Chapitre 2 : Les quatre lettres

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More than a moment – Sophiemarie.b

Mercredi 10 juillet, 15h11
France, Paris
PDV Sky

Assise à mon bureau, je soutiens ma tête avec peine, dans le creux de ma paume. Dans mon autre main, je laisse un crayon de papier s'agiter à sa guise, sur une feuille de papier. Les yeux plantés à travers la fenêtre qui me fait face, je gribouille des traits sans la moindre importance, sans même les regarder se former. Le ciel est dégagé, laissant toute la place nécessaire à mes pensées pour passer en boucle dans mon esprit, sans la possibilité de les arrêter.

Depuis quelques jours, la cassette de toutes mes préoccupations se joue sans répit dans ma tête. Dès que nous sommes arrivés ici, je savais que mes frères n'attendaient qu'une seule chose : retrouver celle que j'étais à Los Angeles. Le problème, c'est que je savais que j'en serai incapable. Depuis notre départ, rien ne pouvais être comme avant. C'était impossible puisque j'avais laissé une partie de moi en Californie. Et ça a été le cas. Je n'ai jamais su redevenir celle que j'étais. Depuis six ans, je vis avec une autre version de moi-même, celle qui est triste, déchirée, brisée.

Tout ce qui avait de l'importance pour moi, n'est plus qu'un lointain souvenir. Mais bien qu'il semble s'effacer avec le temps, il reste le plus douloureux, un de ceux qui à chaque seconde, ravive les plus profondes entailles de mon cœur.

En six ans, il m'est arrivé de penser à lui, celui qui représentait la plus grande constante de ma petite vie. Je voyais son visage, je l'imaginais grandir avec moi mais ce n'était qu'un mensonge. Agréable, certes, mais qui vivait uniquement dans ma tête. Je ne sais pas si c'est ce foutu espoir ou une force sortie de nulle part qui ma permis de tenir sans lui, mais il faut croire que le destin a joué son rôle dans cette histoire.

Liam Collins était le genre de meilleur ami qui ramenait le soleil à chaque fois que la pluie s'éprenait de moi. En y repensant, vu de l'extérieur, notre amitié maladive en était peut-être simplement mignonne. Mais au fond, elle était bien trop importante, autant pour lui que pour moi. Il était bien plus qu'une simple personne, il était une partie de moi, un bout de mon âme, un morceau de mon cur.

En réalité, je sais que je ne réalise toujours pas. Les paroles de mes parents signifient beaucoup trop d'attentes pour moi. J'ai souvent rêvé de les entendre, mais après six ans, j'ai finis par me trouver une raison, pensant que ce jour n'arriverait jamais.

Le gazouillement des oiseaux me poussent hors de mes songes. Mon bras engourdie, je redresse ma tête laissant mes yeux tomber sur la feuille qui me fait face. Dès l'instant où mes pupilles s'accrochent aux gribouillages que j'ai fait sur le papier, je me paralyse complètement. Sous le choc, mon crayon rejoint le sol dans un bruit sec. Hypnotisée, je ne peux décoller mes iris de son prénom, remplissant la majorité de cette page. Je ne lâche pas du regard ses quatre lettres tracées d'un trait fin, comprenant que Liam Collins obnubile absolument toutes mes pensées. Mon cur bat la chamade, j'attrape délicatement la feuille et frôle du bout des doigts les lettres de son prénom, fébrile.

J'ai comme l'impression que j'effleure le bonheur sans jamais pouvoir le saisir complètement. Les mots de nos parents restent très abstraits dans ma tête. Et bien que leur décision est prise, je ne peux m'empêcher de me méfier. Mais malgré tout, je sais que au fond de moi je suis heureuse et je n'ai qu'une hâte, rentrer chez moi, à Los Angeles.

Dans un soupir, quand même craintif et rempli de désillusions, je repose cette feuille de papier sur mon bureau. Je me rends compte que ma mère et mon père ne cesseront jamais de dicter nos vies. Il y a six ans, ils m'ont brisé. Aujourd'hui, je me réjouis de la nouvelle. Mais je ne peux m'empêcher de rester sur mes gardes, demain est différent et tout peut changer.

Ma vie en un seul mot ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant