●○ Partie VII ○●

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Une semaine passa où nous devions faire inlassablement la même chose mais cela devenait de plus en plus dur pour nous. Parfois, on apercevait d'autres détenus du camp et on ne pouvait s'empêcher de penser que peut-être nous reverrions ces détenus demain dans une chambre à gaz. Cette pensée nous rendit fous et quelques-uns préférèrent se suicider en sautant dans les flammes des fosses où l'on jetait les cadavres. Durant cette première semaine, nous ne sommes jamais allés deux fois dans la même chambre à gaz ou dans le même crématoire. Les pratiques différaient selon les crématoires : le crématoire I comprenait 15 fours tandis que dans le crématoire III nous devions jeter les corps dans des fausses ouvertes. Un jour on nous a emmené dans un coin entouré d'arbres et où se trouvait une cabane. Devant cette cabane, un grand nombre de détenus attendaient, ils attendaient de pouvoir rentrer dans cette pièce qui allait signer leur arrêt de mort. On nous a ordonné d'attendre et nous avons vu les prisonniers se déshabiller puis entrer dans cette pièce qui était déjà comblée. Peu de temps après, un camion est arrivé avec deux croix rouges de chaque côté et des SS sont sortis. Ils se sont alors approchés d'une fenêtre et ont soulevé une trappe où ils ont versé le contenu d'une boîte sur laquelle était inscrit : "Zyklon B". J'ai compté dix, quinze minutes avant que les SS ouvrent les portes du bâtiment et lorsque l'on s'est approché nous avons vu que tous étaient morts. On a dû alors faire comme les jours précédents : tirer les corps jusqu'à une fosse commune où ils allaient ensuite être brûlés. Nous faisions des allers-retours lorsqu'un SS est arrivé en moto avec un side-car. C'était le SS qui nous avait désigné comme nouveaux Sonderkommando : il s'appelait Moll mais certains le surnommaient "l'Ange de la mort". A peine arrivé,il nous criait déjà dessus. Des camarades n'ayant plus la force de transporter un corps tout seul s'entraidaient et portaient un corps à deux mais ce SS ne l'acceptant pas frappait tous ceux qui n'obéissaient pas. Seulement, un homme refusa d'obéir et ne bougeait plus : il avait perdu la raison. L'Allemand s'en rendit compte, s'approcha de lui et voyant qu'il ne réagissait pas, il commença à l'insulter et à le frapper. Notre camarade n'eut cependant aucune réaction et restait debout telle une statue. Au tour de lui, tout le monde s'était arrêté de travailler et nous étions si pétrifiés par la peur qu'aucun de nous n'essaya de l'aider. Néanmoins, si quelqu'un l'avait aidé, il serait mort. En effet, l'Allemand était si énervé que d'un geste il a pointé son revolver sur lui et a tiré... mais l'homme est resté debout malgré la balle. Furieux, le SS lui a de nouveau tiré dessus. Cette fois notre camarade est tombé. Le SS a alors crié de nous remettre au travail et nous avons dû tirer le corps de notre ami mais avant cela, l'Allemand a ordonné qu'on lui retire ses vêtements car ils appartenaient au Reich. Après cet épisode nous avons pu rentrer au camp et dormir. Notre journée était finie tout comme la vie d'un de nos amis.

Peu de temps après cette visite, les SS nous ont tous réunis et nous ont divisé en plusieurs groupes selon les qualifications de chacun. Les barbiers, tailleurs ou coiffeurs se sont vu attribuer des ciseaux de couturier pour couper les cheveux des personnes gazées, les dentistes, eux, devaient arracher les dents en or. Mais ceux qui comme moi parlaient allemand ou une autre langue étaient chargés d'accueillir les personnes des convois et après le tri nous devions les conduire dans les chambres à gaz. Tous les autres, devaient retirer les morts des douches et les porter ensuite dans les fours.Après ces répartitions, chacun de nous dut se rendre à son travail escorté de SS. L'accueil des convois était un travail horrible,comme tout ce qui se faisait à Auschwitz me direz-vous, mais voir les personnes terrorisées, en pleur et les voir nous supplier pour qu'on leur dise ce qu'il allait leur arriver était réellement traumatisant mais le pire restait à venir. En effet après le tri nous emmenions ces personnes vers leur mort... Nous les faisions entrer dans les vestiaires qui étaient reliés aux chambres à gaz et aux crématoires, puis les SS leur ordonnaient de se déshabiller en leur faisant croire que des vêtements propres les attendaient de l'autre côté. Nous devions aider les plus âgés à se déshabiller et chaque déporté devait nouer leurs chaussures ensemble. Ensuite, nous les faisions entrer dans les douches puis nous refermions les lourdes portes, commençait alors le compte à rebours du temps qu'il leur restait à vivre. Ceux qui avaient compris qu'ils allaient mourir, commençaient à hurler de peur, de colère et nous demandaient de les laisser sortir. Voyant que les portes restaient fermées, ils nous lançaient des injures mais cela ne changeait rien au fait qu'ils allaient mourir par notre faute.Le Zyklon B se diffusait dans les douches et le gaz mortel anéantissait les individus. Dès lors, nous comptions une dizaine de minutes. Ces minutes étaient les plus longue de notre vie car pendant ce temps on entendait les cris de douleur des personnes, leur ongle raclant le mur... Mais après ces dix minutes, plus rien, ils étaient tous morts. Le silence en devenait assourdissant. Nous ouvrions les portes, les SS se tenaient à l'écart à cause du gaz et pour être sûr que personne n'était en vie ils tiraient sur les cadavres. Les Sonderkommandos, un foulard sur le bas du visage,arrivaient et les transportaient vers les fours où leur cheveux seraient coupés et mis dans un sac et leurs dents en or leur seraient retirées. Nous devions nous aussi nous occuper des corps en attendant l'arrivée d'un nouveau convoi. Une solidarité s'était mis en place dans notre groupe et lorsqu'un de nos camarades était trop fatigué pour tirer les morts il prenait la place d'un qui devait couper les cheveux. Cela nous permettait de nous reposer car notre travail était épuisant. Les SS ne disaient rien tant que le travail était fait.

De plus,en tant que Sonderkommando qui s'occupait des salles de déshabillage je devais fouiller les vêtements des détenus et j'avais le droit de prendre le ravitaillement, l'alcool, les devises ou même l'or de ces détenus. Les SS toléraient cela car ainsi nous conservions nos forces. Cependant, nous allions tout de même chercher la soupe et les rations du camp pour ne pas perdre le peu de contact que l'on avait avec le camp de Birkenau. Avec des camarades, j'allais chercher nos rations dans la cuisine du secteur. Nous étions le plus souvent escortés par un vieil SS : lui seul ne nous avait jamais battu et lorsque nous faisions quelque chose qu'il n'était pas censé voir, il détournait la tête et faisait comme si de rien était. Ainsi, nous pouvions jeter le pain dont nous n'avions pas besoin à des détenus de secteurs différents. Aussi, comme je l'ai dit précédemment nous avions très peu de contact avec l'extérieur que ce soit avec les détenus ou avec ce qui se passait en-dehors du camp. Malgré tout j'arrivais à avoir de temps en temps des informations sur la progression de la guerre grâce aux personnes des convois qui parfois parlaient de l'extérieur. De ce fait, j'eus vent du tournant de la guerre avec la victoire des alliés à Stalingrad, j'ai su que toute la France était occupée depuis le 11 novembre 1942 et que le régime de Vichy collaborait avec l'Allemagne et qu'il dénonçait désormais les juifs étrangers et français. Avec cette avancée de la guerre, le nombre de convois qui arrivait ne cessait d'augmenter et les crématoires crachaient de la fumée jour et nuit pour suivre le rythme.

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Hans MüllerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant