Lila devait presque courir pour rester au niveau de sa meilleure amie et de Weller, qui avançaient à grands pas à travers les salles du musée. Mais c’était ça ou accepter de rester avec les autres…
La petite brune appréciait assez Colin, qu’elle trouvait gentil. S’il n’avait pas été aussi collé au dérangeant Nicolas la plupart du temps, elle aurait bien aimé faire plus ample connaissance avec lui. Mais les deux autres membres de son groupe, c’était une toute autre histoire.
D’abord Isabelle. Même si elle ne semblait pas vraiment méchante, le fait qu’elle ne se mêle pas à la classe et ne parle jamais mettait Lila un peu mal à l’aise. Étant elle-même du genre à extérioriser facilement ses émotions, elle n’arrivait pas à cerner les personnes qui ne disaient pas ce qu’elles ressentaient.
Adrien, la jeune fille ne le détestait pas vraiment, et ses blagues la faisaient en général beaucoup rire, mais à ce moment précis ses taquineries l’agaçaient fortement. Le fait d’être enfermée dans le musée l’effrayait, même si elle essayait au maximum de garder son calme, et n’avait juste pas la tête à écouter le grand brun.
Quand à Gabriel, que dire… à part que la jeune fille gardait constamment un intervalle de sécurité avec le garçon de cinq mètres au minimum. Il la terrifiait, tout simplement. Elle sentait qu’il avait un problème mental, et quand ses camarades s’amusaient jour après jour à pousser à bout le garçon, elle n’avait qu’une envie, d’être le plus loin possible de lui.
Lila savait qu’elle était facilement impressionnable, ce n’était un secret pour personne. Mais tout de même… Gabriel était un cas à part. Même Loup l’intimidait moins que le garçon aux cheveux noirs, malgré ses quinze centimètres de plus.
La jeune fille aurait aimé que sa meilleure amie s’occupe un peu d’elle, mais elle discutait avec la stagiaire de la Grèce Antique. Lila trouvait Scarlett très intelligente.
Dans tous les cas, la brune avait juste envie de retourner dans le hall avec les autres. Au moins il y aurait Nancy et Monsieur Smith, dont l’aura rassurante lui ferait du bien. Être noyée dans un groupe était toujours plus agréable que d'être seule avec quelques personnes dans un couloir sombre. Et puis elle pourrait s’éloigner de Gabriel.
Elle était tellement concentrée à coller sa meilleure amie et Weller, elles-mêmes prises dans leur discussion, qu’il leur fallut bien cinq minutes pour se rendre compte qu’elles n’étaient plus suivies.
- Où sont les autres ? finit par demander la stagiaire, tirant brusquement Lila de ses pensées et coupant la parole à Scarlett.
Les deux adolescentes se retournèrent, pour ne trouver personne derrière elles.
- Oh non… soupira Weller en se tordant les mains. Comment on a pu les perdre ? Je pensais qu’ils suivaient…
- Ils ne doivent pas être très loin, assura la jeune fille aux très longs cheveux châtains. Revenons sur nos pas.
Lila ne dit rien, mais la peur avait engourdi ses membres. Être à quatorze dans la pénombre dans un musée vide était déjà assez effrayant, alors à trois…
Ils n’eurent finalement pas beaucoup de mal pour retrouver leurs camarades. Deux salles plus loin, entre deux vitrines remplies de papyrus colorés, Isabelle était assise au sol, l’air ébahi, sous le choc. Lila vit Adrien un peu plus loin, qui adossé à un panneau d’explications passait une main tremblante devant ses yeux. D'ailleurs, c'était la première fois depuis qu'elle le connaissait qu'il arrêtait de sourire. Quant à Colin, des larmes silencieuses s’écoulaient sans s’interrompre le long de ses joues, tandis qu'il fixait le mur opposé avec une terreur non voilée.
- Vous auriez pu suivre ! s’exclama Weller, l’air fâchée mais surtout soulagée. Où est votre ami ?
Pendant une seconde, aucun des trois adolescents ne bougea. Puis Isabelle, sans même jeter un coup d'œil aux trois arrivantes qui ne comprenaient rien à ce qui se passait, désigna du pouce l’arche près de laquelle ils se trouvaient.
La jeune professeure s’engagea sans attendre dans le large couloir, bientôt suivie par Scarlett. Lila hésita un instant, mais finit par y aller elle-aussi, la curiosité prenant le pas sur le besoin de sécurité. Même si Gabriel lui faisait un peu peur, elle avait bien envie de savoir ce qu'il faisait seul dans une pièce, et qui avait bien pu mettre Adrien, Colin et Isabelle dans un état pareil.
Sur les deux murs qui l'entouraient s’étendaient des pierres couvertes de hiéroglyphes, et malgré la faible lumière des néons au plafond, il y faisait particulièrement sombre. La petite brune frissonna et accéléra le pas, pressée de rejoindre la professeur et son amie.
Lila finit par émerger dans une gigantesque salle qui ressemblait un peu à l’intérieur d’un temple, avec des amphores peintes le long des murs, un sarcophage au centre et des couleurs somptueuses partout, l'ensemble dans le style reconnaissable de l'Égypte Antique. Elle jeta un coup d’œil au panneau près de l’entrée et vit qu’il s’agissait d’une reproduction d’une… chambre funéraire.
La jeune fille était tellement sur les nerfs que ces simples mots suffirent à la terrifier. Mais ce qui lui fit beaucoup plus peur, fut de trouver les deux jeunes femmes qu'elle suivait dans le même état de choc que ses autres camarades de classe.
Devant elle se tenait Gabriel, l’air impassible, les mains dans les poches de son jean noir.
- Q-qu’est-ce qui se passe ? bégaya la brune.
Cela devait être la première fois qu’elle adressait la parole au garçon depuis qu’elle le connaissait. C’est-à-dire depuis longtemps en réalité, car il était avec elle au collège, et n’était pas du genre qu’on pouvait facilement ignorer. Déjà à l'époque, il avait une réputation un peu particulière.
Les yeux verts se déportèrent sur Lila, et elle dut lutter pour ne pas s’enfuir en courant hors de cette salle à l'atmosphère morbide. Mais plutôt que de répondre, ce qu’il ne faisait en réalité quasiment jamais, Gabriel se décala sur la gauche.
Quand Lila aperçut ce qui se trouvait derrière lui, toute la pression et l'angoisse qui s’étaient accumulées dans son corps depuis que les lumières s’étaient éteintes s’échappèrent hors de ses lèvres.
Son cerveau était déconnecté de la réalité. Ses genoux heurtèrent une surface dure, mais elle ne le remarqua presque pas.
Était-ce elle qui poussait ce hurlement qui lui déchirait les tympans ?
Ce hurlement de mort...

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L'Art de Tuer
Mystery / ThrillerAh la la... Vous la connaissez tous cette sortie scolaire, hein ? Cette journée ennuyante au musée, ce petit questionnaire à remplir, ces visites guidées inintéressantes, ces remarques persistantes du prof pour cesser de bavarder, pour ranger son po...