-Bonjour Joyce, je suis le docteur Caldwell et voici l'infirmière Silva. Nous allons prendre soin de vous...
Simon éclaire l'œil droit de Joyce avec sa petite lampe puis le gauche à fin d'évaluer ses réflexe rétiniens. Il prend son pouls et sa tension tandis qu'elle ne bouge pas d'un cil, les yeux fixants le plafond, comme morte.
-Est-ce que vous comprenez ce que je dis? M'entendez vous Joyce?
Il a l'habitude de ce genre d'état de sidération chez ses patients atteints de troubles mentaux, mais il ne peut s'empêcher de penser au fait qu'il y a quelques jours à peine, cette jeune femme était interviewée dans l'émission la plus célèbre du pays pour la sortie de son livre.
Les policiers leurs ont expliqué la situation, à lui et sa collègue, avant qu'ils ne viennent la voir.
Ils sont intervenus dans l'appartement de Joyce et sa compagne après avoir été prévenu par les familles de ses deux dernières qu'ils n'avaient plus de nouvelles depuis trois jours.
Lorsqu'ils sont entrés après avoir défoncé la porte qui était verrouillée de l'intérieur, ils ont trouvés Joyce, assise sur le lit dans sa chambre, nue et couverte de sang, avec à ses côtés le cadavre de sa compagne au visage mutilé. Joyce fixait le corps torturé et ensanglanté d'un homme, accroché au mur face à elle.
Ils disent n'avoir jamais vu quelque chose d'aussi morbide et atroce. L'odeur qui se dégageait de la pièce était immonde et lorsqu'ils ont neutralisé Joyce elle s'est totalement laissée faire, comme une poupée de chiffon.
Depuis son arrestation et jusqu'à cet instant, elle n'a pas dit un mot.
Les parents de Joyce ont été prévenu mais pour l'instant il leur est interdit de voir leur fille et en ce qui concerne la famille de Constance, la mort de la jeune femme leur a été annoncée mais le policier a prit soin de garder pour l'instant les détails les plus atroces pour lui.
Personne ne sait encore ce qu'il s'est passé, il va falloir attendre l'identification de l'homme, les autopsies, l'enquête et surtout que Joyce se décide à parler.
-Avez vous soif Joyce? Ou faim peut être?
Comme il s'y attendait, aucune réaction.
Il fait un signe de tête à Adèle qui attrape le plateau et le pose sur la table près du lit.
-Il va falloir que vous mangiez...
Rien.
-Si vous ne vous décidez pas à le faire vous même nous allons être contraint d'utiliser une sonde et croyez moi ce n'est pas ce qu'il y a de mieux.
La jeune femme ne réagit absolument pas. Il se tourne vers l'infirmière:
-Bon va la chercher, mais juste pour la réhydratation pour l'instant.
-D'accord.
Et aussitôt elle sort.
Simon s'apprête à se lever lorsque la voix faible de sa patiente le fige sur place.
-Vous avez lu mon livre n'est-ce pas...
Il met quelques secondes avant de retrouver l'usage de la parole:
-Je... oui... comment...?
-Je l'ai vu dans vos yeux quand vous êtes entrés.
Son ton est calme et neutre, ce qui me surprend au plus au point mais il se doit de rester professionnel:
-Que vous est-il arrivé Joyce? Que s'est-il passé?
Pour la première fois elle cesse de fixer le plafond et vient plonger ses pupilles dans les siennes:
-Je l'ai tué. Je l'ai torturé puis je l'ai tué.
-Mais... qui était-il? Pourquoi... avoir fait une telle chose?
A cet instant Simon est presque heureux qu'elle soit maintenue au lit par des sangles de sécurité.
-Je croyais que vous aviez lu mon livre... et vous ne devinez pas?
-S... Sean?
Elle hoche doucement la tête.
Il reste muet de stupeur. Quoi? Comment? Pourquoi? Tant de questions s'entrechoquent dans sa tête. Mais soudain le son des pas d'Adele qui revient dans la chambre le fait sursauter. Il regarde sa collègue.
-Elle a dit quelque chose?
Il tourne de nouveau son visage vers Joyce qui est redevenu le semi-cadavre s'il y a quelques minutes. Et pour une raison qui lui échappe lui même il répond:
-Non... rien du tout.
