« Comment tu...
- Je sais que le jour n'est pas ton royaume, continua-t-elle en écumant de ses doigts la chaleur de son cou, il est impossible pour toi d'y rester indéfiniment.
- Nous avons chacune notre ciel, enchérit Ambre, comment pouvons-nous te désirer en même temps ?
- Vous éclairez deux empyrées différents, développa brillamment Aurore, mais vous scintillez aussi dans un seul olympe, le mien, comme mes rêves ont partagé vos lumières, comme dans mon cœur baignent vos rayons. Mon royaume est la solution à notre amour, mais en revanche, je n'en suis pas la nécessité. »
Ambre et Luna dévisagèrent avec surprise leur bien-aimée, qui impassible, leur adressait un tendre regard. Les deux astres n'étaient pas sûrs d'avoir bien interprété les déclarations d'Aurore, alors elles patientaient pour quelque autre parole, un sourire en coin. Leur confusion toucha la sublime rousse. Cette dernière s'extasia : « Oh, allez mes belles nymphes ! Depuis la nuit des temps, vous vous poursuivez. À chaque aurore, à tous les crépuscules, vous n'avez le temps que d'entrevoir une mèche de l'une, les jambes élancées de l'autre, uniquement l'aura de votre départ vers d'autres horizons. Mais cela a suffi à nourrir votre amour, je l'ai lu dans l'abîme de vos songes. Ne me regardez pas de cet air embarrassé ! Vous n'avez pas à le cacher maintenant que vous êtes réunies, je n'ai pas à le blâmer, je suis bien un nuage épris de vos deux sourires, non ? Écoutez mes anges, vous pouvez faire de l'aurore un moment de l'éternel. Je suis ravie que vous la trouviez belle, mais la réponse n'est pas dans la couleur de mes yeux. Elle est plutôt enfouie dans vos pulsions brûlantes, dans vos songes les plus inavoués. Ne plongez pas dans mon âme, aventurez-vous dans les vôtres ! Je ne suis pas la seule source de votre éclat, ni l'unique femme qui devrait goûter à votre douce lumière. »
Les deux femmes se réservèrent un instant, puis cédèrent à leurs charmes. Elles contemplèrent le corps de l'autre, s'attardant sur les membres que leurs regards n'avaient jamais atteints. Il semblait que leurs yeux avaient arrêté le temps, l'aurore retenait les femmes sidérales alanguies en son éther, présentait le flambeau du jour et la chandelle de la nuit face à face, sous le même ciel. Luna s'enivrait des pupilles saphirines de l'étoile dorée tandis qu'Ambre alunissait sur les pétales vermillons de l'astre argenté. Comme à l'accoutumée, les joues du soleil se brasillèrent de cinabre et ses pupilles entrèrent en éruption. L'espace entre leurs deux corps se combla, et leurs peaux s'accolèrent. Luna étreignit d'une main la nuque vénitienne de son amie, et caressa sa taille fiévreuse de l'autre. Enfin, dans un gémissement de désir, leurs lèvres s'effleurèrent, puis se rencontrèrent d'un baiser audacieux.
Les deux femmes s'embrassèrent de longues minutes, comme si un océan temporel les avait séparées pendant des siècles. Aurore contemplait les courbes de ses deux amantes qui s'épousaient de plus en plus aux lueurs orangées du potron-minet. La jeune femme esquissa un sourire, elle pouvait être satisfaite. En plus d'avoir embrassé les élues de son cœur, elle venait d'unir un nouveau couple, deux femmes que tout un ciel séparait. De ses deux éclats, elle avait puisé la lumière pour édifier un nouvel éden, illuminé par les oriflammes célestes. C'était un simple nuage, une étincelle aux reflets roux dans le ciel pervenche, un ange épris du soleil et de la lune. C'était une femme, qui avait embelli les premiers coloris matinaux de l'ardeur de son éclat et des lumières de son cœur. C'était elle la démiurge, l'astre de l'Aurore.
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Les éclats d'Aurore
ContoNouvelle poétique - 20 parties "Elle était sublime, Aurore..." Aurore est une jeune femme radieuse, une fille de lumière. Au fil de ses rêveries, elle s'éprend de la beauté du ciel. Étendue dans l'herbe en pleine nuit, Aurore trouve le sommeil, puis...