Dormir

Chapitre 10

Traitement, part 3.

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Je descends de la voiture qui redémarre dès la portière fermée. Mon père me laisse me charger des corvées.. Pourquoi viendrait-il de toute façon ? Ce n'est pas comme s'il en avait quelque chose à faire.

Je rentre dans le bâtiment et suis accueillie par une vieille femme, la soixantaine, cheveux gris-blancs, pull tricoté à la main troué de façon très inégale et pantalon en velours, qui me montre du doigt la salle d'attente alors que mon rendez-vous est déjà passé. Je lui dis alors que je suis en retard.. Mais tout ce qu'elle sait me répondre est : « Le docteur n'a pas fini avec sa patiente précédente. Veuillez attendre. » Vraiment super. Je dois attendre et en plus je suis une patiente.. Super.

Le "médecin'' sort enfin de son bureau, seul. Ça doit faire vingt minutes que j'attends que le "patient'' précédent sorte comme me l'a indiqué la vieille mais non, il n'y en avait pas. Le psychologue me fait entrer puis me propose de m'allonger dans un canapé fait de tissu, le genre d'endroit qui grouille de toutes sortes de microbes. Bien, au moins il connait l'intention que j'ai en venant à lui. Si cela s'avère être un bon remède à ma misérable vie, je veux bien l'essayer. Je m'assoie puis m'y allonge. Des odeurs me montent au nez, notamment celle de la cigarette que le médecin a dû fumer pendant que je l'attendais en compagnie d'une jeune fille qui se prenait pour un animal non identifiable.

Il prend place dans un fauteuil en cuir lustré, propre. Il prend la parole après s'être confortablement installé et avoir aligné un carnet vierge et son stylo à encre.

« Alors, que me vaut votre visite ? »

Comme si c'en était une de courtoisie. À quoi bon répondre, pour quelle raison suis-je là pensez-vous ? À cause de mon maudit père !

« Bien. Si vous ne souhaitez pas vous ouvrir à moi, je vais lire votre dossier. »

Je n'ai qu'un seul souhait : en finir avec tout, y compris avec vous. Il se lève, fouille cinq bonnes minutes dans son tiroir puis se rassoie de la même façon : jambes croisées, coude appuyé sur le carnet qui repose sur sa jambe droite, stylo dans la main gauche.

« Apparement c'est votre première consultation. Voyons, une centaine d'antécédents en hôpital dus à des blessures plus ou moins graves, une mère absente.. »

'Morte' serait plus juste..

« [...] absente, un père attentif et attentionné, soucieux de votre bien-être qui s'est malheureusement rendu compte de votre état déplorable que trop tard.. »

Il ne peut pas arrêter de débiter des conneries ? Ce flot semble un peu trop intense..

« [...] lors de votre première tentative de suicide. »

Il se tait un moment. Il change de position pour déposer ses deux pieds au sol et ses coudes de part et d'autres du petit carnet. Il fixe de ses yeux mon corps reposant sur le canapé, il ancre finalement son regard dans le mien. Je le tiens, ne sachant que faire et ne voulant pas détourner mon regard face à un inconnu..

« Ouais, un dossier quelconque quoi. »

J'hallucine. Il me fait une blague ? Où sont cachées les caméras pour que je les détruise une à une ?!

Je me relève, fait le tour de la pièce en scrutant chaque recoin pour les trouver mais rien.

« Et paranoïaque aussi. Un oubli, ça arrive de temps en temps. »

Je reste debout derrière lui, les yeux écarquillés, complètement choquée par son discours. Je prends finalement la parole pour arrêter toute cette connerie.

« Vous connaissez un moyen de finir cette vie ? J'ai cherché longtemps mais aucun des échappatoires essayé n'a abouti.

- Désolé mademoiselle mais on en parlera la fois prochaine. J'ai un patient dans cinq minutes. »

C'est sidérée que je le vois écrire sur son carnet. Il déchire ensuite la feuille et me la tend.

« Je vous prescris une dizaine de séances étalées sur deux mois. Allez réserver vos rendez-vous auprès de ma secrétaire, les plages horaires disparaissent rapidement. »

Je lui arrache des mains sa foutue feuille puis sors en trombes de son bureau sous le regard interrogatif de la vieille. Je la passe et sors enfin de ce cabinet de malades mentaux. Ce ne sont pas les patients qu'il faut juger mais l'homme qui se dit médecin ! Jamais je ne reposerais un pied dans cet endroit !

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Après avoir marché des heures ayant à la main cette feuille, je décide de la jeter. C'est ce que j'aurais dû faire depuis longtemps. Je n'aurais même pas dû la prendre.. En voyant une poubelle, je m'y approche et entreprends de l'y déposer. Seulement, ma curiosité prend le dessus. De toute manière, pourrais-je être plus abattue qu'en ce moment ? Oui, de bien des manières, mais pas sous l'effet de ce bout de papier. Je le déplie donc et lis son contenu :

Ce que vous me demandez là est impossible à satisfaire oralement : je ne peux pas inciter mes patients à contacter la mort du fait de ma profession et même en tant qu'être humain conscient de ses actes. Cependant, j'ai bien réalisé que votre vie vous déplait et elle déplairait à bien des personnes.. Je comprends tout à fait que vous vouliez y mettre un terme.. Je ne peux pas vous aider explicitement mais je peux vous conseillez d'une autre façon..

Rappelez-vous seulement ceci si vous allez mal : l'eau coule abondamment jusqu'à l'évaporation ou la stagnation froide, le prix de la vie peut se compter en heures au terme desquelles le meilleur peut surgir.

Faîtes le bon choix mademoiselle..

J'ai compris. J'ai choisi. Merci.

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Alors ? Le psy vous plaît ?

Sérieusement, qu'avez-vous compris de l'intégralité du comportement du psy ? Y a-t-il qu'un sens possible à ses paroles ?

De même pour son message.. que l'incite-il à faire ?

Je vous pose ces questions car il faut comprendre son comportement pour comprendre la suite et ne pas être perdu.. genre, "pourquoi il fait ça ce con ?". TOUT a un sens... ou plusieurs. N'hésitez donc pas à me poser des questions précises ou évasives si vous avez un doute sur le chapitre (et sur l'histoire en général). Mes réponses peuvent être détournées (ou non) mais contiendront réellement des réponses à vos questionnements ! 😂😅😉

Sur ce..😘