La Roseraie des Djinns - Tome 1 Rose des Sables [En Pause]

Chapitre 12 Partie 2

Sheraz observa son ami partir en trombe avant de porter un regard en direction de son père. Il n'appréciait pas la manière dont ce dernier observait Yelam et il comptait bien lui faire comprendre le fond de sa pensée. Mais Laban venait de prendre les devants en prenant place à ses côtés, lui lançant un regard moins moqueur, bien plus doux, tentant d'être rassurant.

— « Je ne compte pas faire de mal à ton ami... Je suis un Djinn oui, je mens souvent oui... »

— « Mentir est dans ta seconde nature. »

— « Peut-être... Mais blesser la famille que tu te construis... jamais. »

Sheraz avait du mal à croire aux paroles de son père, mais pour une fois, il pouvait lire de la sincérité dans le regard de l'homme à ces côtés. Et il avait envie... Envie que ça soit vrai, il l'espérait réellement.

— « Si tu lui fais du mal, crois-moi, je serais ton pire cauchemar... Papa. »

Laban explosa de rire tout en venant ébouriffer les cheveux de Sheraz avant de se faire repousser de la main.

— « Tu as encore du mal avec le contact à ce que je vois... Il va falloir faire quelque chose pour ça mon garçon... »

— « Tu ne peux pas me forcer à être comme toi... Je ne comprends pas cet intérêt pour... les corps se mélangeant. C'est tout. »

— « Le plaisir ? Se sentir bien ? L'amour que tu portes à cette personne ? Il y a plein de raisons diverses et variées Sheraz. Il suffit que tu trouves la tienne. Mais tu sais qu'il n'y a pas que ça. »

Sheraz ne répondit pas, préférant se relever brusquement, serrant les bras contre son torse et faisant les cent pas dans la chambre. Son souffle s'accéléra alors qu'il repensait à cet instant dont son père parlait. Ce moment qu'il enfouissait le plus loin possible dans son esprit. Il n'avait guère envie d'y repenser et que son père lui en reparle n'aidait pas vraiment.

Laban observa en silence son fils en train de faire des allers-retours dans cette chambre, le visage fermé, l'air sombre. Il n'aimait pas spécialement le voir ainsi... Quel parent aimerait voir son enfant ainsi ? Mais à ses yeux, Sheraz devait lutter contre ce noir souvenir pour s'en libérer. Il devait y faire face s'il souhaitait pouvoir utiliser ses pouvoirs librement comme tout bon Djinn.

Après quelques minutes, Sheraz finit par prendre une grande inspiration pour finalement se stopper net avant de se tourner vers son père pour le fixer silencieusement. Laban haussa un sourcil sans vraiment comprendre ce qui était en train de se passer dans la tête de son cher fils... Mais dans le fond, essayer de savoir ce à quoi pensait un Djinn était peine perdue, leurs esprits étaient de véritable dédale sans fin. Au grand damne de ceux osant s'y aventurer.

— « Je... je pourrais me laisser aller à ces moments de débauche... lorsque je ne risquerais plus de réduire en charpie la personne qui m'approchera et me touchera... »

Laban afficha un petit sourire amusé. Sheraz s'inquiétait bien plus pour les autres qu'il ne voulait le faire croire. Bien sûr, l'origine de cette peur était encore plus sombre, mais cela restait un bon début pour amorcer un changement. Laban lui fit signe d'approcher tout en tendant les mains en direction du poignet portant le bijou. Lorsqu'il fut à sa portée, il lui retira doucement la pierre de contrôle tout en le regardant dans les yeux.

— « Il faut déjà que tu t'habitues à vivre sans ça... Ne la porte que lorsque tu te sens proche de ta limite... Lorsque tu sens que tu peux devenir un danger, pour toi ou pour les autres. »

Sheraz se mordit les lèvres alors qu'il ne sentait plus la pierre absorbant ses pouvoirs, les canalisant. Son souffle s'accéléra et son cœur se mit à pulser plus fort. Laban sentit la détresse monter peu à peu. Il vit le regard de Sheraz s'agiter comme s'il cherchait un point d'ancrage. Sans prévenir, Laban vint saisir le visage de son fils de ses mains, venant coller leurs fronts.

— « Calme-toi, respire, tout va bien... »

Sheraz ne comprit pas tout de suite ce qui était en train de se passer, mais les mains chaudes et la voix apaisante de son père lui permirent de se détendre petit à petit. Il finit par souffler doucement, ses tremblements cessèrent. Il releva lentement les yeux pour croiser le regard de son père. Ce dernier se recula tout en lui caressant le visage.

— « Là... Tu vois tu peux y arriver quand tu le veux. Il suffit que tu prennes le temps de te calmer, de te recentrer sur toi. »

— « Plus facile à dire qu'à faire... Surtout au beau milieu d'un cataclysme. »

Laban acquiesça, il le savait parfaitement, mais Sheraz devait absolument s'entraîner pour ce genre de situation. Le danseur regarda à nouveau son poignet devenu léger sans le bijou. Il devait avouer que ne plus le porter était quelque chose d'agréable, mais la peur de perdre le contrôle ne cessait de grandir. Même si son père l'avait aidé à se calmer là, il savait parfaitement qu'il ne serait pas tout le temps à ses côtés... ça n'était pas le genre de Laban, plutôt du genre nomade.

Alors qu'il était perdu dans ses pensées, Laban attira son attention en s'installant en tailleur sur le lit. Il lui fit signe de le rejoindre ce que fit Sheraz en haussant un sourcil. Il s'installa dans la même position que son père sans en comprendre le but, mais cela l'intriguait.

— « Je sais que je ne suis pas le meilleur des pères. Mais malgré tout, je peux te donner quelques techniques pour canaliser un minimum ta puissance grandissante. »

— « Pourquoi ne pas m'avoir appris cela plus tôt ? »

— « Tu n'étais pas l'élève le plus discipliné il faut dire. »

Sheraz se mordit les lèvres tout en levant les yeux au plafond. Il fallait avouer qu'il était plutôt du genre à courir partout sans écouter personne. Enfin bien sûr, cela c'était avant cette soirée noire qui suivait une énième disparition de son père. Laban remarqua à nouveau le changement d'expression et vint claquer des doigts devant les yeux de son fils pour le ramener à la réalité. Sheraz cligna des yeux à plusieurs reprises, mais il se reconcentra rapidement sur son père.

— « Pour l'instant on va faire en sorte que tu canalises et maîtrises tes pouvoirs sans avoir de pierre à portée de main. Ferme les yeux, essaye de visualiser ton pouvoir. Nous avons tous un élément avec lequel on se sent... comment dire... »

— « En symbiose ? »

Laban acquiesça vivement, un sourire sur les lèvres puis il ferma les yeux à son tour pour rejoindre son fils dans la méditation. Sheraz haussa les épaules, mais obéit à son père, pas vraiment convaincu que faire cela l'aidera pour quoi que ce soit.

Les minutes passèrent avant que la porte s'ouvre à nouveau, mais les deux hommes étaient bien trop concentrés pour s'en rendre compte. Ils ne se rendirent pas compte de la silhouette s'approchant d'un pas lent d'eux.

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