Aurore se prélassait sur le gazon, le corps adossé au tronc confortable du saule épargné par l'averse. Sa main s'adonnait aux caresses d'un bouquet de pâquerettes plongé dans les profondeurs de la pénombre. Soudain, elle sentit une légère vibration derrière elle, comme si un autre cœur battait auprès du sien. La lycéenne se retourna avec soin et découvrit une imposante masse végétale émerger des ténèbres, puis illuminer les abords de sa majestueuse brillance. Le spectacle était saisissant, les rameaux s'étiraient pour se courber à nouveau, le baliveau prenait vie. L'arbre inspira la brise, légère et humide, avec tant de force que le souffle du vent résonna entre ses feuillages et fit même frémir les branches les plus trapues.
La fille aux yeux dont l'éclat rappelait les feuilles printanières leva le menton vers la cime du saule. C'était un souvenir du printemps qui s'adressait à un soupir d'automne :
« Tu dormais ? demanda-t-elle d'une voix aussi douce que le miel.
- Oui ma belle, répondit le saule avec la raucité habituelle de son timbre, tu sais, un arbre de mon âge ne peut pas rester éveillé toute une journée.
- Quel dommage, tu n'as pas pu admirer les gouttes de pluie perler sur tes frondes, c'était d'une beauté féerique... »
En effet, les larmes avaient cessé de poindre aux paupières des nuages peu avant que le feuillu n'agitât ses premières ramifications. Le ciel se parait désormais d'un grand manteau cotonneux à l'aspect laiteux.
« J'imagine. » murmura le vénérable végétal avec mélancolie. Puis après un court instant de silence, il reprit : « Tu n'as pas pris froid au moins ? Les giboulées de septembre sont traîtres, l'aquilon est froid, le ciel se montre parfois violent.
- Oui, accorda-t-elle, mais il est loin d'être méchant. Regarde l'élégance du lin dont il s'est couvert ! »
Le saule contempla la mer de nuées et ses feuilles tremblèrent lentement, comme charmées par la beauté de cet habit.
Aurore continua : « Je ne me lasse pas de ce tableau, de ces touches d'ivoire peintes aux pinceaux célestes... Comment peux-tu t'assoupir devant une pareille merveille ?
- Ce n'est pas que ce défilé de panaches opalins ne me submerge pas d'émotions, au contraire, mais je crois que j'ai toujours préféré les étoiles. Je ne me priverais des fleurs de la nuit pour rien au monde. D'ailleurs, tes nuages adorés ne me laisseront que des pétales nébulés ce soir... » Le saule se pencha et constata le regard fasciné d'Aurore, encore dirigé vers l'élysée. « Toi cela n'a pas l'air de te déranger, il me semble, fit l'arbre d'une voix rieuse et attendrie, je n'ai jamais vu autant d'étoiles en une nuit qu'il y en a en ce moment dans tes yeux ! »
Aurore rougit, bredouilla quelques mots, puis abandonna toute idée de réfutation. Le saule l'avait cernée, il la connaissait mieux que le bout de ses brindilles. La jeune femme plongea encore une fois dans ses langoureuses rêveries.
« Ô cieux sublimes, nuées d'une pâleur lumineuse, astres purs et divins, qui de vous alimente ce brasier sans fin dans ma poitrine ? »
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Les éclats d'Aurore
Historia CortaNouvelle poétique - 20 parties "Elle était sublime, Aurore..." Aurore est une jeune femme radieuse, une fille de lumière. Au fil de ses rêveries, elle s'éprend de la beauté du ciel. Étendue dans l'herbe en pleine nuit, Aurore trouve le sommeil, puis...