Chapitre 1

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Les cliquetis cadencés de la pendule murale raisonnaient lourdement dans la pièce. Ces bruits habituellement anecdotiques et quasiment inaudibles étaient aujourd'hui la source sonore principale dans l'anti-chambre paralysée par la nervosité. Des tics-tacs qui battaient régulièrement et inlassablement, matérialisant un temps désespéramment long.

Autre rythme incessant mais beaucoup moins insensible, le talon de mon père. Martelant inconsciemment le sol avec l'énergie de l'anxiété, le bruit de la semelle royale était néanmoins étouffée par l'épaisse moquette qui tapissait la salle.

Le roi était assis sur un siège près du mur. Loin de se reposer sur les accoudoirs ou le dossier capitonnés, l'homme quarantenaire était courbé vers l'avant, les avant-bras sur les cuisses et la tête rivée vers le sol. Son talon gauche pilonnait le sol depuis déjà de longues minutes sans interruption, tandis que le reste de son corps demeurait immobile.

Assise non loin de lui, je m'efforçai de faire abstraction de ces bruits angoissants et cherchait à occuper mon esprit, mais l'ambiance de l'anti-chambre n'aidait pas : la pièce était exiguë, les lourds rideaux tirés pour nous plonger dans une obscurité quasi-totale, la chaleur pesante et l'ameublement austère.

Après ce qui me parut une éternité, l'une des deux portes de la petite pièce s'ouvrit, ne laissant passer qu'une faible lueur de quelques chandelles lointaines. Un homme imposant passa par l'embrasure de la porte et referma aussitôt le battant derrière lui. Mon père releva brusquement la tête et, reconnaissant le nouveau venu, se mit sur ses pieds en le dévisageant.

"Alors ? se hâta-t-il de demander d'une voix rauque.

- La Reine souffre d'un mal très rare Votre Majesté, répondit son interlocuteur d'un air sombre. C'est une mutation avancée de certaines anomalies respiratoires, et qui peut être un signe de problèmes plus graves. Nous appelons cela l'hémoptysie.

- Que pouvons-nous faire face à cela ?! s'écria le souverain, le regard plongé intensément dans celui du diagnostiquant.

- Malheureusement les Invits n'ont jamais trouvé un moyen de guérir durablement cette maladie. Les rares fois où elle se manifestait chez un des nôtres, nous ne pouvions qu'atténuer leurs souffrances et repousser l'inévitable de quelques semaines, mois tout au plus."

Ma tête se mit à tourner. M'agrippant à mon siège pour ne pas défaillir, je ne pouvais m'empêcher d'imaginer le pire...

"Vos Majestés, reprit l'Invit en constatant nos réactions dévastées, notre civilisation souterraine et restreinte est loin d'être la plus expérimentée en médecine. Je comprends que vous m'ayez sollicité en premier en tant que personne sur place et guérisseur de ma communauté, mais je suis persuadé que certains professionnels hyruliens sauront vous apporter plus de solutions que moi. Il est certain que la vie de la Reine peut être sauvée par un moyen."

Face aux propos quelque peu rassurants de l'homme, je parvins à retrouver mes esprits. Mais en levant le regard vers mon père, je vis que ce dernier ne parvenait pas à prendre en considération les dernières paroles de notre interlocuteur, toujours figé d'horreur suite à la conclusion morbide faite concernant la santé de son épouse.

- Père je vous en prie, Sire Irinimus pourrait avoir raison : consultons d'autres avis, nous pourrions bien finir par trouver des pistes pour que Mère se rétablisse ! Ne nous laissons pas abattre par la première tentative, il faut nous battre pour la sauver !"

Entrevoyant l'espoir, je vis le souverain revenir peu à peu à lui pour finir par relever de nouveau le regard sur nous.

"Tu as raison Raphaëlle, me répondit-il avec une apparente maîtrise de soi néanmoins teintée d'anxiété. Je vais faire de ce pas appel à Pru'ha et à Faras, ce sont de grands scientifiques qui ont l'ancienneté et les connaissances nécessaires pour se prononcer sur cette question. Si Hylia le veut, ils seront là dès demain et trouveront un remède. D'ici là nous prierons.

- Pouvons-nous la voir ? demandai-je à Lloyd Irinimus avec espoir.

- Sa maladie n'est pas contagieuse, m'expliqua le chef Invit, néanmoins vu sa fatigue je pense qu'il est préférable pour elle d'être seule.

- Appliquez tous vos savoir-faire pour l'apaiser au maximum, ordonna Link sur un ton décidé malgré ses yeux humides. Utilisez toutes les ressources matérielles et humaines du château dont vous aurez besoin en attendant l'arrivée de Pru'ha et Faras, et prévenez-nous à la moindre variation de son état."

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