Mère bou bone bi 3

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En un trait de temps, il me tira la main d'un sourire gai et s'apprêta à m'amener je ne sais où. Je me laissai faire sans poser la moindre question ; je trouvais,sorti, un immense jardin avec des plantes et fleurs belles comme des anges avec des couleurs diversifiées. Non loin de là, était creusé la large piscine avec l'eau calme qui courrait sereinement. A côté, Daouda me désigna un très beau maillot et une culotte qui devaient me servir de baignade. Il me pria de m'en servir

- Je ne sais du tout baigner et j'ai une phobie de l'eau mentis-je

   Il avança en décrochant un sourire parfaitement suave en ramassant illico presto la tenue et me la présenta

- Derrière toi , il y'a une chambrette, tu te changeras. Ne t'inquiètes pas, je t'apprendrai, dit-il d'un ton autoritaire

    Quel homme! Je maugreai quelques mots d'inquiétude et revins avec ce petit maillot qui devoilait le secret de mes fesses saillantes et de mes jambes largement tracées. Il sauta dans la surface et m'invita à le rejoindre, j'y descendis avec beaucoup d'appréhension. Au final, je me fus tellement détendu car il était très avenant et courtois avec moi. Je me liberai un peu pour me baigner, il me complimenta sur ma manière de nager comme un dauphin en pleine mer. Je fis la planche entre ses bras, il m'avait proposé de m'y initier.

   -  Vas-y, lâche-toi! Ne pense plus à rien, fais comme si tu étais aux cieux, ton corps doit être allégé, oublie tous les soucis routiniers.

  Chouette idée! Cela ne devait pas vraiment me poser de problèmes. J'étais fichtrement assailli de problemes, j'avais besoin d'oublier même si c'était quelques secondes voire une minute, je voulais me sentir renaître ;  mais les doigts qui faisaient randonnée dans ma culotte me fit des soubresauts que Daouda en paniqua. Je me trouvai immergé dans l'eau et m'empressai de sortir. A l'intérieur,je le regardai avec dedain et lui demandai les toilettes. Je ramassai toutes mes affaires et filai, je laissai couler l'eau sur mon corps et je sentis mon coeur battre la chamade. Tout ce scénario me rappelait à images claires celui que j'avais vécu dans mon école coranique. Je me serrai les mâchoires en refoulant ces souvenirs qui prenaient siége dans ma tête. L'ombre de Daouda survint derechef , il pénétra dans la douche que j'avais oubliée de verrouiller. Il laissa tomber sa serviette et je découvris sa longue intimité qui tombait de sa petite culotte en prenant quelques centimètres. Je fus pris de court en fermant les yeux, je le sentis avancer en me tenant collé à lui.
   - Mais que fais-tu? Arrivai-je à articuler dans mon hébétude
 
Il mit son doigt sur ma bouche et ouvrit la chasse d'eau, je le repoussai violemment et sortis m'habiller très vite. Je pris congé de chez lui et à peine dehors je n'hesitai à bloquer ses contacts. Je ne voulais plus l'entendre, je me haïssais de m'être embarqué dans cette foutaise. J'étais drôlement offusqué et je ressassais très vite ces moments, ce qui me consternait le plus dans cette histoire était que mon sex n'eût du tout été indifférent à cette confrontation,j'étais excité : excité par un homme. Serai-je gay? Je fermai ardemment mes yeux afin de voler d'autres pensées pour tromper ces idées qui m'assaillissaient,c'était impossible. Je ne savais où partir, j'étais bien perdu dans ce monde de fou où tout semblait venir contre moi, où rien ne me ménageait. Je décidai de rendre visite à  ma grand mère qui vivait avec une de ses nièces. Je la trouvai comme d'accoutumée dans la vaste cour en train de  tisser des pagnes. Elle m'avait expliqué qu'elle arrivait à vivre grâce à cela et qu'elle aimait beaucoup survivre grâce aux fruits de sa labeur, pour cette raison de plus je l'idolâtrais beaucoup.
   - Tu m'avais beaucoup manqué Chérif, si tu savais. Prends un tabouret et viens t'assoir à mes côtés. As-tu mangé dis moi ? Tu n'es vraiment pas embonpoint, regarde toi! Tu es si malingre, allez, je te prépare quoi?
    Ses questions , cette attention, cette bonhomie freinèrent ma faim. Je souriais de joie, cela faisait un bail que je n'avais point du tout ressenti un tel bonheur, une attention si sincère que je finis en larmes. Elle sursauta en me tenant le visage fermement et me demanda ce qui se passait. Comme un automate, je lui fis connaître ce que je vivais dans la maison de mon oncle, son fils. Elle se mordit les lèvres nerveusement et je la sentis remuais une colère indicible.
   - Tu sais que mon fils, je l'ai renié définitivement depuis deux ans et je n'ai point du tout accepté la moindre approche de réconciliation. Il m'a bradée contre sa femme qui, on le sait tous, est une véritable vipère. Mon fils s'est métamorphosé depuis qu'il a épousé cette sorcière. Elle causait de profondes discordes entre mon enfant et moi. La cerise sur le gâteau, alors que sa femme me faisait affront, cet ingrat fils a pris sa défense sans équivoque. Je ne saurai t'expliquer cette déception que j'ai eue ce jour. A jamais je le renie et jamais de la vie, il sera heureux cet ingrat.
    Elle fit une mine dépitée et s'esclaffa en pleurs. Je la pris entre les mains et la consolais. Je me sentis très mal, comment expliquer cet horrible sentiment ? La souffrance d'une mère par l'ingratitude et la traitise d'un de ses fils qu'elle avait tant choyé. Comment pouvait-on s'egaler par une telle bassesse. Être maudit par une mère , par sa mère est simplement la malédiction qui ne peut connaître pire. Une mère demeure la dernière personne à nous comprendre, à nous pardonner et à nous épauler. Un papa peut prendre retraite en son fils par simple coup de tête mais une mère est simplement celle qui est là qu'il fasse bon temps ou mauvais temps, qu'il s'assombrisse comme de l'éclipse solaire, elle tiendra à jamais la main de son fils. Quel serait ce tonnerre qui lui fera couper les ponts avec son enfant?
Je lui fis en bisou et je me rendis compte qu'elle dormait, je voulus la réveiller mais  je ne sentais point sa respiration. Je lui tapotais ses joues petries de rides, que ses larmes qui répondirent de son corps inerte. Elle était morte, aucune respiration ne s'entendait, je ne tardai à le découvrir. Je la serrai fortement contre ma poitrine en pleurnichant comme un bébé qui venait de naître. Je voulais l'accompagner, je lui avouais secrètement que je voulais être à sa place pour couper court ma souffrance. Je lui fis un gros bisou et j'avertis sa nièce de cette mauvaise nouvelle, elle courrut en sanglots je ne sais où. Je la couvris d'un drap blanc que je trouvais par hasard dans sa case. Quelques minutes après, la maison se remplit de monde. Je me retirai pour rentrer, j'avais simplement marre de la vie, plus rien ne m'enchantait dans ce monde de fous. Que me restait-il? La vie semblait vouloir me désarmer de partout, plus d'espoir, elle me retirait vraiment tout refuge et subterfuge. Où m'adosser dorénavant ?
   Le lendemain, ma mère était rentrée au pays plus que rayonnante. Elle entra dans ma chambre en me prenant entre ses mains et me souffla son amour. Je lui accordai un seul regard qui était involontaire mais le reste je fixai la porte comme pour extraire d'elle une information. Je ne pipais mot de ses questions enveloppées d'attention ' As-tu mangé ?  Qu'est ce qui m'arrive ? Pourquoi tu es si mince ? '. A ces instants où je voulais simplement lui concocter quelques gifles bien en correspondance et en symphonie pour lui avouer toute ma rancune mais que je me rapellasse qu'elle était une mère, ma mère. Je me suffisais de mon silence pour lui signifier qu'elle pouvait aller bien se faire voir là où elle voulait
  - Nafi n'arrête de te demander, elle a tellement envie de te voir. Mais tu sais je ne l'ai pas amenée car elle prépare son Baccalauréat.
     Je détachai un bref sourire par cette dernière information. Ma petite soeur me manquait tant, je la gardais dans mon tréfonds. Ma mère me tendit une photo d'elle, je la derobais en la parcourant des yeux : j'étais pris par un certain bonheur ineffable. Quelle joie! Elle était magnifique, la beauté brute. Élancée , noire sans équivoque comme moi avec de gros yeux pétillants et les traits plus fins que les miens. Je me voyais à travers elle, un certain espoir naquit en moi. Je serrai contre moi ce beau cadre en prolongeant à nouveau mon regard sans répondre à celle qui me servait de mère
- Chérif, tu sais que je t'aime.. Si tu savais...

- Vraiment, je ne suis pas d'humeur à t'écouter,si tu ne peux libérer ma chambre, je pourrai bien le faire, dis-je en reunissant toute la froideur nécessaire

   Elle se leva et quelques minutes après j'entendis des cris aigus. Je ne bougeais d'un iota et je repris la photo à ma soeur en la contemplant.  J'entendis les pleurs de Momo ,le fils de mon oncle. Ma mère vocifera mon nom accompagné de mon prénom, je courrus dehors et vis mon oncle dans un piteux état la langue sortie comme un chien essoufflé et les jambes paralysées. J'aidais ma mère et ma tante à l'emmener dans son véhicule et ma maman prit le volant. On arriva à l'hôpital puis il fut évacué aux urgences. On resta dehors tous deux inquiétés sauf moi, j'étais simplement pris de haut face à cette horreur mais loin de ressentir la moindre pitié, aucune Commiseration à son égard. Par contre, je ne le lui souhaitais du tout, d'ailleurs je ne souhaite du mal à personne mais j'ai toujours souhaité que chacun soit rétribué à l'aune de ce qu'il mérite. Son épouse s'excusa pour rentrer car elle avait laissé seul le petit Momo à la maison. Nous restions ma maman et moi seuls dans cet hôpital. A une heure très avancée, le docteur vint nous emboucher la  trompette sans biaiser que mon oncle venait de perdre l'usage de tous ses mains et même la parole. Ma maman vocifera comme un forcené, je la regardai simplement sans dire mot. J'étais vide de sentiments, elle arrêta à un moment et me regarda ahurie

- Serai-tu inhumain, mon fils? Me souffla d'une voix attristée

Je lui dis tout simplement qu'on devait rentrer vu que le médecin nous avait dit de revenir le lendemain. Elle me devança en se hatant le pas, je la suivis et on arriva un demi-heure après à la maison. La porte était béate, tout en désordre, on appela les noms des résidants, aucune réponse ne se fit entendre . Je trouvais un large papier sur la table à  manger d'où s'est superposé un stylo. Je m'approchai et je reconnus les écritures de ma tante
  Adieu Ousmane, mon fils et moi te quittons à jamais.

Deux puces ( Tom 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant