Après être restés une bonne demi-heure allongés, je vois Shado tourner autour des fenêtres, ce qui signifie que le jeune loup s'impatiente et veut sortir. Je replace ma brassière de sport Nike et me mets à la recherche de ma combinaison de mécano gris foncé. Je glisse mes jambes dedans puis noue les manches autour de ma taille, effleurant l'une des plus imposantes de mes cicatrices. Sur le mur fissuré, des râteliers de fortune ont été installés par les soins de Killer et occupent la place de mon ancien porte-manteaux mural.
Chacun a son râtelier « attitré » pour y entreposer ses propres armes, puisque nous n'utilisons pas les mêmes. Killer utilise ses machettes et des armes blanches, couteaux de boucher et même un poing américain plein de pics acérés – que j'ai toujours voulu lui piquer- mais il ne me laisse pas y toucher. Quant à moi, je suis beaucoup plus à l'aise avec les fusils d'assaut et mes deux armes fétiches mais j'aime aussi utiliser les explosifs en tout genre. À mon grand dam, les quelques bijoux de ce type que je possède sont réservés pour les cas d'urgence uniquement, vu que c'est pas le top niveau furtivité, mais ça reste plus efficace que les armes face aux hordes de junkies. Et enfin pour la discrétion et les sorties sans trop de risque, j'ai un pied-de-biche long de 65cm, ça défoule bien plus quand on éclate un crâne...
Je saisis mes deux Colt, les jugeant suffisant pour une simple vérification des fortifications et des épouvantails. J'allume une cigarette, ouvre la fenêtre puis la tient pour Shado avant de sortir à mon tour. Après avoir descendu les escaliers de secours de l'immeuble, on arrive au premier étage, se laisse tomber, atterrit sur le bitume pour ensuite nous rendre près des barricades. Sur les murs en briques brunes, des pancartes larges avec les lettres «AUCUNE AIDE » et « RETOURNEZ D'OÙ VOUS VENEZ » marquées en rouge sont accrochées bien à la vue de tous. Tout autour du bâtiment, des barricades constituées de contre-plaqués et de tout autres matières solides empêchent les junkies d'entrer en cas d'attaque.
Je longe le trottoir couvert de boue jusqu'à arriver à un ancien feu de signalisation auquel est ligoté un junkie, bien qu'il soit plutôt passé à l'étape finale du cadavre animé maintenant. Je vérifie ses chaînes avant passer aux suivants, de l'autre côté du bâtiment. Ceux-là sont accrochés à un lampadaire au bout duquel est suspendues quelques têtes coupées qui, pour la plupart, bougent encore. Si tout ça ne suffit pas à éloigner les vivants, c'est vraiment qu'ils cherchent les emmerdes ! Pour empêcher les morts d'entrer et en attraper quelques uns, Killer a confectionné une sorte de piège. Le mort-vivant s'approche puis s'emmêle les pieds dans un tas de fil barbelé, trébuche pour atterrir dans une benne à ordure et une boîte en carton remplie de brique accrochée au lampadaire par ces mêmes fils lui tombe dessus. La plupart du temps, ça fonctionne bien et on décapite le marcheur avant de faire monter son corps chez nous.
Grâce à eux,la gamelle de Shado est pleine pendant quelques jours.
Après vérification, je constate que c'est bon. Rien n'a l'air de clocher et les junkies restent plutôt loin de l'immeuble. La benne est pleine d'ordures tout ce qui a de plus normal, mais aucun n'est tombé à l'intérieur. C'est pas bien grave, l'un d'eux étant déjà étendu dans ma baignoire à attendre que je le découpe en morceaux. Je décide donc de remonter à l'appart', espérant pouvoir prendre une douche dont j'aurais bien besoin. Alors que je tire sur l'échelle rétractable pour emprunter les escaliers de secours, j'entends un hurlement provenant de la rue d'en face. Je prends un peu de hauteur pour pouvoir identifier la source de ce bruit par au-dessus des murailles, lorsqu'il s'intensifie.
Alertée, la dizaine de rôdeur alentour se dirige vers le bruit lorsque deux personnes qui semblent presque déjà mortes, sortent du bâtiment d'en face. Ils ont l'air de former un couple, ou ce qu'il en reste. La femme est vêtue de ce qui ressemble à une robe de mariée blanche pleine de boue, déchirée jusqu'à mi-cuisses et a le visage et le corps recouvert de sang sûrement vieux de plusieurs semaines. Le jeune homme au visage fantomatique est derrière elle, portant une chemise blanche maculée de sang et déchiré de toute part. Quel spectacle pathétique, pourquoi est-ce qu'elle a gardé sa robe de mariée ? S'attacher autant à son ancienne vie est aussi stupide que pitoyable. Je sors de ma ceinture multifonction mon talkie-walkie gris et appuie sur le gros bouton rose pâle pour entrer en communication avec Killer,détenteur d'un autre de ces petits engins.
« Tu devineras jamais ce que je suis entrain de voir, ricane-je doucement.
- Hm ?
- Un couple, l'une est habillée d'une robe de mariée et l'autre d'une chemise et d'un bas de smoking...
Il se met à rire de la même manière que moi avant de reprendre un peu plus sérieusement.
- J'descends. On va aller vérifier les pièges de Forsyth St. »
Reprenant mon sérieux, je réprime mon rire avant d'acquiescer à l'ordre de mon interlocuteur. Je range mon talkie-walkie et balance la cigarette que je gardais au coin de mes lèvres, tout en regardant le couple, intriguée. Les deux amants fixent la mini horde de morts-vivants qui s'approchent d'eux et, au lieu de fuir, l'homme tend les bras en position de crucifixion. Sa femme qui vocifère presque machinalement, lui jette un regard résigné avant d'imiter son geste. Oh merde... Ils comptent se faire bouffer, juste comme ça? Quel gâchis, ça aurait fait de la viande fraîche pour Shado. Pourquoi ils se tirent pas simplement une balle ?
Inutile de dire que les mangeurs de chair se sont fait un plaisir de sauter sur le jeune couple qui fermait les yeux, comme si on allait seulement leur retirer une dent de sagesse... Vraiment stupide... À l'instant même, il se sont mis à pousser des hurlements de douleurs et à se tordre, la femme essaie finalement de fuir mais est rattrapée par l'un d'eux. Après avoir observé quelques secondes la vie de ces deux inconnus se terminer pour de bon et finir dans l'estomac décomposé des rôdeurs, je m'agenouille à la hauteur de Shado et lui offre quelques caresses de réconfort. Il a l'air d'avoir compris que deux repas viennent de lui passer sous le nez, pauvre petit père. C'est peut-être pas très intelligent de notre part de le nourrir de viande de junkies me direz-vous, il pourrait attraper des maladies bizarres, voir devenir comme eux... Mais c'est toujours mieux que de le laisser crever de faim, il a besoin de plus de viande que nous tout en continuant à manger quelques fruits et autres sources de vitamines. Ça dure depuis trois mois et il ne montre aucun symptôme, à part une pisse dont l'odeur est meurtrière. L'infection ne touche sûrement que les humains, enfin j'espère...
Surprise par un bruit de fracas dans mon dos, je brandis mon arme en me retournant. C'est Killer qui atterrit derrière moi. Sa flasque de vodka en main, il me met une légère tape dans le dos avant de me tendre mon pied-de-biche.
« Et ils sont où, nos deux jeunes mariés ?
- T'entends pas les rôdeurs bouffer ?
- Ah... soupire-t-il avec une légère grimace avant de répondre. Des Noces Funèbres... laisse-t-il échapper avec une voix qui se voulait effrayante, me rappelant les films d'horreur à petit budget.
- Blague pourrie, tu m'dois une clope, lui réponds-je l'air victorieux en avançant. On y va ?
- Elle était pas pourrie ! »
Nous nous lançons dans un débat sur ses blagues douteuses, puis sortons tout les deux du périmètre sécurisé en nous faufilant entre deux bennes à ordures en fer qui nous servent de portes. Les rôdeurs encore en train de manger ne nous prêtent aucune attention, ce qui nous permet de nous rendre au piège le plus proche, installé devant le Nowhere Bar. En y repensant, on a eu de la chance d'être venus ici, on a pu faire le plein d'objets utiles au Horton's Drugstore, de vêtements plus qu'il n'en faut en pillant le The Red Zone Georgia et le Kum's Fashion. Ce qu'il nous manque, c'est les médocs, l'hôpital étant blindés d'infectés et les supérettes ayant étés pillées durant les premiers jours de panique.
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The Walking Dead : Morsure [CORRECTION DE BUG]
Action« Dans un monde où les morts se relèvent, celui qui n'est pas prédateur est proie. » Un problème de publication supprime des espaces entre les mots, les chapitres sont quand même publié mais le problème sera réglé très prochainement.