Disclamer : les personnages appartiennent à Quantic dream et sont issu du jeu vidéo Detroit become human.
*****
L'attrape-rêve
La vieille voiture semblait avaler les kilomètres avec une voracité étonnante pour son grand âge, alors que quelques timides flocons de neige venaient s'amuser à virevolter devant le pare-brise, étoiles glaciales venant s'écraser sur le verre sale sous le regard lointain d'un RK800. La machine observait ces premiers signes d'un hiver redoutable que les essuies glaces venaient chasser sans le moindre scrupule, effaçant toute trace de leur existence tout comme l'humanité avait balayé toutes preuves de vie déviante d'une simple impulsion.
Pourtant, dans la lueur blafarde de cet après midi neigeuse, les flocons revenaient sans cesse. Et leur nombre, petit à petit, conduisait l'hostile véhicule à ralentir sa vitesse tandis que leurs cadavres s'amoncelaient sur le rebord du capot et commençaient à blanchir les alentours. Les yeux chocolatés de Connor se reportèrent sur l'attrape-rêve qui dansait au grès des cahotements de la voiture sur la route. Les plumes de pigeons attachées à l'étrange structure semblaient lutter contre leurs chaînes en ficelles de fortune et en lacets de chaussures pour tenter de s'envoler une nouvelle fois, mais en vain. L'objet avait été fait à la main, et les cercles de bois qui le composaient été gravés d'étranges symboles que seul son alter ego à l'arrière pouvait comprendre. Le limier ne pouvait détacher ces yeux de ces emblèmes qui lui rappelaient le journal crypté qu'il avait découvert chez Rupert : l'enquêteur en lui était frustré de ne pas parvenir à les comprendre, mais le déviant qui lui faisait écho trouvait fascinant ces dessins si intriqués, ce langage secret que l'ancien fermier avait développé pour communiquer avec sa propre folie.
« Je voulais capturer des rêves. Mais ça ne marche pas. Je crois que les androïdes ne peuvent pas rêver. Mais j'en ai fait un pour Gavin, une fois. Tu sais, depuis la bombe, il faisait beaucoup de cauchemars. Je voulais les chasser. Tu crois que les humains peuvent rêver encore, toi? »
Les yeux du traqueur de déviants se posèrent sur le rétroviseur de la voiture. Rupert ne le regardait pas. Il avait juste senti la curiosité de l'androïde, par cette étrange capacité qu'il avait à percevoir le monde de façon mystérieuse et instinctive, presque animale. Il parlait d'une voix distraite, alors qu'il observait le paysage défiler de ses yeux marrons, faisant jouer rêveusement ses mains sur la buée de la vitre de la voiture. Ses longs doigts dessinaient encore ces formes que le limier ne comprenaient pas, valsant librement sur le verre froid, patineurs secrets entre deux mondes. Connor reporta son attention sur les flocons insolents. Il choisit de ne pas répondre à Rupert. Cela n'aurait servi à rien. Il était déjà bien trop endommagé. Étranger à ces échanges sibyllins entre les deux androïdes, Hank les observait en silence, réprimant un soupir consterné devant la réaction froide de son ancien coéquipier.
Ils roulaient depuis deux bonnes heures, et durant tout ce temps, Connor n'avait pas dit un seul mot. Même lorsque le vieux lieutenant les avait retrouvés, comme prévu, deux rues derrière le commissariat. Même lorsqu'il avait démarré la voiture sous les instructions de Rupert et même lorsque, ému, il s'était arrêté quelques kilomètres plus loin en bordure de la ville, dans un coin isolé, pour faire sortir du coffre le déviant actuellement le plus reconnaissable de tout Détroit.
La réaction glaciale de l'androïde avait soufflé un froid polaire sur la faible lueur vacillante des espoirs de Hank. Le RK800 semblait toujours sur la défensive, prêt à s'enfuir ou à attaquer au moindre faux pas, tel un animal sauvage acculé. Ses yeux autrefois si curieux se posaient sur le monde avec méfiance, semblant toujours chercher un chemin détourné pour s'enfuir ou un angle d'attaque. Le traumatisme de la bombe avait atteint le jeune déviant au fin fond de son être, comme en témoignait cette lumière rouge, sur sa tempe, qui n'en finissait pas de tournoyer violemment dans des teintes sanglantes, cachée sous le bonnet noir, mais toujours là, toujours présente, incapable de s'apaiser comme la colère et la peine de son ami. Comme Hank la détestait, cette couleur criante de douleur et dangereuse, indomptable, qui refusait de lui laisser le moindre repos, témoin muet mais manifeste d'une peine silencieuse et d'une rage insondable. Il aurait tout donné pour retrouver une touche d'azur sur le visage de l'androïde. Juste un signe d'apaisement, un bleu cicatrisant et tendre, comme un pâle sourire sur le visage d'un malade. Mais non, le rouge dominait, toujours, et ne s'éteignait jamais.
VOUS LISEZ
"Frontières" [DBH]- fic terminée
FanfictionHistoire axée principalement sur Connor et Hank. Ils y croyaient vraiment, ces foutus robots, à leur révolte et à leur rêve d'égalité? Mais qu'ils étaient naïfs! les choses ne se passent jamais comme ça, avec les humains... Non, ils ne sont pas enco...