Il retourne s'agenouiller près des nombreuses branches au sol et essaie de repérer les plus longues.
Il porte une ceinture en cuir noire sensé retenir son jean mais le tee-shirt ne suffit pas à couvrir le bas de son dos.
Sa peau est étonnement bronzée pour un mois de Décembre. Je repense au treillis qu'il portait et à cette médaille dans sa voiture, si tant est que ce soit la sienne. Se pourrait-il que...
- Alors, tu te décides à m'aider ?, m'appelle-t-il.
J'inspire et expire plusieurs fois afin de calmer les battements de mon cœur et finis par le rejoindre, les poings encore serrés.
Être si près de lui, et sentir l'adrénaline dans mes veines me rappelle Max, ce personnage qui pouvait seulement s'ébahir de la beauté de sa patiente. Je dois m'écarter lorsque nos genoux s'entrechoquent. Finalement, je me débarrasse de ma veste que je jette sur une chaise avant d'essayer de repérer les numéros sur les branches sensés représenter les différents étages du sapin.
- D'accord, alors on va de 12 à 1.
- De 13 à 1, me corrige Spencer.
- On n'est pas rentré, soufflé-je en pensant au travail qui m'attend chez moi.
- Je peux le faire seul si tu as autre chose de prévu.
Une branche piquante entre les mains, je lève la tête pour le regarder :
- Quoi ?
- Tu as sûrement mieux à faire de ta journée.
- Pas vraiment, avoué-je en haussant les épaules.
Je jette ma branche numéro 9 avec les autres et m'étonne du fait que pour une fois, j'ai envie de rester avec un véritable être humain plutôt que de rejoindre le monde imaginaire.
- Mais toi, si tu veux, tu es libre de partir, dis-je à contre-coeur.
- Il n'y vraiment aucun autre endroit où je voudrais être, me sourit-il en se rapprochant.
Un violent frisson me parcourt l'échine lorsque nos doigts se touchent alors que nous attrapions la même branche. Il me la tend et je lui souris avant de la superposer aux autres. Un simple contact et me voilà propulser dans le plus dingue des romans que j'ai jamais lu.
- Alors tu... tu n'as pas de projets pour le soir du Réveillon ?, tenté-je maladroitement.
- Aucun, et toi ?
- En fait, j'essaie d'échapper à ma famille, dis-je très sérieuse mais avec une voix de conspiratrice.
Ma mâchoire se crispe lorsqu'il s'approche encore un peu plus de moi. Si près, que nos nez se touchent. Il plonge son regard dans le mien, totalement inconscient de l'effet qu'il produit sur moi. Je tords la branche qui se trouve entre mes mains lorsqu'il prend le même ton conspirateur. Il regarde d'abord tout autour de nous mais nous sommes cachés par les boites et la structure en métal du sapin. Son haleine sent le café et je me perds dans le bleu de ses yeux. Je repense à ses mains qui me tenaient fermement par la taille quelques minutes plus tôt et au fait que je n'aurais qu'à me pencher très légèrement pour que sa barbe me pique les lèvres.
- Moi aussi, finit-il par souffler.
Je plisse les yeux, croyant qu'il plaisante mais il se retire aussi vite qu'il est venu et reprend le tri dans les branches.
Alors Spencer cherche lui aussi à fuir sa famille mais tout comme moi, il ne veut pas avouer pourquoi.
Les branches sont vissées une à une au tronc d'acier. Spencer a le temps d'en placer cinq que j'en suis encore à ma première. Il les fait tourner deux par deux et nous montons le sapin plus rapidement que je ne l'aurais pensé grâce à lui. Je bloque sur ses mains calleuses mais très agiles. Les branches tournent dans un sens puis dans l'autre, Spencer jongle avec aisance entre les vis et les boulons alors que mes bras me font souffrir après seulement trois branches artificielles. Celles-ci doivent peser plusieurs kilo, ce qui ne semble pas gêner Spencer. Alors que je suis agenouillée pour terminer ma rangée, il se dresse fièrement au-dessus de moi et se grandit davantage pour monter le sapin dans toute sa hauteur.
D'ici, je peux voir sous son tee shirt blanc. Toutes les filles de la salle rêveraient d'être à ma place et je traîne volontairement pour m'attarder à ses pieds. Son jean tombe sur ses hanches et dévoile la naissance de son pubis musclé et proéminent en forme de V. Si je tenais un éventail à la place de ce stupide bout de plastique, ça me serait vraiment très utile. Je suis la ligne de poils blonds qui remonte jusqu'à son nombril et me perds dans les courbes de ses abdominaux.
- Après ça sera trop haut pour moi, déplore-t-il.
- T'en es sûr ?, demandé-je avec l'espoir d'en voir un peu plus.
Mais déjà le tee shirt retombe sur ses hanches. Il me tend une main pour m'aider à me relever mais ne la lâche pas. Un peu gênée, j'essaie de reculer mais il tient fermement mes doigts serrés dans sa paume moite.
Je l'interroge du regard alors qu'on dirait qu'il m'invite à danser. Son torse se soulève rapidement. Il est en nage alors que je n'ai pratiquement pas aidé... mon imagination me joue des tours et j'ai passé tout mon temps à fantasmer sa vie. Plus je le regarde et plus il m'intrigue. Plus je réfléchis à ce qu'il m'a dit sur sa famille et plus je me pose des questions.
- Prête à réessayer ?, me demande-t-il en tentant de reprendre son souffle.
Je grimace en lançant un coup d'œil à l'escabeau.
- Il n'en manque plus que cinq, dit-il pour m'encourager. Et je te tiens si ça peut te rassurer.
Me rassurer, je ne sais pas mais me faire frissonner c'est certain.
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Love War
RomanceClay ne croit pas en l'amour, sauf celui qui est décrit dans les livres qu'elle dévore. Critique littéraire pour un grand magazine féminin, elle se perd dans la fiction et s'éloigne peu à peu du monde réel. Heureusement, il y a une tradition dans sa...