Petit reuf.

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Après une bonne douche, comme lui avait conseillé son frère, il rejoignit ce dernier dans sa chambre. Son frère était rentré à la maison pour quelques jours. Cela avait mis toute la famille de bonne humeur. Faysal avait vingt-trois ans. Il avait arrêté l'école après avoir eu le bac pour se mettre à travailler directement. Les choses n'avaient pas fonctionné comme il le voulait, alors il a finit par choisir la facilité. Zakaria trouvait ça stupide venant de sa part. Pourtant, il était comme son frère : très intelligent, très futé. Mais il faut croire qu'il avait une devise qu'il suivait à la lettre.

- J'veux pas savoir quel est le moyen tant qu'il y a les couilles, tous les moyens sont bons pour nourrir la miff, s'était-il défendu après une remarque de la part de Zakaria au sujet de ses mains abîmées par les vols à l'arrachée.

Parfois, il se demandait si il finira comme lui. Après tout, il est bien. Très bien même. En plus d'être beau, il avait de l'argent, une famille, une copine, un appartement dans un des arrondissements de Paris et ce n'était pas une ordure. Il était très gentil. Il savait faire la part des choses. Faysal estimait que les lois étaient immorales et que sa délinquance avait des principes. Seulement, son défaut était son goût prononcé pour l'argent. On aimait tous l'argent, mais lui adorait ça. Il ferait tout pour quelques liasses. En réalité, ça se comprenait. Après avoir goûté la pauvreté, après avoir vécu dans la hess, vivre une vie comme celle de Faysal, ça changeait.. Il avait connu les deux extrêmes et probablement même ce qu'il y avait entre les deux. Peu importe, Zakaria ne souhaitait que son bien. Sachant que c'était bénèf' pour lui aussi : il le faisait quer-cro. Chaque fois qu'il avait besoin de quelque chose, il avait juste à lui demander. Zakaria adorait aller chez lui parce qu'ils ne faisaient que ça : dépenser de l'argent.

Ils commandaient des festins de burgers, de pizzas et tout ce qu'il s'en suivait. Ensuite, ils sortaient et  achetaient des vêtements, des chaussures. Parfois, ça le mettait mal à l'aise de savoir qu'en plus d'utiliser un argent qui n'était pas le sien, ce n'était pas non plus celui de son frère. Zakaria avait peur qu'un jour tout cela leur retombe dessus, et sur son frère en particulier.

     C'est marrant parce que ça le faisait penser à moi. On disait souvent qu'il ne fallait pas abuser des bonnes choses. "Camélia, elle, si elle était là... Elle vivrait sa meilleure vie." Pensait Zakaria. "Elle le faisait, elle. Elle abusait des bonnes choses. Elle abusait des autres, elles abusait de tout." Enfin, il était peut-être trop dur dans ses mots, mais il pensait que j'étais une matérialiste. Cela rejoignait le fait que j'étais une profiteuse, selon lui. Je profitais de l'argent des autres pour me procurer du matériel, des choses que j'aimerais avoir mais que mes moyens ne permettaient pas.

Il aurait pu me traiter de michto, mais ce n'était pas le cas : une michto donnait son corps en échange de matériel. Moi, je ne donnais rien. Je recevais, c'est tout. Zakaria pensait que c'était en particulier grâce à mon charme, ou mon talent de manipulatrice. Et encore, manipulatrice c'était un grand mot pour me définir, parce que je ne manipulais pas les gens. Je n'étais pas mauvaise mais je possédais un faible mélange de ruse et de manipulation que j'utilisais pour obtenir ce que je voulais. D'ailleurs, j'avais toujours ce que je voulais. Vraiment, Zakaria avait toujours trouvé ça insensé et irraisonnable. J'avais ce que je voulais sans jamais me salir les mains. Que ça concerne mes notes du lycée, que ce soit en matière de garçon, de copines, ou même ma famille. J'obtenais toujours ce que je désirais. Certaines personnes devaient forcément me jalouser sur ce point.

     "Cette partie d'elle la rendait très différente des autres" pensait Zakaria. "C'est quelque chose que les autres n'avaient pas. En même temps que je détestais cela, je l'admirais aussi." Il se demandait comment est-ce que je faisais. Un battement de cils et elle avait une nouvelle paire de chaussures. C'était épatant et surprenant à la fois, selon lui. Zakaria supposait que c'était probablement parce que j'étais une fille. Mais les garçons aussi ont des privilèges semblables. Mais grâce à leurs belles paroles. Moi, c'était sûrement grâce à mon aplomb ou mon courage, disait Zakaria. Il ne saurait choisir le bon mot. En effet, la chance souriait aux audacieux. "Cette phrase la définissait bien, ce petit bout de femme".

Oxymore.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant