Chapitre 15 : Wally

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Je tire un peu sur le bras de mon amie en pointant du doigt un énième gratte-ciel. Sur les hautes terrasses de celui-ci pousse une végétation luxuriante et j'ai vraiment envie d'aller voir tout ça de plus près. Si ça ne tenait qu'à moi je m'y envolerai. Mais la cape que je porte handicape mes ailes, et de toute façon, je ne pense pas que Sten verrai cette petite escapade d'un bon œil.

Notre sentinelle nous amène d'ailleurs jusqu'à une sorte d'ascenseur, construit dans un long tube en verre. Il aboutit sur une passerelle reliée à d'autres par des sorte de tunels transparents. De temps à autre, des trains les traversent à toute vitesse, et je me sens frémir d'excitation à l'idée de monter à bord.

Sten nous fait monter dans l'ascenseur et passe en dernier. Dès la porte fermée, la cabine se propulse violement et nous arrivons vite à la station. Quand la porte s'ouvre sur le quai, la sentinelle nous pousse à avancer et Tracy se presse un peu plus contre moi. Nous avançons bravement ensemble vers les railles.

Nous nous arrêtons à la hauteur de Sten, tous les trois aussi anxieux de savoir ce qu'il va se passer. La station se remplit peu à peu. Des personnes de toutes origines, avec ou sans ailes, arrivent au compte goûte par les ascenseurs, et certaines nous jettent des regards intrigués. C'est vrai qu'avec nos habits usés, nous ne faisons pas bonne mine fasse à leurs belles tenues futuristes. Mais la plupart ne nous prêtent aucune attention.

Après quelques minutes, le passage à notre gauche s'ouvre et un train traverse la salle. Ses portes glissent et des gens en sortent. Nous attendons que tous soient sur le quai avant de monter à bord. Je lâche Tracy et me faufile dans la rame en quête de places assises. J'en trouve finalement cinq côte-à-côte et je m'y asseois. Mes compagnons me rejoignent rapidement, et Tracy s'installe en face de moi. Elle a l'air un peu vexée, mais je n'y prête pas attention.

Quand tout le monde est entré, les portes se renferment dans un soufle et le train se propulse. Il ne touche pas les parois du tunel de verre, si bien qu'il va à une vitesse effrayante. La ville défile sous mes yeux sans que je n'arrive à assimiler tous ses éléments. À chaques arrêts, nos trois têtes se tournent vers Sten. Et à chaque fois, celui-ci hoche négativement la tête.

Au fur et à mesure que le paysage défile, je prends conscience de l'immensité de cette ville. Les grandes tours s'étendent à perte de vue, souvent espacées par des parcs verts ou de petits bâtiments. J'ai l'impression que notre voyage ne se finira jamais.

Après de nombreux arrêts, Sten nous fait enfin signe de nous lever. Nous sortons à la prochaine station, plantée au milieu du plus grand aéroport que je n'ai jamais vu.

Bon... Je n'ai pas non plus vu beaucoup d'aéroport avant celui là dans ma vie... Pour ne pas dire aucun... Mais je suis quand même certain que ceux d'Antro ne sont pas si grands que ça.

Nous descendons directement dans l'enceinte du bâtiment, et nous nous serrons pour ne pas nous perdre. Tracy croise rapidement ses bras sur sa poitrine, l'air un perdue. J'ai bien envie de la prendre contre moi, mais son attitude m'en dissuade. Je plonge alors mes mains dans mes poches et me tourne vers notre guide. Il fend déjà la foule et je pars à sa suite.

Nous traversons ainsi de multiples portes coulissantes tout en essayant de ne pas nous perdre de vue. Nous arrivons enfin devant un portique, et les agents de sécurité s'avancent pour nous demander nos billets.

Alors que je me rends compte que nous n'en avons pas, Sten sort une carte dorée de sous sa cape. Il la tend à l'agent avec un air autoritaire.

- Pouvez vous vous dépêcher de nous faire passer ? Nous n'avons pas que ça à faire... Exige-t-il d'un ton impétueux que je ne lui connais pas encore.

L'agent s'approche, et après un moment d'étonnement, il s'incline et nous indique respectueusement le chemin de la main.

- Veuillez me suivre monsieur, dit-il en passant à côte des portiques.

Je peux voir le regard admiratif de Driss avant de suivre notre sentinelle. Tracy aussi ne reste pas impassible, mais elle ne me jette toujours pas un regard. Je ne comprends pas ce qu'il lui prend. Si c'est encore pour l'abandon de tout à l'heure, sa réaction me paraît disproportionnée. C'est la première fois qu'elle me tient rigueur pour une chose si banal...

Nous suivons l'agent le long d'un passage privatisé. Il nous entraîne dans une autre aile de l'aéroport, contenant bien moins de monde. Arrivé dans une grande pièce ronde vitrée, juste à côté des pistes, il ouvre une porte des portes et nous montre respectueusement un petit avion. Je revonnais immédiatement un jet privé, et une bouffée d'excitation me traverse.

Nous n'avons passé aucune douane, aucun passage de sécurité, et je me demande si beaucoups de personnes peuvent décoler et atterir ainsi, sans contrôle. Comme quoi, on peut acheter beaucoup de chose...

Mais pour le moment, ce n'est pas mon problème. Nous sortons sur le tarmac et nous empressons de gagner l'appareil blanc, brillant de propreté. Driss monte le premier par un petit escalier décoré d'un long tapis rouge. J'ai l'impression d'être un président en escaladant les marches.

L'intérieur de l'avion est la chose la plus luxueuse que je n'ai jamais vu. Décoré avec goût, je m'y sens tout de suite important. Les grands canapés rouges me donnent irristiblement envie de me jetter dessus. Les dorures sur les murs et certains meubles en bois brillent, et un bar est même disposé au milieu de l'appareil.

Cédant à mon désir, je vais m'affaler sur un magnifique fauteuil bordaux. Tout ce luxe m'impressionne, j'ai même l'impression de ne pas le mériter. Sten s'engouffre rapidement dans l'appareil à la suite de Tracy. Il nous regarde un court moment et sourit.

- Tout va bien ? Demande-t-il en levant un sourcil. Je lance un coup d'œil à Driss qui étaient lui aussi allongé dans le canapé. On échange un regard rapide et on se relève.

Je prends alors conscience du poids qu'à prit notre relation dans mon esprit. Ce matin, je ne lui aurai jamais adressé la parole. Mais là, j'ai l'impression que je le connais depuis une éternité. Et pourtant, on n'a pas beaucoup discuté... Même si je pense faire partie de ceux avec lesquels il a le plus parlé ces dernière années.

Je pense que ce que nous venons de traverser nous a déjà rapproché. Et la disparition d'Anna ne doit pas non plus être innocente dans notre soudaine complicité.

J'ai envie de plus en savoir sur lui. J'ai envie de savoir pourquoi nous nous connaissons depuis deux ans et nous ne nous sommes jamais parlé.

Nous répondons tous les trois par l'affirmative à Sten qui continue :

- Bon, nous avons un peu plus de deux heures de vol. Je vous conseil de vous reposer, la journée a été dûre pour tout le monde.

Je me rappelle alors que les cours se sont finis à 17 heure, et que depuis s'est passé bien 3 heures sans que le ciel ne s'assombrisse, même si honnêtement, j'ai l'impression qu'il s'en est passé bien plus... C'est tout de même possible qu'il y ait un décalage horaire entre nos deux monde ?

- Il est quelle heure ici Sten ? Je demande, presque inquiet de la réponse. Driss tourne vivement la tête vers notre sentinelle avec une lueur d'intérêt dans le regard.

- Il est une heure de moins que chez vous, soit à peu près 19 heure 40. Répond-t-il après un instant de réflexion. Mais le soleil disparaît plus tard ici que sur Antro.

Je fais un rapide calcul dans ma tête. On va donc atterrir vers... 22 heure... La nuit promet en effet d'être longue.

Notre sentinelle ferme la porte de l'avion et passe à l'avant, s'assurant avant qu'on est bien installés.

- Le pilote est déjà dans la cabine, mais il a besoin d'un copilote pour le décollage et l'atterrissage. Évitez de bouger tant que je ne serait pas revenu... Nous prévient-il rapidement. Il balaye du regard une dernière fois l'appareil avant de nous dire avec un léger sourire bienveillant :

- Bon vol mes gardiens.

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