PARTIE XVIII

11 3 0
                                    

L'aurore embrasait les pâles clartés du ciel, si bien que ses étincelles d'orge s'étaient embrumées de nuances vermeilles, et inondaient les champs améthyste de sa fièvre carmin. Sa douleur s'écoulait des charmilles de bruyères aux roses des confins de l'univers. Aurore perlait du feu dans les plaines bleues. La jeune femme voila l'émeraude de ses yeux avec le dos de ses mains et fondit en pleurs. Ses sublimes rayons lumineux dont se fendaient les fleurs de l'éden se colorèrent d'un rouge aussi écarlate que les fruits de sa passion alizarine, les corolles pulpeuses des deux luminaires célestes. La belle nuée s'écria au cosmos parsemé de larmes garance :

« Ambre ! Luna ! Où êtes-vous ? La distance entre mes mains désolées et vos courbes esseulées ravage mon corps de flammes ! Ma peau se consume quand je rêve de vos baisers langoureux ! C'est l'aurore qui se meurt de votre absence ! Je vous en supplie, calmez cet incendie en moi, abreuvez-moi de votre éclat ! Je veux entendre le son de vos voix bercer les battements de mon cœur ! Que la lumière de vos visages, que vos plus beaux sourires s'ébauchent et chassent les éphémères souvenirs, seulement quelques images et vos noms qui résonnent dans mon esprit ! Si rien que votre ombre pouvait luire, ô splendides anges du jour et de la nuit, au loin dans les cieux éplorés de mon chagrin ! »

Aurore s'effondra devant les dernières étoiles qui enluminaient encore le tourment des cieux. Les charmes de la nuit s'évanouissaient peu à peu, le jour levant tardait à se dessiner, l'olympe se trouvait en grand désastre, à ne scintiller que de la peine d'un nuage. Les constellations poudraient la voûte céleste d'une mélancolie dorée, l'allégresse de leur mélodie avait été réduite en une myriade de thrènes et de sanglots, comme une rosée de larmes à la lisière de la galaxie. Chacune des couleurs de l'éden ruisselait de l'affliction d'Aurore, le ciel chatoyait son martyre et se joignait à ses lamentations. La jeune femme balbutia, à cours de perles ardentes pour crier cet abandon qui rongeait son âme à l'ampleur du néant bleuté :

« Je... Je vous aime, toutes les deux. Éclairez mon ciel, bredouilla-t-elle dans un dernier sanglot, comblez-moi de vos rayons ! Je ne peux vivre sans votre éclat. »

Aussitôt, l'empyrée s'emplit d'une lumière aux reflets aveuglants. Les pleurs délicats de la nuée éperdue d'amour s'estompèrent au passage de l'éclair opalin. Les cieux baignaient de vagues translucides, et la lueur grandissante transcendait les champs célestes de pétales éblouissants. Un ouragan de brillances avait répandu un océan de flots lumineux autour de la jeune femme. Au large de ces ondes angéliques, deux points de l'horizon se coiffaient d'une auréole étincelante. Coruscantes au sein d'une mer ivoirine, ces lointaines chimères s'approchaient à grandes envolées. Bientôt, l'éther put distinguer ces lanternes de sa lumière, les deux astres parurent et accoururent, affolés par les larmes d'Aurore. Lorsqu'elles arrivèrent près de la jeune femme, elle gisait au sol, éreintée et langoureuse, le regard vide, la respiration saccadée, le visage recroquevillé sur sa poitrine et la carnation presque livide. Elle finissait de se consumer sous leurs yeux mêlés de luisances et d'angoisses.

Les éclats d'AuroreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant