3. Déjà-vu

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– Mon cœur, calme-toi. Concentre-toi sur ta respiration et tout ira bien.

Cela faisait dix bonnes minutes que Jungkook se trouvait sur le pas de porte avec sa mère. En arrivant ici, il n'avait pas pu contrôler son cœur qui s'était mis à battre d'un rythme effréné. La main encore sur la poignée, il sentait des gouttes de sueur perler sur son front, tandis que sa respiration se faisait courte et irrégulière. Son sang affluait dans ses tempes.  Ça lui donnait le tournis. Allait-il réussir à dompter cette peur qui lui serrait les entrailles ? Pourquoi la seule vue de cette maison lui donnait la nausée ? Après tout, ce n'étaient que des murs. 

Que des murs, oui.

Devant le ridicule de cette situation, il se concentra sur ses inspirations comme le lui avait demandé sa mère.

1... 2... 3...

Il était prêt.

Ou peut-être pas encore complètement.

Lorsqu'il appuya enfin sur la poignée pour ouvrir la porte, ce ne fut que pour la laisser béante devant lui. Il ne pouvait finalement pas se résoudre à entrer de suite. Il parcourut d'abord des yeux le salon visible depuis le vestibule et attendit patiemment qu'une nouvelle crise de panique l'emporte et que les souvenirs le percutent. Mais rien. Aucune crise, aucun souvenir. Il n'y avait là qu'un simple salon, dans une simple maison où tout lui semblait tellement familier. Comme si rien n'avait changé, comme s'il n'était jamais parti. Cette cheminée qu'il aimait tant se trouvait à la même place, tout comme ce plafonnier qui lui avait toujours semblé démesurément petit pour l'ampleur de la pièce.

Soulagé, il se décida enfin à pénétrer à l'intérieur avec ses valises et se dirigea sans un mot vers les escaliers.

– Ta chambre est la deuxième sur la gauche, tu te souviens ? demanda sa mère d'une voix douce.

Jungkook ne répondit pas et continua son chemin sans broncher. Bien sûr qu'il s'en souvenait. Pour qui le prenait-elle ? C'était sa chambre, tout de même. Sa chambre dans laquelle il avait vécu toute sa vie avant de déménager. Sa chambre dans laquelle il avait ri, pleuré, crié sa frustration, dans laquelle il s'était ennuyé, amusé... et avait encore pleuré.

Il entra dans la pièce et ouvrit sa valise pour en sortir ses affaires. Mais au moment où il tira quelques vêtements pour les ranger dans son armoire, un drôle de sentiment le prit et le bouleversa. C'était si étrange de revenir ici, de reproduire les mêmes gestes que la première fois qu'il était venu habiter dans cette maison. Ces murs qu'il connaissait par cœur, ce plafond, ce sol, il était persuadé qu'eux ne l'avaient pas oublié. Qu'ils n'avaient pas oublié tous ses instants passés là, tous ses secrets. 

La nausée le reprit et il regretta les deux jours passés à l'hôtel avec sa mère, le temps que les déménageurs apportent leurs meubles. Il se sentait peut-être mieux là-bas, tout compte fait, dans cet endroit neutre qui ne titillait pas ses émotions.

Il chassa cette pensée idiote d'un long soupir, puis décida de se changer les idées en continuant ce qu'il avait commencé. Après avoir terminé d'installer ses effets personnels, il s'assit sur son lit et prit dans ses bras la petite peluche lapin qui l'avait suivi partout et qui avait accompagné toutes ses nuits. Il ne se rappelait plus le quand du comment il l'avait eu, mais il savait qu'elle lui était très importante. Alors, même si à dix-sept ans et en étant un garçon cela semblait stupide d'avoir encore un doudou, il s'en fichait royalement et ne voudrait s'en séparer pour rien au monde.

Quelques coups sur la porte attirèrent son attention. Jungkook marmonna une rapide permission d'entrer à madame Jeon qui vint timidement le rejoindre sur le lit. En silence, elle le détailla du regard, à la recherche d'indices concernant son état.

Sous l'ombre des souvenirs ・ᵛᵏOù les histoires vivent. Découvrez maintenant