Mots noirs sur papier blanc.

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     À peine arrivée au parc, je m'étais allongée sur l'herbe. J'étais très fatiguée, depuis ma dernière crise. J'essayais de me reposer le plus souvent possible. Le paysage était superbe. J'étais seule lorsque je me baladais avant d'avoir l'idée de m'installer ici pour un moment. Le parc était gigantesque et rempli de verdure. Quelques infrastructures en bois servaient de terrain de jeux aux enfants et un tas de personnes faisaient du sport, de la trottinette ou bien du skate sur la route en béton. Je sentais l'herbe me chatouiller les pieds. J'étais si heureuse de pouvoir à nouveau courir. J'ai retiré mes chaussures et j'ai laissé la plante de mes pieds fondre dans la verdure. Si seulement les gens avaient connaissance du bonheur que cela me procurait, ils prendraient moins souvent les choses à la légère. Nostalgique, j'ai fini par rentrer chez moi.

    En effet, comme on dit « on se rend compte de la valeur d'une chose seulement quand on la perd ». C'était totalement réel, bien malheureusement. De mon côté, je m'estimais chanceuse : combien de fois est-ce que j'avais perdu la mobilité de mes deux jambes ? Parfois si violemment que j'avais presque cru la perdre définitivement. Cependant, grâce à Dieu, j'ai toujours guéri au bout de quelques temps. Je me rendais donc totalement compte de la valeur des choses, quelles qu'elles étaient, et je tentais d'en profiter au maximum avant de les perdre pour de bon. En fait, la maladie n'était pas si handicapante que ça. Elle m'apprenait à réfléchir et me remettre en question. Elle m'apprenait à vivre. Allier maladie et religion était un super combo. Si l'on prenait les choses du bon côté concernant la maladie, la religion nous aidait à tenir bon. En général, la maladie rendait extrêmement déprimé et, comme une sangsue, elle absorbait le peu de forces qu'il nous restait, usant tous nos efforts et notre mental. La foi était finalement un peu comme la main qui nous retenait au moment où nous allions chuter de la falaise. Une fois que l'obstacle face auquel nous avions perdu tout espoir fut surmonté, on se jette au sol et on pleure. Des larmes perlent sur nos joues, mélange de reconnaissance et d'amour, dédié à l'aide que l'on a reçue ; en l'occurrence, celle de Dieu. En plus d'avoir retrouvé la foi, on acquiert une infime parcelle de confiance en soi qui nous permettra de surmonter la prochaine épreuve plus rapidement.

Et puis, c'est bien connu : si on remercie Dieu, il multipliera Ses bienfaits. Cependant, si on l'oublie, Il nous oubliera à son tour. C'était donnant-donnant.

    Pas mal de choses présentaient les mêmes conditions, notamment ce fameux hadith annonçant que celui qui ne pardonnait pas ne serait pas pardonné. Il était difficile de pardonner, particulièrement lorsque l'on était toujours blessés au fond. Je n'avais pas pardonné Zakaria, je n'avais juste plus la force de lui en vouloir. Je ne m'étalerais pas une nouvelle fois sur le sujet, mais tous ceux qui avaient observé notre histoire du début à la fin avaient bien compris à quel point j'avais été détruite. Je n'allais pas jouer la fille forte, renchérir en parlant à un tas de garçons.. Non, non. Il fallait être humble : on ne triomphait jamais de ces forces-là. C'était ma faute après tout, je ne pouvais m'en vouloir qu'à moi-même. Pas mal de rappeurs, Niro en particulier, disait que si tu t'étais fais trahir, c'était de ta faute : c'est toi qui avais accordé ta confiance. En effet, il avait raison. J'avais cru en ces sentiments humains et c'était à cause de mon humanité que je m'étais perdue.

    Lorsque j'avais aperçu Zakaria, au lycée, je n'en avais pas cru mes yeux. Une vague de rage prit le dessus sur toutes les émotions que je pouvais ressentir au moment-même. J'avais tantôt envie de l'étrangler, tantôt envie de pleurer : il m'avait fait croire en quelque chose qui n'existait pas, il m'avait fait aimer quelqu'un qui ne m'aimait pas et par dessus tout, il m'avait fait souffrir alors qu'il avait fait la promesse que ça n'arriverai jamais. Malgré tout ça, mes sentiments étaient si hétérogènes. Un soir je m'endormais et il me manquait plus que tout, le lendemain matin je ne voulais plus jamais le revoir. Mélange d'amour haineux, de pardon rancunier. Zakaria avait un don pour faire ressentir des émotions opposées. Il avait un don pour poser les oxymores les plus complexes. 

Oxymore.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant