Le Crépuscule d'Asgard (Loki - Tome I)

De retour à Asgard

Cela faisait maintenant des heures que Thor et Sif marchaient. Ils avaient fini par quitter les terres enneigées et ils s'aventuraient désormais dans une immense forêt de chênes veinée de nombreux cours d'eau désaltérants et grossis par la fonte des glaciers en plein été.

Le soleil se mourait au-delà des sommets encore couverts de neige alors que les deux Asgardiens s'enfonçaient toujours davantage sous l'ombre des grands arbres. La fraîcheur obsédante des feuilles mortes et l'humidité de la mousse qu'ils foulaient de leurs pieds envahissaient leurs narines. Sif prenait de grandes respirations.

Cette odeur de sous-bois lui avait terriblement manqué. Sur Midgard, l'air étouffant empestait le soufre de Muspellheim. La poussière soulevée par les véhicules et la masse des gens qui se pressait sur le pavé prenait à la gorge comme une boule de pus prête à éclater. Comment Thor faisait-il pour s'y habituer ?

Le bruissement des branches lentement caressées par le vent était une musique à ses oreilles. Parfois, le cri d'un oiseau rompait sa contemplation. Un grand bruit retentit et brisa le silence dans lequel ils étaient plongés. L'estomac de Thor venait de pousser un gargouillement éloquent.

« Je suis affamé, confia le dieu. Nous devons nous arrêter pour la nuit. Allons près de ces grands blocs de pierre, on y trouvera peut-être un renfoncement pour s'y abriter », fit-il en montrant du doigt des rochers dressés face à eux. Une petite cavité permit aux deux compagnons de trouver un refuge pour la nuit.

« Je vais essayer de chasser quelques gibiers et de revenir avec du bois pour le feu, en attendant reste ici », ordonna-t-il à Sif avant de disparaître dans la pénombre qui grandissait.

Quelques minutes plus tard, Thor revint les bras chargés de rondins de bois, tenant d'une main les pattes arrière de trois lièvres encore chauds. Rapidement, il déposa le bois en tas à l'intérieur de la cavité et de son marteau frappa avec force mais mesure afin que quelques-unes de ses étincelles allument un feu.

Pendant ce temps, Sif dépeçait les gibiers à l'aide d'une dague, tirant sur la peau encore tiède et souple pour décoller les poils doux de la chair tendre des petites bêtes. Lorsque les braises furent suffisamment chaudes, Thor transperça les carcasses des lièvres à l'aide d'une branche et posa le gibier sur une petite installation en bois à quelques centimètres du feu. En sécurité sous les rochers, les deux Asgardiens mangèrent en silence.

Le soir venu, le froid engourdissait leurs membres malgré la chaleur du feu qui crépitait près d'eux. Transie de froid, les mains tremblantes, Sif fixait le feu. Thor s'assit à ses côtés, passa un bras autour de sa taille et la blottit tout contre lui. La guerrière eut un frisson quand elle sentit la chaleur de son torse et perçut le lent mouvement de sa respiration rassurante. Écrasée par la fatigue, elle déposa sa tête contre la poitrine du dieu, le regard toujours rivé sur les flammes qui léchaient la voûte de la cavité.

Dès les lueurs de l'aube, les deux guerriers se réveillèrent encore engourdis par la froideur de la nuit. À la hâte ils se mirent en marche. La forêt devenait moins dense par endroits laissant parfois les rayons du soleil percer le feuillage et réchauffer leur peau. Alors que tout était paisible et que seul leur souffle rompait l'état de quiétude de la nature, ils entendirent au loin des hurlements sauvages.

« Des loups ! » s'écria Thor qui regardait de tous côtés. « Mieux vaut rester sur nos gardes ». Ils continuèrent leur route d'un pas rapide quand des bruits de branchages cassés retentirent.

« Ils approchent », souffla la guerrière en se saisissant de son bouclier.

Arrivés dans un bosquet, ils se placèrent instinctivement dos à dos, prêts à combattre. Un grognement provint de la gauche du dieu. Sorti d'un fourré, un grand loup noir se dressait devant lui. Sans même réfléchir, il invoqua Mjöllnir et fracassa la tête du loup. Le coup lui avait brisé les os du crâne comme du verre. Un flot de sang jaillissait de la mâchoire en miettes de la bête maculant la terre d'un rouge vermeil. Enhardi par cet échauffement du poignet, Thor se retourna vers Sif qui était restée bien silencieuse. Et pour cause, quatre loups lui faisaient face, les crocs perçants leurs babines tremblantes d'où un mince filet de bave écumante pendait. L'une des bêtes se jeta sur la guerrière qui l'esquiva de son bouclier. Thor lança puissamment son marteau qui transperça la cage thoracique de deux loups. Le craquement des vertèbres et de la chair déchirée résonna dans toute la clairière.