Absence

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Point de vue de Maya :

La rentrée est arrivée, amenant avec elle ses amis stress et anxiété. Plus que quelques mois avant le bac, officiellement devenu ennemi officiel de toute une génération d'adolescents.

Bien décidée à vaincre cet ennemi en donnant mon maximum, je décide de commencer cette nouvelle année civile en fanfare.

Pour une fois, je me lève moins de vingt minutes après que mon réveil ai sonné et j'arrive à me préparer assez vite pour ne pas rater le bus. J'aperçois quelques gens de ma classe me dévisageant, sûrement surpris de me voir à l'heure.

Quand j'arrive devant le lycée, je me dépêche de rentrer pour échapper au froid mordant de l'hiver et me dirige directement vers ma salle de classe, non sans me tromper une ou deux fois dans le dédale de couloirs que je n'ai toujours pas réussi à apprivoiser.

Lorsque j'arrive enfin devant la porte bleue de la salle d'anglais, je suis surprise de constater que Gabriel n'est pas déjà assis devant celle-ci en train de lire pour la centième fois sa vieille édition des fleurs du mal. J'attends quelques minutes, sort mon emplois du temps pour vérifier que je ne me suis pas trompée de salle, puis me rends à l'évidence : Gabriel est tout bonnement absent.

Je lui envoie un rapide message avant que les autres élèves de ma classe arrivent, bientôt suivis par la prof.

"Hey Gabriel ! Panne de réveil :) ?"

L'heure de cours me parait encore plus longue et ennuyeuse que d'habitude. Je vérifie plus ou moins discrètement mon portable toutes les cinq minutes pour voir si Gabriel m'a répondu mais ce n'est qu'après quatre heures de cours que j'obtiens une réponse.

" - J'ai la grippe je suis cloué au lit. Tu peux me prendre les devoirs?

- Aïe... repose toi bien! Je passerai ce soir pour te donner les cours et les devoirs."

Je passe donc le reste de la journée seule, au beau milieu d'une classe bruyante où tout le monde à l'air de bien se connaitre et s'entendre. J'ai l'impression d'être de trop, une tâche au milieu d'un tableau trop petit pour tous ces élèves. Gabriel a vraiment dû supporter ça pendant plus de deux ans ?

À midi, la cantine est bondée, rutilante de cris et d'éclats de rire. Pourtant lorsque je m'assois à la table reculée que j'occupe habituellement avec Gabriel, j'ai l'impression d'être au milieu d'un grand vide. Il n'y a personne en face de moi, personne à qui je peux raconter mon week end ou arracher des sourires en sortant mes blagues les plus nulles, personne à écouter parler et à regarder s'épanouir, personne, juste une chaise vide.

Pour la première fois depuis mon arrivée dans ce lycée, je me sens affreusement seule.

C'est ridicule. Je ne peux pas me sentir seule juste parce que Gabriel n'est pas là, ce serait vraiment égoïste de ma part quand on sait qu'il a dû endurer cette solitude pendant plusieurs années.

Je frappe du point sur mon plateau pour me redonner un peu d'énergie, en vain. Je parviens seulement à me faire dévisagée par une fille de Seconde que mon geste a surprise.

L'après midi passe tout aussi lentement de la matinée. En plus je me retrouve seule pour les travaux pratiques de physique et de sciences de la vie.

Même si j'essaie de les ignorer, j'entends de temps en temps les filles de ma classe échanger quelques remarques désobligeantes à mon sujet.

- Regarde comme elle est seule sans Gabriel... elle fait pitié.

- Elle aurait dû rester avec nous tant qu'elle en avait encore l'occasion.

- Ouais ... maintenant on a officiellement deux cas sociaux dans la classe.

La fille au chignon bleuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant