| CHAPITRE 30 |

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Tout est éphémère


ANGIE

    Décidée et aveuglée par un sentiment indescriptible, je ne perds pas une seule seconde. Je n'ai qu'une envie : tomber sur l'un ou sur l'autre pour leur dire... je ne sais absolument pas ce que je veux leur dire mais je n'ai aucunement l'intention de rester silencieuse et passive. Ils me menacent, tuent mes amis sans pression alors que je continue de leur dire que je ne vais rien balancer. Ils savent dans quelle merde je me trouve à cause de ça, alors pourquoi s'amusent-ils encore à ce genre de jeux horribles ?

    Je sais qu'il y a aussi l'inquiétude qui trouble mon jugement. Recevoir les mains de Nate en avertissement m'a bouleversé. Je ne peux pas me dire qu'il est mort. Les jumeaux doivent le garder quelque part, peut-être même chez eux et il est temps pour moi d'aller le chercher et le sortir de là. Ils sont allés trop loin. Maintenant, je me fous complètement que mon statut de cambrioleuse soit dévoilée, leur situation craint beaucoup plus que la mienne. Je n'ai jamais tué personne alors qu'ils n'en sont pas à leur premier meurtre.

    J'arpente les couloirs de la fac à leur recherche sans parvenir à les trouver. Ça fait bien vingt minutes que je tourne en rond. Un rien peut m'énerver encore plus ; sur les nerfs, j'ai déjà gueulé sur un groupe de filles qui s'était installé à un endroit improbable en plein milieu du passage, bousculé un couple qui marchait trop lentement à mon goût et fait d'autres gestes impolis. Ne pas les trouver me met hors de moi. Peu importe que ce soit Tobías ou Tomás, je dois impérativement tomber sur un Cadalso.

    Depuis la coursive du premier étage, j'aperçois enfin l'un des deux monstres qui discute avec Jaymes en contrebas, juste devant les machines à café. Je vois instantanément rouge. Ni une ni deux, je cours jusqu'à lui et une fois à sa hauteur, je l'attrape par le col et le penche violemment vers moi. Ce dernier écarquille les yeux, stupéfait tandis que Jaymes me demande ce qui se passe, incrédule. Mon regard analyse le visage qui me fait face et en conclus que Tobías est l'heureux destinataire de ma colère.

    — Urgent, déclaré-je entre mes dents serrées.

    Il n'a pas le temps de répliquer car je le traine dans mon sillage pour l'entraîner dans un coin un peu plus tranquille, dans lequel personne n'aura l'idée de mettre les pieds. Je ne peux pas parler de torture ou de meurtre devant tant de personnes innocentes. La colère aidant, je n'ai pas besoin de cacher mes tremblements de peur qui font habituellement surface en la présence des Frères Cadalso pour la seule et unique raison que ma haine et mon dégoût surpassent ma panique. J'entraîne Tobías à l'extérieur du bâtiment puis le plaque contre un mur, dans un endroit où il n'y a plus personne.

    — Où est Nate ? Le menacé-je.

    Son calme me rend dingue. Peut-être aurai-je préféré avoir Tomás en face de moi pour obtenir une réaction... il est imperturbable et son ton platonique me fait déglutir avec difficulté.

    — Un morceau certainement dans une boite, me répond-il.

    — Qu'est-ce que vous voulez franchement ? Lâché-je, lassée. Je vous ai répété je ne sais combien de fois que je ne dirai rien, vous savez que je ne peux que garder le silence et pourtant, vous jouez aux monstres. Ne perdez pas de temps, butez-moi !

    — Ce sont des relances. C'est facile d'oublier une promesse, me dit-il alors que je libère avec rage son col.

    J'enfonce mes poings pliés dans les poches de ma veste militaire et recule. J'en ai marre. Ils m'épuisent. Ma vie va-t-elle être comme ça dorénavant ? Ponctuée d'avertissements morbides qui hanteront mon sommeil ? En fait, plus je réfléchis, plus Jordi a raison. Il connaît bien sa famille en fin de compte. Les Cadalso ont joué aux bons amis, détendus mais sont en réalité de vicieux et sadiques tueurs sans états d'âme ni morale. Ils portent des masques en permanence qui rendent aveugle leur entourage. Je ne veux plus faire partie de ces idiots qui se laissent avoir par leurs faux-semblants. J'ai été conne, bon sang !

Les Frères Cadalso [ SOUS CONTRAT D'ÉDITION CHEZ GLAMENCIA EDITIONS ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant