Brindille - Partie 2

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Milo la laissa faire, en profitant pour laisser couler son regard sur son doux visage. Elle avait l'air si pure, si innocente. Contrairement à ses camarades qu'il avait croisées en arrivant, elle n'avait rien de superficiel. Si l'on ajoutait à tout cela sa fragilité apparente, elle avait le profil parfait du souffre-douleur.

Une fois son opération terminée, elle releva la tête, un sourire satisfait sur les lèvres, comme si elle était enfin libérée de ses chaines. Mais son sourire disparut quand elle se rendit compte de leur proximité. Elle sursauta, recula et se cogna l'arrière de la tête au mur. Elle étouffa un grognement de douleur en fermant les yeux puis senti une main se poser sur l'endroit de l'impact.

Milo riait.

- Il faudrait apprendre à t'habituer aux autres humains sinon tu risques de souvent te blesser.

Il ponctua sa déclaration d'une légère caresse dans ses cheveux.

Et contrairement à ce qu'elle aurait pensé, elle ne le laissa pas faire. Quelque chose en elle monta. Quelque chose de puissant, comme de la colère. Presque de la haine. De quel droit osait-il la toucher ? Son cœur s'emballa, ses joues rougirent et elle le repoussa brusquement avec une force qu'elle ne se connaissait pas. Il alla à la rencontre du mur opposé. La stupéfaction se peignit clairement sur ses traits et il ouvrit la bouche pour parler mais fut interrompu par Marie.

- Ha ! C'est donc ici que tu te cachais, Brindille !

Milo et Ana tournèrent la tête en direction de Marie qui fonçaient vers eux, accompagnées de ses deux acolytes, Kate et Alyson.

Elle passa un bras autour des épaules d'Ana et s'adressa à Milo.

- Tu dois être le nouveau dont mon père m'a parlé. Je vois que tu as fait la connaissance de notre amie Ana. Brindille pour les intimes.

Encore sous l'effet de la colère envers Milo, Ana se dégagea de l'emprise de Marie.

Cette dernière leva un sourcil, sourit à Milo pour se donner une contenance et s'empressa de reprendre Ana sous son aile.

- Où tu vas comme ça ? Il va finir par croire qu'on se déteste.

Milo regarda la scène se dérouler sous ses yeux avec un certain détachement. Il enfonça ses mains dans ses poches.

- Je suis Marie, dit l'intéressée.

- Milo.

Ana détourna le regard et se prit d'admiration pour ses baskets. Il faudrait peut-être qu'elle investisse dans des nouvelles. Celles-ci étaient un peu trop déchirée et la semelle menaçait de la lâcher d'une semaine à l'autre. Pourquoi pas des baskets plus fines, moins blanches, plus solides et...

- Brindille ! Oh, on te parle !

La voix sèche et dure de Kate la ramena à la réalité.

Alyson tendait sous son nez un billet.

- Ça te dit d'aller nous chercher quatre boissons fraîches ?

Enfin un moyen de s'échapper. Elle oublia que la sonnerie allait retentir, releva son sac sur son épaule et s'empara du billet sans demander son reste et sans un regard. Elle savait ce qui allait se passer en son absence : Marie allait se rapprocher de Milo, lui faire son petit numéro de charme, l'attirer de son côté et ajouter un complice à tous ses coups fourrés. Cette idée exaspéra Ana dans un premier temps puis elle haussa les épaules. En quoi cela la regardait-elle ? Huit mois... Puis c'était fini. Elle partirait loin.

Au moment où la quatrième boisson tomba dans le ventre du distributeur, la sonnerie retentit, la faisant sursauter. Elle s'empara de la dernière canette et fonça vers sa classe de cours.

Elle arriva à bout de souffle, la gorge aride. Tous les étudiants de sa classe y attendaient déjà et elle dut les traverser pour atteindre le groupe de Marie dans le fond.

Elle s'étonna de les voir s'écarter sur son passage. Cela ne lui était jamais arrivé auparavant. Elle avait toujours eu l'habitude de demander pardon, voir de pousser puis de se faire hurler dessus et traiter de maladroite. Mais en ce jour, ils la laissaient passer et en réalité, elle aurait préféré les bousculer que de sentir tous ces regards la scruter de fond en comble.

Une fille commenta son jeans qui la moulait un peu trop, un garçon admira son décolleté, une autre fille la jugea un peu trop hautaine.

Bon sang mais qu'avait-elle fait pour mériter tant de mépris ?

- Tu as pris ton temps, nota Marie.

Ana l'ignora, lui tendit trois canettes. Elle s'en empara puis tendit à nouveau la main, la secoua devant son manque de réaction.

- Et la quatrième.

Ana papillonna des yeux puis secoua la tête en se penchant à nouveau dans son sac. Qu'avait-elle donc cru. Jamais Marie ne lui avait offert même une gorgée d'eau alors pourquoi, en ce jour, lui offrirait-elle une boisson ?

Elle lui tendit l'objet convoité et à peine fut-il posé au creux de sa main qu'elle fut transférée dans celle de Milo qui la prit sans rechigner. Ana le dévisagea. Il n'avait eu aucune réaction face à cette injustice.

Il ouvrit la canette dans un bruit d'air enfin libéré. Quelques gouttes s'échappèrent et se déposèrent sur sa main. Il déplaça sa canette dans l'autre main, porta la première à sa bouche pour en absorber le corps étranger d'une aspiration bruyante puis rejeta la tête en arrière pour boire la boisson à grande gorgées. Au fur et à mesure que sa pomme d'Adam montait et descendait, le monde autour d'Ana s'effaça sans qu'elle ne s'en rende compte. Cette posture la captiva et elle fit un pas en avant lorsqu'une goutte du liquide frais s'échappa par la commissure des lèvres du jeune homme pour descendre le long de son cou. Lorsqu'elle se rendit compte qu'elle mourrait d'envie d'aller la cueillir du bout des doigts, Ana fut brusquement rappelée à la réalité par son esprit rationnel. À quoi pensait-elle, bon sang ?

Elle secoua la tête et croisa par la même occasion le regard désapprobateur de Marie.

Pas touche ! 

Amours de jeunesse - RecueilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant