Ours Brun - Partie 6

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Elle redoutait le moment où elle allait à nouveau franchir le bureau de son patron. Cela exigerait énormément de courage.

Lorsqu'elle fit son premier pas dans la pièce, tout sembla se passer au ralenti.

Le beau-père de Seth ne s'était pas contenté d'être seul. Il était appuyé sur l'avant de son bureau, l'air sévère et intransigeant. Et à sa gauche, dans le portrait opposé, se tenait son épouse, frêle et pâle, légèrement souriante, comme pour la rassurer.

- Prenez place, Noa.

- Je préfère rester debout, dit-elle en avalant difficilement sa salive.

Il ne cilla pas, se contenta d'accepter ce petit acte de rébellion. Il posa le bout de ses cinq doigts sur une feuille de papier.

- Voilà le contrat que je vous propose. Il reprend la somme que je suis prêt à vous verser et je vous garantis un poste dans une entreprise dès la sortie de votre cursus, avec le salaire non-négligeable. Il est évident que si vous ne respectez pas les termes, vous pouvez dire adieu à toute vision d'avenir.

Il déposa un stylo à côté de la feuille.

Pendant ce temps, Noa n'avait pas lâché son regard, observant la moindre faille dans son attitude glacée. Elle ne prit même pas la peine de jeter le moindre coup d'œil au contrat mais prit la feuille et la déchira sous les yeux effarés de l'épouse. Elle couvrit sa bouche de sa main, comme si Noa venait de faire la pire erreur de sa vie.

Mais Noa ne regrettait pas et ne le regretterait jamais, elle le savait.

Monsieur Fievez eut un sourire en coin et prit son téléphone pour composer un numéro. De toute évidence, il avait prévu sa réaction et avait un plan B.

- Seth ? Peux-tu venir dans mon bureau, s'il te plait ?

Un puissant frisson parcourut l'échine de la jeune fille. Elle redoutait ce qui allait arriver.

Seth frappa de trois légers coups sur la porte puis entra selon l'ordre de son beau-père. Il resta à côté de la porte, à une certaine distance de Noa.

- Seth, peux-tu expliquer à Noa les raisons pour lesquelles elle devrait signer ce contrat, dit le patron en sortant un nouvel exemplaire.

Seth leva les yeux du sol et regarda Noa, les yeux emplis de douleur.

- Tu ne devrais pas passer à côté de ton futur pour moi, Noa.

- C'est vraiment ce que tu veux, Seth ? demanda-t-elle douloureusement en faisant un pas vers lui.

Il recula contre la porte.

- Fais ce qu'il dit.

- Je refuse ! S'exclama-t-elle en haussant la voix comme la colère montait en elle.

- Mademoiselle Noa, si je puis me permettre, dit alors Madame Fievez. Vous ne voudriez pas vous voir privée de votre avenir parce que vous refusez de laisser notre famille tranquille. Vous risquez de détruire toute une famille.

Noa ne tenait plus. Tout cela n'avait aucun sens et la colère lui fit monter les larmes aux yeux.

- Vous êtes la mère de Seth ! Comment pouvez-vous laisser votre fils se faire taper dessus par ce monstre ? Je ne sais pas lequel des deux est le pire ! Et je suis presque certaine qu'il n'est pas le seul sur qui il frappe.

Noa n'avait manqué de remarquer l'absence de décolleté, les longues manches et le long pantalon de Madame Fievez malgré la chaleur qui régnait.

- Noa vous commencez à dépasser les bornes, dit calmement son patron.

- Je vous demande pardon ? Je dépasse les bornes Vous êtes-vous seulement remis en question une seule fois pour vous rendre compte que c'est vous qui dépassez totalement le respect de l'être humain. Qu'est-ce qui vous autorise à lever la main sur Seth? Ou même sur votre femme ou n'importe qui d'autre ?

- Seth n'est pas le petit ange que vous vous imaginez ! Il a besoin d'une petite correction de temps en temps !

Monsieur Fievez commençait à hausser la voix. Noa jubilait. Les barrières s'effondraient.

- Qui vous donne le droit de penser à ma place ? Je vois sans doute Seth sous un meilleur jour que vous. Je pense que le problème, c'est qu'il vaut mieux que vous et qu'en réalité il est bien plus fort que vous. Mais vous avez préféré le casser, le détruire, aussi bien physiquement que moralement. Parce qu'il ne faut pas être psy pour deviner qu'il souffre et qu'il n'oserait pas riposter. Il pense au bien-être de sa mère et de son petit frère avant tout. Comment voulez-vous avoir du courage quand on vous a détruit? Vous êtes un monstre !

- Je fais ça pour son bien !

Noa eut un rictus de dégoût.

- Ne me prenez pas pour une idiote. Je sais parfaitement que vous compensez votre impuissance en tant qu'homme par la violence. La preuve en est que vous vous sentez homme en frappant votre femme. Un homme, un vrai, en prendrait soin comme d'un objet précieux. Mais vous en êtes incapable puisque vous n'êtes pas un homme !

Sur ses mots, il se redressa et avança vers Noa qui ne broncha pas. Seul Seth fit un pas en avant mais s'arrêta quand son beau-père lui en intima l'ordre d'un seul regard.

- Vous allez immédiatement partir de cette maison et vous pouvez dire adieu à votre argent, siffla-t-il.

Elle plissa les yeux, le défiant.

- Je ne vais certainement pas partir. La police sera ici d'une minute à l'autre.

Monsieur Fievez devint soudain rouge et sa main se leva pour s'abattre sur la joue de la jeune fille qui tomba au sol sous ma violence du coup.

Ses oreilles sifflaient et elle crut discerner quelques injures avant qu'un coup de pied ne vienne s'écraser avec une force brutale contre ses côtes. Des étoiles lui brouillèrent les yeux un bref instant.

La bouche de son patron ne faisait plus que de déverser un flot d'injures.

Elle se releva avec peine puis lui sourit d'un sourire vainqueur. La main de l'homme se leva une nouvelle fois et allait s'abattre quand elle fut stoppée dans son élan.

Noa leva les yeux sur Seth. Un Seth en colère. Il serrait tellement fort son poignet que ses jointures en étaient blanches. Il en avait mis du temps à réagir !

- Ne la touche plus !

- Sinon quoi gamin, tu vas ...

Le coup de poings de Seth en plein estomac l'empêcha de continuer sa phrase. 

Amours de jeunesse - RecueilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant