Chapitre 9

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Cotton n'était pas homme à se laisser faire. Il avait certes perdu la face contre sa femme mais il ne voulait pas en rester là.

Depuis qu'il avait quitté le domicile familial, il s'était retranché dans un appartement à New-York. Un appartement luxueux. Comment pourrait-il en être autrement ? En côtoyant le grand monde il avait pris goût à tout ce luxe. Son passé trahissait son ambition qu'il n'avait jamais caché à personne. Se voir ainsi destitué de son trône l'attristait beaucoup car il considérait cette situation comme un échec, lui qui s'était acharné à faire disparaître sa ruralité.

Eva n'avait pas l'intention de le faire tomber plus bas qu'il ne l'était déjà. Une chance pour lui. Son éducation modeste auprès d'une mère qui le battait avait forgé son caractère au point qu'il détestait les femmes de pouvoirs. Toujours humilié, toujours rabaissé par le sexe faible sans aucun exemple de force masculine auprès d'un père soumis et lui aussi humilié par cette femme. Il s'était juré que cela ne lui arriverait jamais. Et pourtant. Pourtant le voilà aujourd'hui avec une ex-femme l'ayant à son tour humilié. Il lui rendrait la pareille comme il s'était vengé de sa mère en l'envoyant en prison. N'importe qui voudrait remettre à sa place une personne qui se plaisait à détruire des vies.

Il connaissait très bien les actionnaires vers qui il pourrait se tourner pour récupérer l'entreprise. Des hommes qui, comme lui, avaient beaucoup de mal à se laisser mener par une femme, et qui pensaient qu'à la mort de Mélina Moore ils pourraient enfin récupérer cette mine d'or qu'était l'entreprise familiale. La surprise fut générale lorsqu'Eva avait été désignée PDG. Ne pouvant pas aller à l'encontre de la volonté de feu la présidente, tous rangèrent leurs égos de mâle et se plièrent à la volonté de Mélina.

Quelle douce vengeance ce serait...

En se préparant ce matin Cotton n'avait qu'une seule idée en tête. Se rendre le plus rapidement possible à son rendez-vous à onze heures dans un café proche de Broadway. Un quartier bourré de monde où il passerait inaperçu.

Pour l'occasion il s'était vêtu humblement, il avait laissé son costard trois pièces au placard se rabaissant à porter un vulgaire jean bleu, une paire de basket délavée, un polo difforme sous un gros manteau en laine bon marché.

Il attendait assis à sa table depuis plus de quinze minutes maintenant. Son rendez-vous ne tarderait pas à arriver. Il en profita pour observer les lieux. Il n'était jamais entré dans un café bas de gamme. Décidément ce divorce lui faisait faire des choses dont il se croyait dispensé.

Il soupira d'agacement et prit une gorgée. Un homme de petite taille, un peu bourru entra. Il se dirigea vers le comptoir puis vint s'installer directement en face de Cotton cachant ainsi la visibilité des autres clients sur leurs affaires tout en restant à vue de tous, pour ne pas éveiller de soupçons inutiles.

— Vous avez tout ?

— Peut-être bien, répondit l'homme en caressant l'enveloppe posée devant lui.

Cotton soupira d'agacement. Il tendit une enveloppe plus petite et plus épaisse vers l'homme qui s'en saisit rapidement.

— Tenez, dit-il en faisant glisser la grande enveloppe marron vers Cotton.

L'ex-mari s'en saisit à son tour et l'ouvrit prestement pour en sortir une quinzaine de photographies. Il les regarda attentivement et sourit largement. Il rangea plus calmement les photos dans l'enveloppe et prit son gobelet entre les mains et le fit tournoyer d'un air arrogant.

— Je veux tout savoir de cette femme, tout vous m'entendez ?

— Oui. Mais fouiller le passé de quelqu'un peut comporter certains risques voyez-vous ? commença le détective privé un sourire gourmand plaquer sur le visage. Vous comprendrez donc que le prix de ma prestation pour cette mission sera différent.

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