Chapitre II

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Argh! La lumière du jour agresse mes pupilles et je m'en cache de la main droite. Je jette un rapide coup d'œil dans les parages pour comprendre ce qui se passe : vide. Pas un chat ! Bon, d'un côté j'ai jamais vraiment été fan de la plupart des gens de la ville mais de là à me retrouver toute seule... Aussitôt je pense à une chose : joindre mon père et mon parrain... Je sors de ma poche mon smartphone et essaie d'appeler Papa. Un puis deux puis trois... Une dizaine d'appels plus tard sur tous les numéros de mon père, je tente ma chance avec mon parrain. Après avoir composé son numéro, je me rends compte que le réseau m'a lâché brusquement. Bizarre. Cette merde d'Apple vaut pas son prix. Heureusement, ma maison est pas très loin du commissariat, je m'y rends donc sans attendre. Sur la route, je constate avec effroi l'ampleur des dégâts : il y a des mares de sang partout, les maisons sont barricadées, les magasins pillés, les voitures abandonnées...

Par chance, je suis pas une petite nature, parce que marcher pieds nus dans la rue c'est plus ce que c'était ! Il y a des bouts de verre, des douilles et du sang partout. Je passe devant mon bar, lorsque j'en vois l'état. Merde... Tout est dévasté, l'enseigne métallique noire dont le néon 《Aren't we all SINNERS?》brillait autrefois est aujourd'hui à moitié renversée. Ne tenant plus que sur les quelques fils restant, le neon menace de céder et de s'écraser sur un cadavre gisant à l'entree du bar. De pathétiques gerbes d'étincelles retombent sur une flaque de sang. Les vitres sont brisées en milles morceaux et je peux voir qu'à l'intérieur tout a été pillé. Toutes ses heures passées à chanter sur du Trapnest, un groupe de pop-rock et à m'enfiler les bons petits plats de Nath. Alors que je fumais des tonnes de Black Stones et que je me donnais corps et âme au morceau que je chantais... Je me sentais bien, je me sentais libre. Ah, mes cigarettes, j'y ai toujours tenus pour la simple raison que c'est Papa qui m'en a fait fumer pour la première fois alors que j'avais dix sept ans. Je me souviens de la réaction de mon parrain lorsqu'il m'avait vue fumer, son visage était devenu rouge et il s'était mis à hurler dans toute la maison. Furieux, il lui reprochait de vouloir faire de moi, un « mini lui ». Papa lui avait simplement répondu de « se détendre et d'en fumer une ».

En y réfléchissant, c'est peut-être ce que je veux devenir, aujourd'hui encore. Un mini El Nar. Ah ! Qui ne le voudrait pas? Il est craint de ses ennemis et pourtant tellement aimé de ses hommes. Nombreuses furent les fois où je les ai vus se sacrifier pour sa sécurité, ou même pour son honneur. C'est un sacrifice que j'ai toujours été prête à faire, dès l'instant où il m'a adoptée et ce jusqu'à la fin de ma vie. Je lui dois ma liberté, il m'a tout offert alors que je n'avais absolument rien à lui donner en retour...

Souvent, nous passions quelques dizaines de minutes au téléphone alors que je tenais le bar. Lorsque j'avais pas de travail à faire, il s'assurait que j'allais bien et que je ne manquais de rien, puis nous parlions de tout et n'importe quoi. Tout ça sur des lignes sécurisées.

Devant ma maison de plusieurs étages, entouré de barrières en acier, se trouve une bonne trentaine de ces macchabés en train d'essayer de faire tomber la palissade protectrice. On se croirait presque à un concert de Boys-band pour ados pré-pubères ! Ils semblent attirés par quelque chose. Par quelqu'un ? Shado ! Je comprends vite qu'ils sont attirés par les hurlements poussés par mon loup. Je décide donc de faire le tour, escalader la clôture et d'entrer par la porte de derrière en les évitant méticuleusement. Une fois à l'intérieur, je parcours les longs couloirs de ma maison jusqu'à ma chambre pour le retrouver. Grâce au ciel, il est encore vivant, bien intact et vraisemblablement heureux de voir que moi aussi. Je le prends dans mes bras et lui fais signe de se taire, il rameute tous les monstres du coin ! J'attrape un sac contenant des paires de baskets de course Nike et en enfile une paire noire.

Comme tout criminel qui se respecte, j'ai un packtage déjà préparé en cas d'urgence du genre question de vie ou de mort. C'est un sac de sport rempli d'armes, de fric et de clopes ainsi qu'un sac à dos contenant des vêtements. Après avoir pris les sacs, je suis partie au sous-sol, dans le parking, pour prendre la voiture qui semble le plus s'adapter à la situation : un 4x4 tout terrain blindé avec vitres pare-balles. J'ai chargé mes deux Colt Double Eagle en acier doré, fais monter Shado à mes côtés pour qu'il ne me quitte pas d'une patte et j'ai démarré la voiture.

Comme c'était à prévoir, le bruit de la porte du garage qui s'ouvre attire l'attention des mangeurs de chair et ils se sont tous mis à s'entasser devant nous. Se poussant les uns les autres, leurs membres déboîtés s'emmêlent, leur peau tombe en lambeaux et leurs yeux semblent morts, – et l'sont d'ailleurs certainement –, ils essaient de briser la vitre de ma voiture sans grand succès. Un sourire sournois aux lèvres, j'appuie sur l'accélérateur et enclenche le levier de vitesse, faisant crisser les pneus et percutant le groupe de morts-vivants qui s'agglutine devant moi. La plupart ne parviennent pas à s'accrocher à la voiture et les autres finissent écrasés. Une fois loin d'eux, je prends mon téléphone et essaie à nouveau d'appeler Papa et Big D, sans succès. Je tente ensuite ma chance en allumant la radio mais le résultat reste le même. Pas de réseau, pas de radio, tout va bien, ce n'est pas l'Apocalypse, Nayah, pas du tout! Heureusement j'ai un stock de Talkie-walkie dans la boite à gants, mais seul Papa en possède un et il est normalement encore à San Francisco. J'ose espérer que les choses sont différentes là-bas bien que ça me semble un brin trop optimiste.

En avançant vers l'autoroute j'entends les cris d'une femme bien vivante qui se fait encercler par ces monstres. À ses côté, un jeune garçon hurle vainement sur les trois demeurés qui lui tirent les bras jusqu'à presque les arracher. Je reconnais les deux individus après un court instant à les regarder... Juste avant que l'une des créatures se mette à dévorer l'épaule de la femme, j'arrête la voiture et décoche une balle dans le crâne des morts-vivants. La femme me lance un regard plein de détresse, encore secouée par l'attaque puis s'agenouille auprès du gosse pétrifié. Derrière eux, le long de l'avenue principale de King County, un troupeau de plusieurs dizaines de ces monstres avance vers eux.

«S'il vous plaît... supplie-t-elle »

The Walking Dead : Morsure [CORRECTION DE BUG]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant