Ça va faire six mois, que l'on s'aime.
C'est long six mois, quand on a une telle chose qui vous remue sans cesse sans dessus dessous à l'intérieur de vous. Mais c'est si court six mois, quand on sait qu'il faudrait bien plus qu'une vie humaine pour épuiser toute sa réserve de sentiments. D'ailleurs, ça ne lui va pas très bien, à la chose, de rester cachée. Elle sort de plus en plus souvent, aux intercours, à la sortie du lycée, en maths, les gens l'ont forcément remarquée.
Elle n'a même plus peur de la lumière du jour maintenant.
Et c'est d'ailleurs ce qui est arrivé, ce jour là, quand il s'est glissé dans mon dos. Il m'a soufflé à l'oreille :
- À quinze heures chez moi, Louise ?
J'ai juste souri. C'est tout ce qu'il y avait à répondre non ?

Nos mains se sont retrouvées, une fois que la porte de chez lui a été fermée. On est allé dans sa chambre et on s'est regardé. Longtemps. J'avais presque oublié la première fois que je les ai vus, ces yeux qui m'ont tant fait rêver. Je caresse sa joue, et dessine du bout de mon index sa mâchoire. Une esquisse de sourire s'installe sur ses lèvres. Il a glissé son sourire sur ma nuque et est descendu le long de mes épaules. J'ai frissonné de désir. Il m'a regardé longuement, et sans que je puisse pouvoir réagir, il a pris ma tête entre ses doigts et a fougueusement embrassé mes lèvres tremblantes d'amour. De sa main gauche il a commencé à soulever la bordure de mon teeshirt. Et puis, ça n'a pas été que la bordure qu'il a soulevée. Ma peau s'est hérissée de mille petits pics. Je ne savais pas de quoi exactement.
A mon tour mes mains sont allées chercher son torse sous le tissu, et d'un coup bref, l'a révélé à mes yeux. Il était beau, beau comme personne ne l'a jamais été. Et des centaines d'oiseaux s'éveillent de ma poitrine et me font m'envoler vers lui dans un bruyant bruissement d'aile. Nous somme là, poitrines liées à se regarder par nos lèvres. Ses doigts caressent mon ventre, mes hanches, avant de descendre sur mes jambes. Il me semble que nous respirons un peu plus fort tous les deux, et nous nous laissons couler dans cette attraction nouvelle, plus forte et plus physique que ce que nous n'avions jamais ressenti avant, comme si la chose s'était accompagnée d'un ouragan qui aurait emmené nos cœurs là haut, tout là-haut, dans un trou noir, un endroit où il y a tellement tout, qu'il n'en reste plus rien.
Mais
Clic clac
Une clef dans la serrure.
Mais nos baisers ne semblent pas l'avoir entendu, ni ça, ni les pas qui ont remonté le couloir. Par contre, la voix du père de Gabriel, ils l'ont entendue.

- Oh mais... ! C'est quoi, ça ?

Je crois que le « ça », c'était moi.

- Dehors ! Qui êtes vous pour toucher à mon fils ?! Dehors ! Dehors j'ai dit !
Le teeshirt à demi enfilé, j'ai quitté l'appartement en courant, la panique au ventre, sans réfléchir, sans me retourner.
Et j'ai quitté Gabriel, sans même regarder une dernière fois ses yeux bleus.

Et je crois que c'est ça, ce que j'ai le plus regretté ce jour là.

Les Hommes sont des menteursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant