Chapitre 4

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Action.

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Je m'enferme après avoir passé le pas de ma porte. Je vérifie la poignée en l'abaissant et en forçant dessus. C'est bon, c'est fermé. Je fais le tour de l'appartement. Personne ni dans la cuisine, ni dans le salon, personne aux toilettes ni dans la salle de bain. Personne dans sa chambre.


Aujourd'hui, ce sera le début. Un nouveau commencement.


Je pose mon sac de cours sur le carrelage froid de l'entrée et me déchausse. J'actionne une dernière fois la poignée de la porte donnant sur l'extérieur, puis place devant la petite commode où on range nos chaussures. Je la cale avec la marche séparant l'entrée et le salon.

J'enlève mon manteau d'hiver, me mettant à l'aise. J'allume la télévision sur une chaîne d'information. Je veux voir une dernière fois les nouvelles, pour me rassurer de mon appartenance à ce maudit monde. La présentatrice parle d'un enlèvement. Oui, c'est bien ce monde. Toujours fidèle à lui-même.

J'éteins. Je me dirige vers ma chambre, j'y prends une petite boîte où j'ai entreposé depuis quelques mois les outils de ma résurrection. Pour d'autres, les outils de ma destruction. Je ferme la porte de ma chambre et me glisse jusqu'à la salle de bain, adossée au mur gris du couloir. Je n'ai plus de forces.


Le peu qu'il me reste me délivra.


J'ouvre la boîte et sors un scalpel pris préalablement dans l'hôpital visité il y a trois semaines, une dizaine de pilules blanches ou rouges aux effets variés et contradictoires qui pourraient causer la perte de la vie si ingérés dans un même temps, un bout de verre réquisitionné lorsque j'ai accidentellement brisé la vitre en m' y cognant il y a plusieurs années – environ trois –, celui-ci me servira si le scalpel n'est pas aiguisé en conséquence de mon action future.

Je dépose dans ma bouche les pilules, toutes. Je m'arme du scalpel et l'approche de mon poignet droit. J'ai localisé une veine proche, je tranche la peau le séparant d'elle. Un liquide rouge clair se répand lentement à la surface de mon bras. Je le contemple dans son mouvement. J'appuie plus fort sur le morceau de métal pointu et vois maintenant le sang couler à flots.

Je détourne le regard et m'arrête sur mon second bras. Intact, il contraste avec l'autre. Je réduis la distance entre celui-ci et l'arme puis le découpe doucement. À la douleur, je lâche l'arme qui tombe dans un bruit sourd sur le sol carrelé.


Il est temps.


Je me lève difficilement, ayant perdu un peu de sang et souffrant encore de la maltraitance que je subis, et m'assois dans la baignoire. J'ai appris – par les films, séries, internet ou par la télévision – que si on se place dans l'eau, le sang y coulera plus vite. Je lève le bras et demande de l'eau. Le pommeau de douche m'en offre jusqu'à ce que je lui demande d'arrêter.

Installée confortablement, je repense à tout ce qu'il va m'arriver. Je pense à leur peine, à leur délivrance. J'ai peur, j'ai mal, mais cette fois, je vais bien. Pour une fois, je vais bien.

Je balance ma tête en arrière et essaie d'avaler les pilules contenues dans ma bouche depuis bien cinq minutes. Aucune ne veut franchir le pas. J'ai toujours eu du mal à avaler des médicaments, pensant peut-être qu'ils n'apportaient rien de bon. Aujourd'hui, là, maintenant, cela devient vrai.


Je les avale enfin.

DormirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant