★ CHAPITRE 1⎜Légendaires et machiavéliques

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Légendaires et machiavéliques

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Légendaires et machiavéliques

Her Five Minutes

Que la Californie m'épouse, j'étais son plus bel ange. Je voulais beaucoup de reconnaissance, des costumes pailletés et excentriques, des spots lumineux qui carbonisent la peau, être admirée et immortelle. Pour ça, il fallait gagner.

Je me laissais presque tomber devant l'affiche, légendaire, la même depuis toutes ces années : du bleu et du rouge américains, des silhouettes de guitaristes et de chanteurs. En majuscules, était inscrit le nom du concours le plus prestigieux et le plus médiatisé des États-Unis, et donc du monde : FINALS.

C'était la rentrée, le lycée recherchait des candidats. Plus de trois mille élèves dans cet établissement de la banlieue de San Francisco, la concurrence était sauvage, partout. Mais j'étais bien meilleure musicienne qu'eux.

Enchaînée à un piano depuis mes cinq ans, je pensais en battements par minute. Petite, je rêvais d'être remarquée au coin d'un théâtre, arrachée à ma mère pour enregistrer des disques et chanter pour le Président des États-Unis. Ce n'était jamais arrivé, je restais vulgairement travailleuse et anonyme. Il ne me restait que les Finals : la fabrique à talents la plus efficace. Plus que quelques mois avant mon sacre. Mais, le piano, cet instrument pour fille disciplinée et tortueuse, c'était fini. Depuis mes dix ans, je ne pensais qu'à ma guitare. Mon père s'était décidé à m'en offrir une pour mon anniversaire après des mois de crises de larmes. Il n'y avait que ça de toute façon.

Peu de gens étaient de mon avis quand il s'agissait de moi-même, surtout mes parents. J'étais une adolescente, promise à une carrière musicale spectaculaire, mais dissimulée derrière le destin qu'ils m'avaient dessiné dix-sept ans plus tôt. Charlie chirurgienne ou juge à la Cour Suprême. Mais moi mon crack c'était les solos de métal, le scat d'Ella Fitzgerald et ses trois octaves. Autant mourir accro.

À part la guitare, mes parents ne flanchèrent pas une seule autre fois dans leur éducation pour une fille droite, lisse, raisonnable, qui ne faisait pas de vagues. Pourtant rockstar dans mon cœur. Ils avaient leurs projets ordinaires et vénaux, moi j'étais démesurée et ambitieuse. En secret, ma voix et ma guitare se réveillaient sur les réseaux. Une vidéo par semaine, nouvelle tentative chaque fois de percer le net, de me gagner un producteur angelin.

J'entrais en Terminale et je n'avais qu'à remporter les Finals pour tout obtenir. La course comportait trois épreuves : les éliminations au sein du lycée, faciles ou presque, les Finals de Los Angeles, plus délicates, celles de New York qui exigeaient du génie. Nous n'avions de réelles chances qu'à mon âge. Avant, nous étions trop immatures, trop médiocres, trop peu ambitieux et humbles. Je jouais avec mes amis, encore trop modestes mais suffisamment talentueux : Daniel et Anthony.

Une liste m'attendait en dessous de cette affiche bien plus large que moi. Je tremblais à l'idée de sortir le stylo de mon sac pour y inscrire mon nom. Je voulais que la frénésie de la compétition commence, je m'étais entraînée tout l'été, j'étais prête. Il n'y avait qu'une seule personne à même de me concurrencer. Entendre son nom me faisait toujours frémir parce que j'entendais déjà sa voix magnétique : Thomas Buchanan.

RIVAL [SOUS CONTRAT D'ÉDITION]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant