêmes caractéristiques que moi,  j'avais violé la loi de l'attraction. Je désirais mon semblable,  mon cœur me l'avait confirmé à la simple promiscuité avec Nathan, j'avais voyagé en ces quelques secondes d'intimité où mon corps daignât répondre sans réticence.  Mes larmes coulèrent sans arrêt,  je les reprimais avec mon mouchoir et redresser mes lunettes teintées en noir pour ne pas attirer l'attention de mon co-passager. Le chemin dura des heures,  d'interminables heures que je trompais avec mon sommeil. Tantôt le tintamarre des marchandes venaient déranger mon repos. Mon attention était plutôt braquée sur une jouvencelle toute petite,  très petite même qui tenait un bol où était superposé des oranges.  Elle ne devait dépasser les huit ans cette jeune fille et elle était jetée dans le commerce,  courir derrière les bus pour marchander. Quel pays sommes-nous? Sa place n'était pas dans cette rue dangereuse où tout danger était en jeu : viol,  détournement,  j'en passe...  Ils donnent naissance pour abandonner,  donner naissance est un jeu dorénavant. C'est considéré comme rien,  un coup du soir,  un plaisir du soir,  dans l'ennui total,  leurs corps s'entremêlent. L'excitation et l'extase sont au rendez-vous sur le lit,  les moments de plaisirs passent et neuf mois après on célèbre la naissance de ce bébé qu'on chérit pendant un ou deux ans ou peut-être cinq ans,  tu les vois abandonner de fur en mesure attention et éducation. L'enfant se trouve dans des circonstances compromettantes,  abandonné et passé aux trappes. C'est l'enfant dorénavant qui devrait se remettre en question de sa vie,  de sa naissance...  Bien évidemment comme si son avis a été sollicité au moment de la conception,  comme s'il lui a été posé la question : Tu veux venir sur terre?
  Jamais, il regrette!  Donner naissance est un projet à mûrir,  le plus grand projet même de la vie,  car on est dans la perspective d'accueillir un nouvel être  au monde,  quand on décide d'inviter un hôte,  on devrait être en mesure de lui préparer un bon repas et de rendre les lieux agréables et confortables.  L'enfant est un hôte que les deux parents ont décidé d'inviter au monde,  dans leur foyer.  Être prêt  à  donner naissance à un être  , c'est être prêt à assumer,  à nourir convenablement et à éduquer entièrement sans défaut. Injustes sont ceux qui donnent naissance alors qu'ils ne sont point prêts à assumer les responsabilités qui s'en suivraient.
    J'avais pitié pour cette jeune fille au visage innocent qui circulait entre les voitures,  elle pourrait être détournée  et violée  à tout moment...  Violée comme je l'avais eté,  arrachée son enfance comme j'en fus victime. Détruite comme j'eus à subir. Je fermais mes yeux en ressentant une grosse haine grandir dans mon tréfonds, je me mordis les lèvres pour réprimer ce gros soupir qui allait sortir de moi. Je recevais à chaque seconde l'appel de Nathan que j'ignorais. Je sentais qu'il regrettait beaucoup,  jamais je n'aurai cru dans la vie que lui aussi était un gay...  Il dégageait une virilité sans commentaires et ne laissait vraiment rien paraître,  qu'était la raison de cela?  Avait-il eu le même antécédent que moi à son enfance?  Je pouvais au moins avoir la décence de l'écouter et d'essayer de comprendre d'abord. Mais il était beaucoup trop tard pour regretter quoi que ce soit, je ne pensais plus à le voir de ma vie,  je n'aurais même plus cran de le regarder droit dans les yeux : on avait commis l'excès
      J'arrivais dans le village où tout m'était beaucoup familier,  où tout détail physique me rappelait énormément de choses,  les maisons n'avaient quasiment pas beaucoup changé,  elles demeuraient toujours aussi précaires,  toutes faites en pailles,  l'évolution n'avait pas passé par ici. Je soupirai longuement et entrai dans la concession en arrangeant à nouveau mes lunettes. Je trouvais dans la cour de femmes en train faire le linge et au fond quelques marmots affairant autour de leurs tablettes coraniques en bois. 
     Mon coeur rata un battement,  je transpirais sans contrôle,  cet endroit créait en moi de malheureuses reminescences,  ce lieu où toute ma vie se fut chamboulée.
     Une vieille femme vint à mon encontre avec un sourire amène en me tapotant le dos.

- Que puis-je faire pour vous mon fils?

- Je suis à la recherche de mon ancien Maaraa,  vieux Diallo.

Il eut des secondes habillées de silence,  elle me considéra un moment en reniflant. Sans porter de gants,  elle m'annonca sa terrible mort dûe à une épidémie mortelle qui avait fait ravage et touché plus d'une centaine de villageois.  J'en fus offusqué et lui presentai brièvement mes condoleances . J'hésitais à lui poser la question qui me brûlait les lèvres,  elle me servit de l'eau et j'en profitai

- Que deviennent ses enfants?  Abdou Diambar?

- Tous sont morts malheureusement sauf lui,  il est le chef de quartier et vit à la dernière maison à gauche. Il s'est marié il y'a trois ans et a deux enfants.

    Cette réponse mit sur mes lèvres un sourire maléfique que je reprimais très vite en  remerciant la dame de sa gentillesse.
     Je me dirigeai directement vers la demeure indiquée en sentant mon cœur battre à tout rompre. Mes larmes piquèrent mes yeux et j'arrivais au seuil de la maison en m'arrêtant,  je ressentais un douloureux tournis qui allait m'ecrouler au sol.  Comment pouvait-il gâter ma vie pour après convoler une femme et se taper des enfants?  Alors qu'il avait fichtrement ruiné ma vie. 
   Je respirai un bon coup en dégageant mes larmes et entrai dans la demeure. Je trouvais deux enfants qui jouaient sur le perron à côté de leur maman probablement qui tissait un pagne.  On se saluait,  elle était très avenante et se présenta comme la femme de celui que je recherchai. Elle me fit entrer dans une pièce sûrement le salon et me servit de l'eau en me priant d'attendre son mari qui était sous la douche.
   Je m'assis sur le canapé en éteignant mon téléphone qui n'arrêtait de sonner. Avant même de le ranger dans ma poche, un salut imposant et jovial vint m'interrompre,  je fis un sursaut et lui passai la main en contenant ma surprise.  Il s'était beaucoup métamorphosé,  le visage decatis comme un vieux,  barbe hirsute. Il me contempla quelques instants

   -  La visite devrait vous surprendre. Peut-être vous ne me reconnaissez pas vraiment,  balbutiai-je un peu

-  Certainement jeune homme,  vous m'êtes un peu familier mais je ne sais plus où exactement.

- Je m'appelle Aziz, j'étais un disciple du feu vieux Diallo,  votre père.  Je suis passé chez vous pour lui rendre visite et j'ai été renseigné de son décès et de votre statut de chef de quartier. En effet,  je voudrai beaucoup être reconnaissant à son égard en apportant à votre secteur un groupe électrogène pour vous apporter électricité afin de combler le déficit.

    Il me sourit de joie qui laissait apparaître des dents jaunies d'une negligence considérable. Il cria le nom de sa femme en lui demandant de me servir du lait frais dont je répondis sans me faire prier et on continuait à discuter tandis que ma haine grandissait en moi à chaque fois qu'il souriait comme l'homme le plus gentil au monde.
    Je lui promis de revenir dans une semaine pour l'installation du groupe électrogène. Il me remerciait fermement en me faisant une grande accolade , je sortis discrètement le couteau de ma sacoche et la lui planqua d'une manière douce mais féroce au bas ventre. Il se releva et me regarda,  je le tins pour éviter qu'il vacille. J'enlevais mes lunettes et il se miroita rapidement sur mes yeux verts qu'il reconnut rapidement et articula une impitoyable grimace.

     - Crève en enfer pour m'avoir gâté ma vie .



Le  Tom 1 de l'histoire deux puces s'achève ainsi.
  C'était l'introduction de l'histoire,  veuillez me suivre pour le Tom 2 :).
   Merci beaucoup pour cette aventure,  que tout lecteur laisse un commentaire.  Je suis ouvert aux critiques et questions.
  Bonne soirée 😊

Deux puces ( Tom 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant