Chapitre 10:

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Je l'observais en silence sous le mauvais éclairage des néons du supermarché rendant très peu justice à la beauté naturelle de Louis. Il voguait à travers les rayons, quelques achats dans les bras et un air concentré peint sur le visage alors qu'il s'engouffrait dans une nouvelle allée. Ses yeux semblaient s'éclairés furtivement comme à la suite d'une illumination quelconque avant qu'il ne se retourne vers moi me demandant d'aller l'attendre dans la voiture, me faisant soupirer avant de tendre le bras pour récupérer la clé qu'il me tendait. Je traversa dans le sens inverse le petit supermarché sans me poser plus de questions et passa les portes automatiques me faisant frapper par l'air frais du début de soirée. Je n'avais toujours pas la moindre idée de ce que nous faisions ici ni de ce que Louis pouvait bien avoir en tête. Après lui avoir avoué que je ne voulais pas rentrer, celui-ci m'avait fait signe de monter dans sa voiture sans plus d'explications et avait conduit durant de courtes minutes sans le moindre bruit avant de s'arrêter devant le fameux supermarché où je l'avais suivi encore muet. La voiture se déverrouillait d'elle même à la simple proximité de la clé alors que je m'engouffrais dans l'habitacle. Une fois la porte fermée, la petite loupiote au dessus de ma tête ne mit que quelque secondes à s'éteindre me plongeant dans un calme absolu légèrement oppressant. Je m'enfonçais plus profondément dans mon siège resserrant ma veste autour de mon col et observa les passants sortir de la petite supérette les bras chargés d'articles en pleines conversations dont je ne distinguais que quelques mots. L'heure d'hiver s'approchant, le ciel commençait déjà à s'assombrir malgré l'heure peu tardive attirant peu à peu la nuit autour de nous créant une atmosphère douce. Je ne mis pas longtemps à lancer la radio du véhicule voulant briser le silence qui s'y était installé depuis quelques secondes maintenant, et les voix de deux animateurs en plein débat remplirent bientôt l'habitacle d'un bruit de fond rassurant.

Finalement la porte automatique s'ouvrit une nouvelle fois devant moi laissant apparaître un Louis les bras chargés d'un sac en plastique à l'effigie de la supérette. Il entra à son tour dans la voiture déposant son sac sur la banquette arrière avant de me jeter un coup d'oeil hésitant, puis démarra encore une fois sans un mot. J'augmentais le son de la radio de façon à couvrir le bruit du moteur mais aussi le silence qui avait prit place entre nous me mettant relativement mal à l'aise. Je plaçais ma tête contre la vitre fraîche de la voiture et observais la route passer cherchant à savoir où je me rendais. La situation avait totalement échappée à mon contrôle, j'étais censé passer une journée banale après quelques jours sans avoir vu Louis, prêt à vivre un ennuyeux après-midi dans un musée, et voilà que je me retrouvais en voiture avec lui. Jamais je n'aurais pu imaginer ne serait-ce que tenir une conversation de plus d'une heure avec lui, alors passer ensemble dans une supérette avant de reprendre la route dans sa voiture n'était clairement une option que j'avais pu m'imaginer à l'avance. Penser à ça me rendais d'ailleurs de plus en plus curieux, où Louis pouvait-il bien m'emmener et surtout, qu'avait-il acheté?

Je lança un regard curieux au sac derrière moi et l'attrapa pour le glisser à l'avant, sur mes genoux. Louis m'observa d'un regard en coin avant de reporter son attention sur la route comme pour me donner la permission d'inspecter le sac, ce que j'aurais fait quoi qu'il en soit. Deux sandwichs frais trônaient au dessus, fait de véritable pains et non de ceux industriels que l'on retrouvait toujours dans les sandwichs ou encore les deux simples tranches de pain de mie sans goût. Ceux-ci venaient du petit espace boulangerie de la supérette comme l'indiquait le papier dans lequel chacun des deux pains avaient été enroulés. Juste en dessous avait été placés deux verres à pied en plastique leur donnant un air peu fier et assez ridicule, puis, au fond du sac, trônait une bouteille de vin blanc, selon moi, qui ne devait pas être un grand cru à en juger par son étiquette fade.

Je releva le regard vers Louis amusé par la situation et le vit sourire en coin avant de se garer d'un même mouvement, me faisant relever la tête vers le pare brise. Nous nous trouvions devant l'école primaire du quartier, se trouvant à quelques rues seulement de chez moi, ce qui n'était pas réellement étonnant dans une ville aussi petite. Louis jaugeait ma réaction avant d'attraper le sac qui attendait encore patiemment sur mes genoux en sortant de la voiture. Je le suivit rapidement et vint me placer à sa gauche cherchant à savoir où il comptait en venir alors que ce dernier s'avançait, toujours aussi silencieusement, jusqu'au portail de l'école. Il me déposa le sac entre les mains sans rien me demander et escalada le portail de façon à arriver de l'autre côté en un temps record puis me fit signe de lui faire passer le sac par dessus et de le suivre, ce que je fis sans réfléchir. Je calais mes pieds entre le croisement des grands barreaux de fer qui formaient le portail de façon à me soulever et fit pareil un peu plus haut, escaladant le portail comme une échelle avant de faire passer mes jambes de l'autre côté. J'avais sous-estimé la hauteur du portail et ne fis clairement pas la fier en gravitant d'un côté à l'autre de la parois une fois au sommet mais ne fis aucun commentaire feignant d'être tout à fait à l'aise. Après un bond peu gracieux qui me fis atterrir dans un bruit sourd les deux pieds à plat sur le sol je me retournais face à Louis qui me fit signe de le suivre une nouvelle fois. Il sortit une clé de sa poche, et s'approcha d'une des fenêtres, celle ci était composée de six petits carreaux comme on avait l'habitude d'en voir dans le reste de l'école. Louis fit alors passer la pointe de la clé entre le plexiglas et la vitre, déboîtant l'un des carreaux qui lui resta dans les mains. Il passa alors son bras dans l'embouchure et pu atteindre la poignée de la fenêtre et l'abaisser afin d'ouvrir cette dernière. Il se retourna vers moi, m'offrant un regard fier avant de sauter dans la petite salle, ce que je fis quelques secondes plus tard. La ville n'avait bien sûr pas les moyens de payer un système de sécurité, soit, une alarme quelconque, laissant bon vivre à qui trouvera le carreaux défectueux de se balader dans l'école. Louis le remit alors en place m'indiquant qu'il ne tenait plus depuis longtemps mais que l'école n'avait pas les moyens de refaire la fenêtre alors les élèves avaient pour seule consigne de ne pas ouvrir cette fenêtre, ainsi le carreaux tenait lorsqu'il était bien emboîté, et ce, malgré les intempéries.

Saphir - Larry (En pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant