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J'ai couru jusqu'à en avoir mal. J'aurais voulu tout effacer.

J'ai raconté à mes parents que je m'étais endormie sur un banc, et qu'à mon réveil, mon manteau, mon écharpe et mon sac avaient disparus.

C'est la première chose qui m'est passée par la tête, parce qu'au fond de moi, j'espérais que toute cette affaire n'était qu'un cauchemar.

Et évidemment, je me suis faite défoncer.

Mes parents m'ont dorénavant interdit de sortir me promener le soir. Ils avaient peut-être raison depuis le début.

J'ai été idiote après tout.

Mais je ne réussissais pas à sortir ce garçon de ma tête. Je pensais à lui tout le temps, et partout où j'allais, je m'attendais à le voir surgir d'un coin de rue et se jeter à mon cou.

Mais il s'était apparemment volatilisé.

Pourtant, je l'ai cherché. Je ne pouvais pas me résoudre à l'abandonner, pas après ce qu'on avait vécu ensemble.

Après quelques semaines, je me suis rendue chez lui.

Et devinez qui m'a ouvert...

Un vieux bonhomme qui venait tout juste d'emménager, avec ses vingts et quelques chats.

J'étais désespérée, à tel point que je me demandais si ce n'était pas moi qui avais tout inventé...


Ma petite vie simple a donc repris son cours, et j'ai enchaîné nuits blanches et réveil difficile, bus bruyant, cours, cantine insipide, devoirs, loisirs et disputes de famille. Tout ce qu'il y a de plus ordinaire.

J'ai remballé mes rêves et mon espoir et j'ai fait le mouton. Oui, un bête mouton qui vivait comme tout le monde. Une adolescente normale, ce qui fait de moi une personne banale.

Je ne sais même pas pourquoi je vous dis tout cela. Vous devez me prendre pour une gamine capricieuse et pourrie gâtée. La vie d'Isaac, elle, est animée. Mais jamais je ne voudrais la vivre.

Je n'ai pas de problèmes de santé. Ma famille va plutôt bien. Je ne suis pas exclue de la société.

Et au moins, je n'étais plus en danger. Mais qui étais-je, au final ?

J'avais l'impression de ne servir à rien, de n'aider personne, et je ne trouvais pas de but dans la vie pour me tirer du lit le matin, avec un grand sourire et des résolutions plein la tête pour affronter le monde. Je me levais, juste parce qu'il fallait se lever.

J'avais perdu la motivation, jusqu'au goût de vivre.

Mes parents s'en sont rendus compte, et ils ont bien été obligés de me raccorder le droit de sortir le soir, pour m'éviter la dépression.


La première fois que j'ai remis les pieds dehors à la tombée de la nuit, j'étais vraiment troublée. Je me suis sentie étrangère à ce quartier sombre, à ces magasins fermés que j'entrevoyais dans la faible clarté des réverbères, à ce calme revenu. C'était comme si les rues retenaient leur souffle, tandis que j'arpentais ces lieux pourtant familiers que je devais réapprendre à connaître. Mes pas se faisaient hésitants, je ne savais pas où aller... tout me paraissait vide de sens, malgré le fait que je sois heureuse de respirer à nouveau l'air frais du soir, en me confondant entre les silhouettes inconnues.

Mon moral augmentait peu tandis que les jours passaient à une vitesse folle, me projetant dans un voyage languissant à bord d'un train de plus en plus rapide. Je voulais m'arrêter, changer de station, mais elles s'éloignaient toutes lorsque je tendais la main. J'étais vissée à mon siège et je regardais le paysage défiler, impuissante. De toute façon, où aurais-je pu aller ?

Et à présent, combien de temps est passé ? Des mois, un an ?

Virée nocturneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant