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   Se faire réveiller par l'un de ses parents, est  un phénomène banale n'est-ce pas ? Se faire réveiller parce que votre mère alcoolisée est entrain d'hurler devant votre nez,  toutes sortes de choses inutiles, ça l'est un peu moins, non ? Cette odeur. Je ne m'y ferrais jamais. Un mélange de café, de cigarette, de vin ou de bière, je n'en sais trop rien.
Génial, j'ai la nausée matinale, alors que je ne suis même pas enceinte. Ma vie est enviable, je sais. Que voulez-vous, on a une vie de rêve, ou pas.
« Tu te rends compte de la honte que tu m'infliges Luna ? Comment veux-tu, un jour pouvoir trouver du travail si tu continues de ressembler à une junkie ? »
    Je ne réponds rien, parler avec un alcoolique c'est comme monter les marches d'un Escalator. C'est stupide.
« La honte que je lui infliges », je trouve ça plutôt ironique non ? Les rôles sont inversés ma vielle, mais encore une fois, tu es trop aveuglée par ta petite personne et par toutes les sortes de breuvages dans ton corps pour le remarquer .
Enfin bon, trêve de chaos inutile, aujourd'hui est une journée qui se doit d'être productive.

   Aujourd'hui je vois Lou. Lou est une amie de longue date. Je peux dire que je la connais depuis toujours.
C'est une jeune fille très réservée et je dois bien avouer, que je la trouve sublime. Lou est passionnée de photographie. D'ailleurs aujourd'hui nous allons sillonner Paris à la recherche de lieux agréables pour faire quelques photos.  Je suis assez à l'aise devant l'objectif, bien que ça ne soit pas l'extase non plus.
Après quelques minutes de préparation je sors de chez moi en direction de notre point de rendez-vous. 

« Salut toi » 
  Son petit sursaut habituel me fait  rire. Quelques banalités plus tard, Lou me dirige dans les rues des ces arrondissements que je connais si bien.
Elle s'arrête à plusieurs reprises, pour vérifier  la lumière, le cadrage et pour m'immortaliser dans son boîtier.
A vrai dire, l'objectif ne me dérange pas, mais son regard c'est une autre histoire. Lou a des yeux perçant absolument magnifiques, mais soutenir son regard est une épreuve. Elle m'intimide beaucoup et j'ai du mal à m'y faire.

    Nous sommes assises à même le sol et nous regardons le travail qui a été réalisé aujourd'hui. Je ne suis pas réellement fan de mon reflet mais en revanche, je suis accro à ces photographies. Nous essayons de transmettre une émotion, de transmettre une histoire, de transmettre un message, et je pense que c'est ce que les gens qui me suivent recherchent. J'ai, ce qu'on peut appeler, une petite communauté sur les réseaux sociaux, et je suis principalement suivie pour ce que je dégage, ce que je reflète. J'essaie de montrer au monde entier mon point de vue sur notre société. J'essaie de trouver des personnes avec qui je suis à l'aise. Chose très compliquée.

« J'aime vraiment  te photographier Luna, tu as une aura tellement singulière. Je trouve que notre duo est un bon duo. »

   Notre duo ? J'aime beaucoup l'idée. Ce que j'apprécie moins c'est le fait que je sois toujours la seule mise en avant.

« Laisse moi présenter ce duo au monde entier alors. » ajoutais-je en rigolant

   Sans plus attendre, je dégaine mon téléphone et me connecte à Ins. Je ne fais pas attention à mes messages et me dirige vers l'option « story » et sans plus attendre, j'enroule les bras de Lou autour de moi et prends un selfie.
Je n'ai jamais rien vue d'aussi mignon, sur l'image, Lou a les joues rosies et souris de toute ses dents.
Elle est magnifique. La photo.
Je décide de la poster sur mon compte, je mentionne mon acolyte et écris une légende.
« Ma jolie petite ombre :) »

  « Dis Luna, n'oublie pas que si la semaine prochaine tu ne vas pas bien, je suis là pour toi. Si tu as besoin de quelqu'un pour parler, pour pleurer, pour manger ou même pour se taire, je suis là. »

  La semaine prochaine sa fera 10 ans. 10 ans qu'il n'est plus là et qu'il est devenu ma plus grande faiblesse. Son départ de nos vies m'a poussé à grandir plus vite, a survivre plus vite. Son manque me torture tous les jours mais mon amour pour lui ne cessera jamais.

« Luna ? Luna ? Houhou, il y a quelqu'un ? »
Je sors de mes pensées et fait un sourire à mon amie. Lou et Zack sont les seuls, en dehors de ma famille, a être au courant de cet événement.

« Merci Lou, c'est plutôt cool de ta part. Mais ça va aller, comme tous les ans »

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  Notre athlète s'élance, tout le monde retient son souffle. Va t-elle réussir son atterrissage ? La tension est à son comble, le publique ne respire plus. Oui ! Dans le mille ! La foule est en délire. Cet atterrissage « gros plat sur le lit » est une réussite !
Je fais toujours des entrées fracassantes.
Je suis épuisée de cette journée, mais je suis aussi plutôt heureuse. J'ai beaucoup aimé la compagnie de Lou, comme toujours d'ailleurs.

  Et si nous reprenions nos bonnes habitudes ? Mon téléphone correctement calé entre mes doigts ne fais que de subir les claquements que je lui impose. J'ai beaucoup de messages, plus que d'habitude . La story et la photographie que j'ai posté avec Lou ont fait naître beaucoup de réactions. Me voilà à devoir répondre à des questions sur ma sexualité, et sur ma relation avec cette charmante demoiselle.

   Vous savez qui m'a envoyé un message ? Encore ? Oui vous le savez. Je vais finir par le bloquer, si je dois encore faire face à une de ses provocations ou à son alcoolisme je le bloque une bonne fois pour toute.
Moi qui voulais du changement. Il m'a envoyé un message vocal.

« Salut »

À l'entente de ce simple mot, un frisson me parcourt sans attendre ma permission.

« Je sais que tu n'as pas forcément envie de voir des messages de ma part alors je me suis dis que tu préférerais peut être les écouter. »

Vue les réactions que sa voix me procure, j'aurais préféré lire ses provocations.

« Premièrement, je voudrais m'excuser pour la dernière fois, je n'étais pas moi même et l'alcool ne fait pas bon ménage chez moi. »

Sans blague, je ne l'avais pas remarqué.

« Je vais arrêter de t'harceler, et je vais essayer de faire correctement les choses. Alors si tu veux bien, je vais recommencer de zéro. Bonjours, je m'appelle Valentin et j'ai 18 ans. Je vis dans le sud de la France. Si je suis venu te parler c'est parce que je t'ai trouvé jolie et même si je sais que ce n'est que du physique, j'aurais aimé apprendre à te connaître d'avantage. Si tu es d'accord bien sûr. »

Quel changement radical, ça en devient perturbant. Ça ne va pas durer longtemps, ça c'est sûr et c'est dommage. Je l'aime bien comme ça le petit Valentin.
A chaque phrases qu'il prononce, ma peau se met à vibrer. Je n'aime pas l'effet qu'il me procure. Ce n'est pas bon signe, ce n'est jamais bon signe.

« Ne me prend pas pour un psychopathe ou quoi que ce soit mais, la fille que tu as posté, c'est ta petite amie ? Déjà que j'avais peur de me faire détrôner par un homme alors maintenant, si je dois aussi m'occuper des femmes, autant tuer toute la population. » dit- il avant d'émettre un faible rire.

Ce micro rire vient de m'achever. Je n'arrive même plus à me concentrer sur ses paroles, c'est affreux.

« J'aimerais bien avoir la même emprise sur toi, que toi tu as sur moi. Je ne te connais pas, je ne te parles que très peu, mais tu me mènes déjà par le bout du nez. J'espère sincèrement que ça va s'arrêter, je n'ai pas envie de m'attacher. À moins que ce ne soit déjà le cas. »

Déjà le cas ? C'est impossible. Il faut arrêter de confondre attachement et attirance physique. Toutes ces personnes qui se disent « je t'aime » au bout de deux jours, vous gâchez la signification, la puissance de ces mots. C'est vraiment triste.

« En résumer, ne sois pas trop proche d'elle. Même si je n'ai pas mon mot à dire, j'espère que tu prendras en compte mes paroles. J'attend de tes nouvelles, passe une bonne soirée Luna. »

Sa voix, mon prénom, le coup fatal.

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